Deux ans après le retour de Dakar-Djibouti, Marcel Griaule prend la direction de la mission Sahara-Soudan afin de compléter les recherches et les collectes effectuées en pays dogon. Malgré sa brièveté, cette expédition transsaharienne est toujours conçue comme une exploration aventureuse de sociétés africaines incarnant, aux yeux des ethnographes, une tradition originelle à archiver dans l’urgence. En revanche, les objectifs et les méthodes d’enquête ont évolué. Pour ce second séjour en pays dogon, Griaule et ses collègues ne visent plus l’inventaire exhaustif d’une culture, mais la découverte d’objets et de secrets millénaires cachés au fond de grottes ou de « sanctuaires » systématiquement fouillés (après leur repérage aérien ou terrestre). Cette nouvelle orientation – pénétrer au cœur des mythes et du « sacré » – ne se prête guère à la pluridisciplinarité, favorise l’émergence d’informateurs privilégiés et annonce les futurs engagements de Marcel Griaule pour promouvoir et sauvegarder les traditions d’une Afrique authentique dont il serait à la fois le spécialiste et le porte-parole.
Cet ouvrage est le quatrième volume des Carnets de Bérose, une collection éditée électroniquement par le Lahic et le département du Pilotage de la recherche et de la politique scientifique de la Direction générale des patrimoines (ministère de la Culture). Il fait partie d’une série consacrée aux missions, enquêtes et terrains des années 1930.
Anthropologue, Éric JOLLY est chargé de recherche au CNRS et membre de l’IMAf (Institut des Mondes Africains). Ses travaux les plus récents portent notamment sur l’histoire de l’ethnologie française et sur la circulation mondiale d’emblèmes culturels dogon, avec pour socle commun à ces deux études une analyse des productions graphiques et scientifiques de l’École Griaule.