Le passage du recueil de faits folkloriques à une approche anthropologique des littératures et des musiques de l’oralité a été sans conteste, au moins pour le domaine français, « une affaire de femmes ». Il y avait eu sans doute, auparavant, des femmes folkloristes telles Angélina Duplessix (Morel 2015) ou Marguerite Gauthier-Villars (Heintzen 2014), mais le souvenir de leurs enquêtes ou, quand elles n’étaient pas demeurées inédites, l’écho des publications qui avaient suivi étaient imperceptibles, en comparaison de la renommée d’un Patrice Coirault (Université de Poitiers 1997). À l’inverse, dans les années 1950-1960, aucun homme ne fait ombrage à Claudie Marcel-Dubois (1913-1989). Figure d’autorité s’il n’en fut jamais, elle reste identifiée et, plusieurs tons en dessous, célébrée comme la promotrice de l’ethnomusicologie de la France (Gérard 2014) (fig. 1).
Elle a aussi été l’une des figures marquantes de la génération fondatrice du musée national des arts et traditions populaires (MNATP), demeurant, longtemps après son départ à la retraite intervenu en 1981, comme la butte-témoin d’une époque convaincue que la matrice muséale était seule à même de garantir l’existence, la légitimité et l’accroissement du savoir anthropologique. Une figure, non une icône toutefois, tant sa renommée a souffert de la contestation que le personnage, plus que l’œuvre scientifique, a suscitée, même s’il était fatal que, comme toute figure de proue, elle devienne une cible. Au vrai, son bilan comporte des aspects paradoxaux et même déroutants, à commencer par l’écart entre l’ambition disciplinaire proclamée et la réalité de sa pratique ethnographique, menée sans doute avec un apparat technologique très sophistiqué mais plus en continuité qu’en rupture avec les collectes folkloristes, dans l’accumulation méthodique, voire obsessionnelle, de données : de la méthode plus que de la méthodologie, ou alors cantonnée à l’organisation de la documentation, et moins encore d’élaboration théorique.
Marcel-Dubois a tôt brigué et obtenu un poste de responsabilité, ce qu’a objectivement favorisé la jeunesse des deux institutions auxquelles elle s’est arrimée dès leur création, le MNATP et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; elle s’est ensuite employée sans relâche à fortifier un pré carré dont l’inexpugnabilité même a été renforcée par la visibilité qu’elle avait acquise dans les cénacles internationaux de l’ethnomusicologie. Mais il faut aussi prendre la mesure de ce qu’a apporté à l’équation le « facteur Maguy » (fig. 2).
Car, assez vite et durablement, Marcel-Dubois a été flanquée, plus que d’une assistante, par une altera ego, d’une doublure au sens théâtral du terme, connue comme « Maguy Pichonnet-Andral » (ou « Maguy Andral »), qui, longtemps, de 1946 à 1981, a œuvré dans l’ombre – ou la coulisse –, avant de prendre officiellement mais assez brièvement (1981-1986) sa relève. L’indissolubilité autant que l’impénétrabilité ont caractérisé ce couple féminin, paire de caryatides soutenant le temple de l’ethnomusicologie de la France. Sa singularité réside pour beaucoup dans son unité de genre et c’est cette spécificité qu’on se propose d’investiguer.
À cette fin, on examinera successivement comment se sont déroulés les débuts de chacune dans la vie, leurs années de formation, puis comment s’est forgé le projet, disciplinaire, institutionnel, quelque peu entrepreneurial, qui a soudé leur tandem, quels en ont été les ressorts et comment il s’est déployé ; dans une dernière séquence, le propos renouera avec un registre plus narratif pour rendre compte du déclin de ce petit empire.
Premiers pas, premières notes...
Quand un même cadre de travail réunit, fin 1945, Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral, la première a 32 ans, la seconde 23. L’expérience de cette jeune femme-là est donc bien plus fournie que celle de cette très jeune femme-ci. Pour autant, il y a dans leurs parcours, menés jusqu’alors chacune de son côté, quelques traits communs.
On relève en effet qu’elles ont l’une et l’autre vécu des enfances précocement privées, à trois et cinq ans, de la présence paternelle, la Grande Guerre en ayant fait de ces filles uniques des pupilles de la Nation. Le père de Claudie est mort en 1916, aux commandes de son avion, abattu par l’artillerie allemande [1]. Celui de Maguy est décédé en 1928 des séquelles des gaz inhalés dans les tranchées. Cependant, le mimétisme est imparfait : le premier est « mort pour la France », en héros ; le second disparaît, au terme d’un lent calvaire, en ancien combattant victime de guerre. L’écart de causalité a eu, intentionnellement ou pas, des conséquences comportementales bien tranchées, dans le registre éloquent de l’anthroponymie : l’une s’est placée sous l’invocation de l’ascendant en ajoutant son prénom au nom de famille, commun entre tous, de Dubois, d’où le patronyme, au sens plein du terme, de « Marcel-Dubois [2] » ; l’autre, qui, par ailleurs, avait déjà abrégé son double prénom de « Marie-Marguerite » en « Maguy », a opté pour l’effacement du nom du père, Pichonnet, au profit de celui d’Andral qui était le nom de scène de sa mère, artiste lyrique née Jeanne Dagois [3].
