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Encyclopédie internationale
des histoires de l’anthropologie

Issu d’un milieu de manufacturiers et de rabbins, Marcel Mauss (1872-1950) est un sociologue et anthropologue dont la pensée inclassable, protéiforme, a irrigué toutes les sciences sociales françaises. Agrégé de philosophie (1895), principal collaborateur d’Émile Durkheim, son oncle maternel, à L’Année sociologique, Mauss s’oriente d’abord vers l’histoire et la sociologie des religions comparées à l’École Pratique des Hautes Études (EPHE). Sous la direction de ses maîtres, au premier rang desquels l’indianiste Sylvain Lévi, Mauss s’y familiarise avec les religions de l’Antiquité – qu’il s’agisse de l’Inde, de la Grèce, de Rome, ou de l’Europe païenne, « barbare » – qu’il compare à l’ethnographie des peuples « primitifs » contemporains d’une manière telle qui dialogue avec l’anthropologie évolutionniste tout en la remettant en question. Il signe plusieurs articles avec Henri Hubert, son « jumeau de travail », sur divers aspects de la vie religieuse. Il met en chantier une thèse sur la prière qui restera inachevée. En 1901, il devient titulaire de la chaire d’histoire des religions des peuples non civilisés à l’EPHE. Co-secrétaire général de l’Institut d’Ethnologie à sa création en 1925, il est élu au Collège de France en 1930 sur une chaire de sociologie, après deux échecs vingt-cinq ans plus tôt. Avec Paul Rivet et Lucien Lévy-Bruhl, Mauss est l’un des pères fondateurs de l’ethnologie française dans les années 1920-1940. Celui qui, pourtant, ne se reconnaissait pas comme ethnologue mais sociologue – fidèle en cela à Durkheim, et à l’esprit du projet intellectuel qui soudait le cercle savant et amical réuni autour de L’Année sociologique –, a durablement imprimé sa marque sur l’anthropologie française. Tout aussi paradoxalement, alors qu’il n’a pas fait de terrain, il est passé à la postérité comme le père fondateur de l’ethnographie française, auteur d’un Manuel d’ethnographie édité par l’une de ses étudiantes, Denise Paulme. C’est que, grand maître de l’oralité, il a joué, grâce à son enseignement, son érudition et sa sensibilité ethnologique incomparables, un rôle décisif dans la formation intellectuelle de la première génération d’ethnologues professionnels français qu’il a inspirée sans pour autant systématiser une école de pensée rigoureuse. Auteur d’une œuvre forte disséminée dans une infinité d’articles signés seul ou en collaboration, de notes et de recensions, il a exercé sa curiosité et son esprit d’analyse sur de très nombreuses questions : le droit, le sacré, le sacrifice, la magie, les classifications, la mort, le symbolisme, la psychologie collective, les notions de moi et de personne, les techniques du corps (on lui doit la notion d’habitus), la morphologie et la vie sociales, la nation…. Pour la postérité, il reste l’homme de l’ « Essai sur le don », âprement discuté au long des décennies, dans les pages duquel il formule le concept de « fait social total » et popularise la notion émique de « hau ». Sa vie durant, il a mené de front activité scientifique, largement tournée vers des entreprises collectives, et engagement politique : dreyfusard, socialiste (c’est un ami de Jaurès et l’un des fondateurs de L’Humanité), proche du mouvement coopératif, internationaliste, membre de l’Union rationaliste. Affaibli depuis de nombreuses années, il décède en 1950.

Mots-clés : Sociologie religieuse | Sociologie | Histoire des religions | Psychologie | Évolutionnisme | Diffusionnisme | Ethnographie | Hau | Engagement politique | Socialisme | Première moitié du XXe | Anthropologie des religions | Religions préchrétiennes | Don | Symbolisme | Classifications | École durkheimienne | Émile Durkheim | Claude Lévi-Strauss | Henri Hubert | Paul Rivet | Lucien Lévy-Bruhl | Maurice Leenhardt | Léon Marilier | Arnold Van Gennep | L’Année sociologique | Collège de France | Musée d’ethnographie du Trocadéro | Robert Hertz

Sources primaires

Sources secondaires

Notes et instruments de recherche