La précocité de l’apprentissage et l’intensité de la pratique musicale offrent un second point de convergence. Ici toutefois, le cursus de Marcel-Dubois ne surpasse guère, quoiqu’elle ait laissé dire, celui de sa cadette. Si elle entre à quatorze ans au Conservatoire de Paris [4], dans la classe de piano de Denis-Joseph Morpain, elle en sort dès 1929, sans avoir été admise à concourir au prix [5], et poursuit jusqu’en 1933 sa formation au cours privé de Marguerite Long, dont le prestige personnel ne garantit pas l’excellence de l’enseignement (Depaulis 1996 : 4). À partir de 1932, elle suit parallèlement à l’Université de Paris (institut d’ethnologie et institut d’art), mais aussi aux Langues orientales (institut de civilisation indienne et des hautes études chinoises), à l’École pratique des hautes études (EPHE) et à l’École du Louvre, les enseignements de maîtres tels que René Grousset, Paul Rivet, Philippe Stern, Marcel Mauss ou encore Marcel Griaule : jusqu’en 1942, elle accumule ainsi les diplômes, dont deux sanctionnent la rédaction de mémoires.
Loin de cet empilement tous azimuts, la formation d’Andral, tant artistique que scientifique, a été bien moins diverse. Durant son enfance à Montluçon, elle avait pratiqué assidûment le piano mais aussi la vielle à roue, qu’elle sonnait dans un groupe folklorique. Après son installation à Paris, en 1935 [6], elle a repris des leçons de piano avec Alice Sauvrezis (1866-1946) : cette disciple – et pupille – de César Franck, qui a mené une quadruple carrière de pianiste, de professeure, de cheffe de chœur et de compositrice, avait aussi fait partie d’un groupe informel de musiciens parisiens attachés à leur commune origine bretonne et elle avait organisé à la Sorbonne, en 1925, des « soirées celtiques [7] ». De 1947 à 1949, donc après son recrutement par le CNRS, Pichonnet-Andral a suivi au Conservatoire [8] le cours d’histoire de la musique dispensé par Norbert Dufourcq et elle a obtenu une première médaille [9]. Puis en 1951-1952 [10], elle s’est initiée à la paléographie musicale avec Solange Corbin, qui commençait alors son enseignement à l’EPHE.
Placée ainsi d’emblée en position d’infériorité intellectuelle par rapport à celle qui devait rester durant trente-cinq ans sa supérieure hiérarchique, Pichonnet-Andral partait aussi avec un handicap économique qui, au moins un temps, a minoré son capital social. Si les archives publiques accessibles ne dévoilent rien de précis sur leurs ressources patrimoniales ou financières respectives, il semble que l’orpheline de Paris avait des arrières mieux assurés que l’orpheline de Montluçon. Certes pas au point de rendre superflu l’exercice d’une activité salariée mais assez pour lui permettre de consacrer une décennie à sa formation scientifique, alors que sa future collègue, soutien de famille de sa mère retirée de la scène et gravement malade [11], a dû sacrifier ses études pour se procurer un travail.
Plus précisément, Marcel-Dubois semble n’avoir cherché qu’un complément de ressources dans les emplois à temps partiel, successifs ou cumulés, qu’elle a occupés de 1934 à 1941. Mais elle les a trouvés, et ce n’est pas un hasard, dans des institutions qui offraient un terrain d’application bien ajusté aux enseignements théoriques suivis parallèlement. S’accommodant de la modicité des émoluments que lui valaient ces engagements [12], elle a aussi fait ainsi un investissement à moyen terme en se faisant apprécier de ses employeurs, ce qu’elle a su capitaliser, le moment venu [13].
L’apprentissage a commencé au musée d’ethnographie du Trocadéro (MET) et s’est achevé au MNATP, avec le passage d’une aile à l’autre d’un édifice rebaptisé entre-temps Palais de Chaillot. La jeune femme, 21 ans à sa première embauche, est recrutée en octobre 1934 pour épauler André Schaeffner, chef d’un modeste service d’ethnographie musicale, mais surtout pour assurer son intérim jusqu’en mai 1935 [14]. À la même période, elle devient l’archiviste-bibliothécaire de la Société du folklore français, fonction qu’elle occupe jusqu’en 1943.
Après cette première expérience, elle rejoint aux Archives internationales de la danse (AID) Rolf de Maré [15], Pierre Tugal et Guy Le Floch : elle assiste ce dernier pour le commissariat de deux expositions consacrées aux danses folkloriques françaises (1936) puis européennes (1937) (Baxman, Rousier et Veroli 2006 : 132). En lien avec cette manifestation, elle assure le secrétariat du Congrès international de folklore (Velay-Vallantin 1999), ce qui peut s’interpréter comme un indice du crédit qu’elle a acquis auprès de Georges Henri Rivière (GHR), le principal organisateur français de ce rassemblement, l’année où lui-même s’affranchit de la férule de Paul Rivet, dernier directeur du MET, pour fonder le musée des arts et traditions populaires.
Mais entre-temps elle-même était revenue au MET : en janvier 1936, elle y est nommée « attachée », avant d’être chargée d’organiser, à partir de juin 1938, dans les locaux rénovés d’un musée qui réouvre sous le nom de Musée de l’Homme (MH), « des séances bimensuelles de musique et de danses traditionnelles [16] ». Cette même année 1938, peut-être par l’intercession de GHR, elle est recrutée comme « aide-technique » au non moins nouveau Centre national de la recherche scientifique, mais c’est bien en qualité d’« attaché au musée » (de l’Homme) qu’elle participe durant l’été 1939 à la « mission de folklore musical en Basse-Bretagne » (fig. 3).
Vient 1940, l’année de « l’étrange défaite », durant laquelle Marcel-Dubois rédige le mémoire sur « la musique de l’Inde et de l’Indochine ancienne » qu’elle doit soutenir l’année suivante pour obtenir son diplôme de l’EPHE, bientôt édité (Marcel-Dubois 1941). Parallèlement, elle assure d’une part les fonctions de « chef intérimaire de l’Office de documentation folklorique », qui est le centre de ressources documentaires du MNATP, et elle est d’autre part chargée d’intégrer dans le fichier général du département de la musique de la Bibliothèque nationale le catalogue du folkloriste Jean-Baptiste Weckerlin, qui formait précédemment le fonds de folklore musical à la bibliothèque du Conservatoire. Les deux missions, qui se prolongent jusqu’en 1942, s’inscrivent donc dans le registre de la bibliothéconomie, assez loin de la recherche en anthropologie [17]. Elles ne desservent cependant pas l’objectif qu’affiche désormais celle qui, depuis les premiers mois de l’Occupation, est qualifiée de « boursière de recherche » au CNRS : obtenir son intégration à temps plein sur un emploi contractuel de chargé(e) de recherche, ce qui lui est accordé à compter du 1er octobre 1943, l’essai étant même transformé en juin 1944, deux mois avant la Libération de Paris, par sa désignation comme responsable – et unique employée – d’un « service de musicologie folklorique » nouvellement créé au sein du musée-laboratoire. Malgré la publication d’articles signés de son nom dans des journaux maréchalistes et collaborationnistes [18], cette mesure nominative n’est pas remise en cause quand son promoteur, GHR, se retrouve, lui, suspendu de ses fonctions.
En comparaison, c’est un circuit court, au service d’une plus modeste stratégie, qu’a emprunté Pichonnet-Andral : en décembre 1945, elle intègre comme « chômeuse intellectuelle » le Centre 3164, subdivision de l’un des quatre « chantiers » attribués au MNATP en 1941, placé sous la responsabilité de Marcel Maget et notamment chargé du « montage de la phonothèque du musée » (Rolland-Villemot 2015 : 18). Le contrôle technique de ce travail incombant logiquement à Marcel-Dubois, c’est ainsi que se forme le couple au plan professionnel. Il passe à l’été 1946 l’épreuve du terrain avec une première mission en tandem, sur les plateaux du Velay (Le Gonidec 2013), suivie d’une autre en Bas-Berry, après quoi Pichonnet-Andral est nommée ’stagiaire de recherche’ au CNRS (octobre 1946 [19]). La mise sur orbite du satellite de l’astre Marcel-Dubois a donc été une affaire rondement menée, même si la jeune femme doit ensuite patienter trois ans pour décrocher un contrat d’attaché de recherche.
Rien d’étonnant à cela. On peut tenir pour certain qu’elle avait fait avant-guerre la connaissance de sa future chef de service : peut-être par l’intermédiaire de Guy Le Floch qui, en 1936, l’année même où il prépare avec Marcel-Dubois les expositions des AID, fait partie, comme la toute jeune Maguy – 14 ans – de la délégation française au Congrès mondial des loisirs, ce grand rassemblement folklorique que Rudolf Hess organise à Hambourg [20]. Le premier y a présenté une communication, la seconde a joué de la vielle, dansé ou chanté dans le groupe folklorique bourbonnais qui s’y est produit.
Plus simplement – et juste un peu plus tard –, comme fille de sa mère : Jeanne Andral était en effet l’une des artistes lyriques auxquelles Marcel-Dubois faisait appel pour interpréter les exemples musicaux illustrant l’émission qu’elle assurait sur les ondes de Radio-Paris, « La demi-heure agricole [21] ».
Dès lors, on peut se demander si Marcel-Dubois n’a pas prié Alice Sauvrezis de parfaire la formation pianistique de Pichonnet-Andral. Il est en effet plausible que l’élève de Franck et Marcel-Dubois se soient croisées : malgré leur différence d’âge, elles participaient de la même société musicale parisienne, où se mêlaient les anciens élèves du Conservatoire, de la Schola Cantorum et de l’École normale de musique ; la préparation de la « mission 1939 » a pu d’autre part inciter la cadette à se documenter auprès de ces compositeurs originaires de Bretagne, dont Sauvrezis faisait partie, et qui écrivaient une musique folklorisante aux tournures modales. Mais Jeanne Andral, musicienne accomplie et non moins introduite dans le milieu, a pu tout aussi bien faire la démarche et comme aucun élément ne permet d’affermir l’un des termes de cette alternative plutôt que l’autre, on se résignera à retenir plus prudemment, au terme de ce prélude, que les conditions étaient objectivement réunies pour instaurer une forte connivence.
Faire œuvre commune
La métaphore architecturale, tout comme la polysémie des termes d’œuvre et d’ouvrage, s’appliquent particulièrement bien à l’entreprise à laquelle Marcel-Dubois et Andral se sont vouées, rien moins que « l’étude génétique du fait musical [22] » (Marcel-Dubois 1960 : 119), comme à la division du travail qu’elles ont instaurée. Auprès de l’aînée, en charge de la maîtrise d’œuvre et de la conception du dess(e)in, la cadette a rempli l’office dévolu au bureau d’étude : comme l’a très justement écrit Jacques Cheyronnaud, elle a été son « ingénieur au sens originel du terme » (Cheyronnaud 2005 : 532) (fig. 4).
Cette subordination consentie n’a jamais été remise en cause et s’est discrètement perpétuée quand la seconde a pris en 1981, dans l’organigramme du MNATP, la succession fonctionnelle de la première [23]. L’exaltation et la ferveur imprègnent ainsi le retour d’expérience formulé par Andral en 1969 : « J’ai eu la chance de collaborer sans relâche à l’enquête nationale sur la musique paysanne française (…), d’être associée à la création d’une œuvre », ou, plus solennel encore : « j’ai participé aux découvertes de Claudie Marcel-Dubois sur les musiques traditionnelles des Français, qui l’ont conduite à instaurer une discipline, l’ethnomusicologie de la France [24] ».
Sous-tendant de telles proclamations, il y a une thèse, formulée sous forme de mise en garde : « il y a lieu de ne pas considérer la chanson comme le représentant unique de notre musique populaire » (Marcel-Dubois 1960a : 118), puis développée par un appel à chercher « les fonctions originelles de ces musiques en relations avec la structure du groupe social, avec les anciennes techniques agricoles ou artisanales » (Marcel-Dubois 1960a : 118). Il faut donc s’intéresser aussi à d’autres phénomènes sonores, dits « paramusicaux » tels que « récitations modulées, langage parlé aux animaux, plaintes funéraires » (Marcel-Dubois 1960a : 119).
On peut souligner ici l’importance du texte auquel sont empruntées les dernières citations car il dégage des orientations de travail à partir du bilan de ce qu’elles ont accompli durant les quinze premières années de leur association, mais aussi des hypothèses qu’elles ont pu ainsi affermir. Il s’agit de l’article intitulé « Ethnomusicologie de la France, 1945-1959 » et publié en 1960 dans Acta musicologica où Marcel-Dubois révoque le certificat de décès dressé par les folkloristes : pour elle et sa collègue, il n’y a pas de paradigme du dernier qui tienne car « notre musique populaire n’a pas perdu toute fonction sociale » (1960a : 114). Elle soutient au contraire qu’il est possible et même qu’il y a « lieu de se livrer en France à des observations directes assorties des méthodes et des techniques modernes comparables à celles utilisées par les ethnographes en terres lointaines » (1960a : 113). Ayant prêché d’exemple, elle tire le principal enseignement de leur opiniâtreté : « c’est peu dire que la musique populaire et traditionnelle des Français était méconnue ; sa véritable nature et sa condition infirment l’image de divertissement champêtre au style suranné, léger ou même paillard » (1960a : 114). Si l’œuvre projetée n’atteindra jamais le stade de l’ouvrage exécuté, néanmoins, dans un va-et-vient constant des plans au chantier, elle s’est bel et bien incarnée dans l’enquête, poursuivie par la recherche, institutionnalisée grâce au musée et encore transmise par l’enseignement. Ce sont les quatre ressorts d’un mécanisme remarquablement agencé qu’il faut maintenant s’employer à démonter.
Enquêter
On ne s’attardera pas toutefois sur le premier ressort, déjà examiné en détail dans une précédente étude (Gasnault & Le Gonidec 2016 [25]), sinon pour relever l’écart, sans doute inévitable, entre la volonté affichée de balayer l’hexagone puis de le déborder en s’attaquant à l’outremer et à la francophonie nord-américaine, et un bilan déparé par la superficialité des recherches menées dans le quart nord-est de la France comme par des impasses affectant la plupart des départements alpins : en tant qu’enquêtrices, Marcel-Dubois et Andral n’ont guère franchi le Rhône que pour un terrain, d’ailleurs réitéré, dans une bourgade du Haut-Var où officiait un fameux fabricant de galoubets et tambourins [26] (fig. 5).
Elles se sont en fait déployées sur la façade atlantique, de la Normandie au Béarn, et sur une vaste région centrale, allant du Berry au Roussillon. Par ailleurs se sont toujours conjuguées pour limiter à quelques jours, deux semaines d’affilée au plus, la durée de leurs séjours sur le terrain, la modestie – relative – des crédits dont elles disposaient pour leurs missions et l’obligation de présence à Paris pour prendre part à l’administration du musée et faire face à leurs autres charges. Se mettre en immersion pour passer le seuil de connivence au-delà duquel l’observation devient participante n’a jamais pu constituer, pour Marcel-Dubois et Andral, le mode usuel d’enquête. Aussi par dépit ou par résignation ont-elles plutôt affiché leur aptitude à dépasser les objectifs du Plan, comme les héros du travail de l’Union soviétique, en relevant inlassablement dans leurs rapports d’activité le nombre d’informateurs rencontrés, d’enregistrements effectués, de transcriptions musicales opérées, etc. Faire en somme du chiffre, de la sorte aussi faire patrimoine, en renvoyant à leurs insuffisances les folkloristes qui n’avaient pas su ou pas voulu s’approprier les techniques d’enregistrement du son, mais aussi en éclipsant, par le systématisme et l’ampleur de leurs collectes, la Phonothèque nationale, continuatrice trop timide et trop intermittente de Ferdinand Brunot, le fondateur des Archives de la Parole (Cordereix 2014). Il y avait bien quelque contradiction à décréter l’urgence qui s’attachait à la réalisation de ces prélèvements et à les présenter comme indispensables au « sauvetage d’un patrimoine national [27] » dont elles vantaient ailleurs la vitalité, mais ce discours alarmiste était surtout destiné aux argentiers du CNRS et du MNATP, auxquels il fallait bien servir les arguments susceptibles de leur faire desserrer les cordons de la bourse.
L’impression dominante reste que, pour des chercheuses qui se devaient d’être tout autant des conservatrices, le terrain, poste d’observation des pratiques musicales dans une France rurale en voie de modernisation accélérée, a davantage encore fait figure de carrière, où elles se pourvoyaient d’archives sonores dont il était avantageux de souligner l’accroissement exponentiel.
Chercher
Enquêtrices mais surtout collectrices, on vient de le voir, les ethnomusicologues se sont revendiquées chercheuses, ce qui était bien le moins dans un établissement s’affichant dès sa création comme un musée-laboratoire, et elles ont été reconnues comme telles, comme l’attestent pour l’une un mandat de présidente de la section Anthropologie-Ethnologie-Préhistoire du comité national de la recherche scientifique [28], et pour l’autre la direction adjointe du Centre d’ethnologie française [29] (CEF).
Bien entendu, les marqueurs de scientificité n’ont pas été exclusivement institutionnels. Ils procèdent aussi des choix heuristiques auxquels les deux femmes ont procédé et dont elles n’ont pas dévié.
L’organologie a été, à tous égards, le premier de ces choix. Il répondait sans doute – et initialement peut-être surtout – à deux considérations tactiques : prendre le contre-pied des folkloristes, qui s’étaient presque exclusivement préoccupés de chansons, et articuler la recherche, via l’enquête de terrain, avec l’acquisition d’objets susceptibles de devenir des œuvres exposables dans un cadre muséal. A joué aussi l’ascendant exercé par les précurseurs germaniques de l’ethnomusicologie dont l’enseignement a été recueilli en quelque sorte à la source puisque Marcel-Dubois a côtoyé à Paris, durant ses premières années d’exil, Curt Sachs [30] (1881-1959), coauteur avec Erich von Hornbostel (1877-1935), d’une classification universelle des instruments de musique qui fait toujours autorité : sa leçon à peine apprise lui fait écrire en 1937 qu’il convient d’« inclure le matériel instrumental parmi les faits folkloriques à cartographier [31] ». Mais l’influence du maître et le calcul tactique se sont estompés pour faire droit à une réflexion qui lui est propre, bien entendu partagée avec Pichonnet-Andral, étayée non moins qu’allant s’approfondissant, sur les rapports entre le geste et l’objet dans la production de phénomènes sonores brouillant la frontière entre le bruit et le son, d’origine tant animale qu’humaine, ce qui facilitait leur appréhension désesthétisée. Structurant leurs observations dans ces années où la musique d’avant-garde se veut « concrète » et recycle la rumeur de la rue comme celle de l’usine, Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral s’attachent à démontrer qu’à la campagne, la profération musicale répond d’abord et immanquablement à des besoins fonctionnels et cérémoniels (fig. 6).
Les deux chercheuses, par ailleurs, participent de ce vertige techniciste qui amène bien des chercheurs en sciences humaines et sociales à se convaincre que la science a besoin de machines pour progresser : en faisant des appareils d’enregistrement l’indispensable auxiliaire du recueil des données, en obtenant que ce parc soit régulièrement renouvelé pour profiter des derniers perfectionnements, elles ont même pris quelques longueurs d’avance sur les tenants de l’histoire quantitative comme sur les sociologues, longtemps cantonnées aux fiches mécanographiques. Il n’est pas inconcevable que cette anticipation soit une imitation délibérée des compositeurs post-sériels férus d’acoustique, qui avaient ouvert la voie du recours massif et systématique à un appareillage permettant de transcrire le signal sonore pour mieux l’analyser, avec des schémas et plus seulement avec des notes inscrites sur une portée. La voie ainsi choisie permettait aussi de dompter l’oralité en la soumettant à une autre raison graphique, à base d’« oscillogrammes et spectrogrammes » et autres « transcriptions intégrales » des phonogrammes (Marcel-Dubois 1961 : 17) permettant leur « analyse électro-acoustique [32] ». Mais on peut aussi estimer, à la suite de Daniel Fabre, que « le MATP est devenu, sous l’autorité de Marcel-Dubois, le haut-lieu d’[un] ésotérisme qui ne débouche, le plus souvent, que sur lui-même », et voir dans l’ethnomusicologie qu’elle pratiquait l’« exemple parfait d’une rupture radicale avec la connaissance et la manipulation profanes » (Fabre 1997 : 388).
Sensibles comme tous les anthropologues de leur génération aux avancées lévi-straussiennes, d’autant plus que Marcel-Dubois était, on le verra, l’obligée du titulaire de la chaire d’anthropologie sociale du Collège de France, elle et Pichonnet-Andral n’ont pas manqué de s’atteler au dévoilement des « structures élémentaires de la musique traditionnelle » (Pichonnet-Andral 1962) et autres « systématiques des musiques ethniques [33] », ou encore à l’« étude structurale du matériel ethnomusicologique [34] ». Mais au vrai, leur structuralisme s’est borné à la traque obsessionnelle des archaïsmes, terme dont elles n’ont jamais défini la consistance mais qu’elles ont appliqué, tel un mantra, à ces « témoins d’une musique sans âge et sans nom » (Pichonnet-Andral 1961 : 308) auprès desquels elles ont enquêté. En parlant de « préhistoire musicale [35] » (Pichonnet-Andral 1961 : 299) ou de « mélodies de structure archaïque [36] » (Pichonnet-Andral 1961 : 299), elles manifestent plus nettement encore leur attachement à une approche évolutionniste de la musique, qu’elles partagent du reste avec Pierre Boulez et ses disciples.
S’affichant donc structuraliste, leur recherche tend en tout cas à une plus nette structuration à partir de la seconde moitié des années 1960, dans le contexte de la création du CEF et sous l’impulsion de leur nouveau « patron [37] », Jean Cuisenier. Marcel-Dubois affiche ainsi, en 1970 [38], pour « l’équipe ethnomusicologique » du laboratoire, une ambitieuse programmation en cinq volets : établir le « corpus des musiques ethniques du domaine français », mener « l’étude formelle de la musique de tradition orale [39] », faire l’« histoire évolutive des instruments de musique d’usage populaire » (ultérieurement renommée « histoire évolutive des phénomènes instrumentaux »), rédiger des « monographies socio-musicales », et enfin travailler sur « les cadres classificatoires des musiques ethniques ».
La revue des publications que les deux femmes ont fait paraître dans les années 1970 et 1980, sous leur double signature ou individuellement, manifeste que ce programme n’a que très partiellement été mis en œuvre : en dehors de l’étude sur la musique en Aubrac (Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral 1975), qui présente les résultats de l’enquête menée durant la Recherche collective sur programme (RCP), soit antérieurement à la création du CEF, la fréquence et le volume de leurs articles tendent d’ailleurs à se réduire. Comme si le terrain campagnard, surexploité, avait fini par devenir infertile.
Si l’on excepte une communication sur les cris de Paris reprise dans les actes du 2e congrès folklorique d’Île-de-France (Marcel-Dubois, 1939 : 47-50), double hommage à Clément Janequin et à Marcel Proust, qui date des premières années de la carrière de Marcel-Dubois, et une étude sur les clowns et leurs instruments de musique (Marcel-Dubois 1960d) – qui, cependant, ne s’éloigne guère des rivages familiers de l’organologie –, la recherche des deux ethnomusicologues est en effet restée soumise à l’attraction de la ruralité. Comme elles le reconnaissent elles-mêmes, il leur importait de saisir les « comportements [40] » des villageois et des animaux qu’ils élèvent dans leur spectre sonore, au village, dans la vie individuelle et collective, quitte à infléchir ce projet en lui intégrant, à la faveur de la RCP Châtillonnais (1967-1968), l’étude des fanfares et des harmonies, support de ce qu’elles appelaient la « musique civique [41] ». Dix ans plus tard, négociant à leur manière le tournant sociologique imposé par Jean Cuisenier, elles participent à l’Action thématique programmée sur l’observation du changement social et culturel que Jacques Lautman et Henri Mendras coordonnent dans un terroir soumis à la pression du tourisme balnéaire, la Brière et les villages paludiers de la presqu’île guérandaise. Mais cet ultime essai d’aggiornamento dans des territoires en voie de rurbanisation n’a pas eu d’impact sur leur bibliographie.
Relevons enfin que Marcel-Dubois a envisagé à deux reprises de s’engager dans la préparation d’un doctorat d’université [42] mais a renoncé, faute, peut-on supposer, de parvenir à dégager le temps nécessaire, du fait de la charge de travail imposée par son double poste au musée-laboratoire.
Conserver, exposer
Quand, de 1938 à 1942, Marcel-Dubois est une employée précaire du CNRS, elle apporte aussi au MNATP, par intermittence, on l’a vu, une triple compétence, acquise empiriquement, de documentaliste, d’archiviste et de collectrice : elle se rend alors indispensable en procédant à la mise en ordre des collections bibliographiques et discographiques de l’Office de documentation folklorique, en ramenant de la mission en Basse-Bretagne quelque deux cents enregistrements sonores, plus de quatre cents photographies et des rushes. Sans doute est-ce son assimilation des codes juridiques, méthodologiques et sacramentels – l’inscription à l’inventaire ! – en usage à l’administration des beaux-arts, dont dépend le tout jeune MNATP, qui lui vaut d’être nommée dès 1941 [43] « Chargé de mission des musées nationaux ». Il s’agit d’un titre honorifique, non rétribué, mais qu’elle veille à conserver jusqu’au terme de sa carrière et qui a aussi été attribué à Pichonnet-Andral à partir de 1951, car il leur permet de venir rapporter au comité des conservateurs de l’établissement sur leurs propositions d’acquisition, qui concernent surtout des ensembles, parfois importants, d’instruments de musique mais aussi d’outillages de facteurs d’instruments. En outre il a contribué à légitimer que leur soit confiée la responsabilité de gérer un service du musée, sa phonothèque. Enfin, lors de l’installation au « nouveau siège », le bâtiment implanté au bois de Boulogne où le MNATP s’est finalement installé au tournant des années 1960-1970, il a sans doute aidé à faire « passer » l’attribution d’un demi-étage de la tour érigée par Jean Dubuisson à ce service et à leur « département » d’ethnomusicologie [44], qui était, lui, une composante du CEF. Il fallait cette superficie pour loger les appareils, les disques, les bandes magnétiques et toute la documentation associée, accumulés depuis trois décennies, sans oublier la salle de consultation et le studio d’enregistrement [45]. Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral en firent leur sanctuaire, certains ont parlé de camp retranché. À quoi il convient d’ajouter la place occupée dans les réserves par les collections instrumentales du musée qui leur devaient leur enrichissement et dont elles étaient scientifiquement responsables, même s’il leur fallait composer avec le service chargé de la conservation matérielle et des restaurations.
Toutefois, leur activité patrimoniale ne se résume pas à une emprise immobilière, pas plus qu’au travail, aussi chronophage qu’obscur, requis par la tenue à jour des écritures catalographiques dont, au vrai, une part de plus en plus substantielle a été déléguée à des collaborateurs occasionnels. Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral sont aussi intervenues dans l’espace public du musée, là où s’opère la monstration des œuvres : d’abord mises à contribution par Rivière, pour telle ou telle section des expositions temporaires qu’il montait au palais de Chaillot, elles ont coconçu avec « le magicien des vitrines » (Gorgus 2003) les parties attribuées au « phénomène Musique » dans les galeries (d’étude et culturelle) dont la programmation puis l’aménagement, au premier sous-sol et au rez-de-chaussée du ’nouveau siège’, les ont mobilisées durant une bonne décennie, jusqu’à leurs inaugurations successives en 1972 et 1975 (fig. 7).
Enfin, venant couronner la carrière de Marcel-Dubois et manifestant de la façon la plus éclatante qu’elles avaient fait leur le professionnalisme des conservateurs, le commissariat scientifique de l’exposition L’instrument de musique populaire, usages et symboles [46] a été confié à Marcel-Dubois : elle a pu ainsi mettre en scène l’apothéose – et le terme ou le point d’orgue ! – de sa carrière.
Enseigner
Le ressort le plus tardivement actionné du mécanisme d’institution de l’ethnomusicologie de la France selon Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral est, selon l’expression consacrée, le dernier mais pas le moindre. Car délivrer un enseignement spécifique à cette sous-discipline nouvelle a été aussi pour la première, puis, plus discrètement, pour la seconde, une autre forme de consécration, non dépourvue, on le verra, de paradoxe. On peut penser que, si l’occasion s’était présentée plus tôt, elles ne l’auraient pas laissé passer. Pour preuve, sous l’Occupation, Marcel-Dubois avait accueilli en stage avec empressement le plasticien René-Yves Creston (1898-1964) – de beaucoup son aîné –, puis le compositeur et chef d’orchestre Jef Le Penven (1919-1967) qu’elle a initié aux techniques de l’enquête ethnographique que la mission de folklore musical en Basse-Bretagne lui avait permis de s’approprier. Près de vingt ans après, en 1960, il leur est demandé d’assurer à l’institut d’ethnologie de l’université de Paris, en partage avec Gilbert Rouget, l’adjoint d’André Schaeffner au musée de l’Homme (MH), un cours optionnel d’ethnomusicologie pour l’obtention d’un certificat de licence. L’essai est spectaculairement transformé l’année suivante par l’intercession de Claude Lévi-Strauss qui confie à la seule Marcel-Dubois une conférence associée à son séminaire de l’EPHE [47].
Cette conférence, où Marcel-Dubois proposait d’« envisage[r] l’ethnomusicologie comme une science moderne dont le but principal serait de déterminer la place des musiques de l’oralité dans les sociétés traditionnelles ou dans les pratiques coutumières des sociétés industrialisées » (Marcel-Dubois, Mauguin, Rouget, Helffer et Tran 1973 : 23), prend vite la forme d’un séminaire hebdomadaire [48] où, au fil de deux décennies, les ethnomusicologues français et leurs collègues étrangers de passage à Paris viennent présenter leurs travaux et recherches en cours, lesquels, dans leur immense majorité, ne concernent pas le domaine français. Hormis pour l’introduction, en début d’année universitaire, de la thématique générale, régulièrement renouvelée [49], et, à chaque séance, pour la présentation des intervenants, les prises de paroles de Marcel-Dubois se caractérisent par leur rareté [50]. Le magistère d’influence que le séminaire a exercé sur la génération montante de l’ethnomusicologie française (Cheyronnaud 1990 : 178) s’explique donc surtout par l’absence de concurrence de la part des autres établissements parisiens – et même français – d’enseignement supérieur : c’était la seule enceinte dédiée, où se sont nécessairement assemblés des chercheurs encore peu nombreux. Au plus fort de son audience, entre le milieu des années 1960 et celui des années 1970, quarante à soixante auditeurs s’y pressaient.
Suspendu une année par le départ à la retraite de Marcel-Dubois, le séminaire est repris durant l’année universitaire 1982-1983 par Pichonnet-Andral, décidément continuatrice universelle, pour quelques séances traitant d’« Ethnomusicologie et [de] sociétés complexes », avant que le relais ne soit passé à Jacques Cheyronnaud [51]. Mais déjà le complexe MNATP-CEF n’est plus en situation de monopole car l’université de Nanterre développe un enseignement d’ethnomusicologie, en partie pris en charge par les chercheurs du musée de l’Homme, qui comporte bientôt, lui aussi, un séminaire.
Mères fondatrices ou matriarches ?
L’autorité conquise par Marcel-Dubois, avec l’apport essentiel de Pichonnet-Andral, investie de la mission de la maintenir le moment venu, ne s’exerçait pas seulement en France, même élargie à l’aire francophone [52]. Certes, l’investissement international s’inscrivait dans le mouvement de relance de la coopération intellectuelle où Paris, – ville choisie par les Alliés dès 1945 comme siège de l’Unesco – se devait d’afficher son dynamisme, et il secondait aussi les initiatives de Rivière, très tôt actif à l’International Council of Museums (ICOM). On ne saurait donc s’étonner de la présence à Londres, en 1947, de l’ethnomusicologue française parmi les membres fondateurs de l’International folk music council [53] où elle contrebalançait le leadership anglo-américain incarné, à ses débuts, par le tandem formé du compositeur Ralph Vaughan-Williams et de la folkloriste Maud Karpeles. L’habileté diplomatique dont Marcel-Dubois fit preuve lui valut d’accéder en 1967 à la vice-présidence de cette organisation non-gouvernementale [54]. Toutefois elle s’est davantage impliquée, en harmonie avec ses centres d’intérêt, dans la création, en 1960, du comité spécialisé de l’ICOM dédié aux musées et aux collections d’instruments [55], dont elle fut la première secrétaire générale.
S’il convient de ne pas accorder une importance excessive à des fonctions extra-hexagonales qui viennent surtout allonger la titulature de Marcel-Dubois, on retiendra qu’elles lui ont été procurées par la mobilisation de son réseau muséal, ce qui fait ressortir par contraste les limites de la reconnaissance qu’elle a trouvée auprès de la communauté scientifique, sans rien dire de celle accordée encore plus chichement à Pichonnet-Andral. Faut-il voir dans ce déficit l’effet insidieux de la misogynie ? Il n’est pas, en tout cas, interdit de considérer que ceux qui l’avaient creusé se sont ainsi dédommagés d’un pouvoir inévitablement excessif puisque procédant d’une autorité féminine, autrement dit, à leurs yeux, d’un oxymore.
Pourtant ni l’une ni l’autre des deux femmes n’a pris des positions féministes, et surtout pas dans leurs publications scientifiques, leurs recherches ne faisant qu’effleurer la question du genre [56], laquelle n’entravait guère leur vie, tant sociale que professionnelle ou n’y provoquait pas du moins d’interférence sensible : résidant dans les beaux quartiers de l’ouest parisien [57], pénétrées d’un sentiment de supériorité de classe [58] dont témoigne le ton sur lequel elles s’adressaient à ces « analphabètes musicaux, parfois analphabètes complets » (Marcel-Dubois 1960a : 116), qui formaient l’ordinaire de leurs informateurs [59], elles côtoyaient au MNATP plusieurs femmes à la compétence reconnue, telles Ariane de Félice, Michèle Richet, Mariel Jean-Brunhes Delamare ou encore Marie-Louise Tenèze, plus tard Francine Lancelot et Martine Segalen (Segalen 2005 : 337-339). Mais elles avaient des responsabilités managériales plus substantielles que la plupart de ces collègues, sans rien dire de leurs droits de tirage budgétaires (Fabre 1997 : 388) ; elles contrôlaient aussi l’accès à d’importantes ressources documentaires et enfin, durant les RCP Aubrac et Châtillonnais, c’est à elles que les enquêteurs devaient s’adresser pour s’équiper de magnétophones et de bandes magnétiques. Elles exerçaient donc un pouvoir concret, tangible et source de frustration voire de vexations. Aussi l’énergie motrice qu’elles puisaient dans leur association concourait-elle à les isoler, d’autant plus qu’elles ne prodiguaient guère leur convivialité. Enfin, et cela constituait une circonstance aggravante, leur rapport aux maîtres, forcément des hommes, dont elles auraient pu sinon dû se réclamer, ne se signalait pas par un excès de déférence.
Sans doute ont-elles reconnu leur dette à l’égard de Sachs et surtout de Constantin Brăiloiù, qu’elles ont l’une et l’autre pratiqué durant les années d’après-guerre où il se partageait entre Genève et Paris. Mais s’agissant de Patrice Coirault, qu’elles ont connu déjà retraité du ministère des Travaux publics, vivant en marge des cercles académiques et notoirement dépourvu d’influence, leur attitude frise la désinvolture, sans doute calculée tant il importait de se démarquer de l’auteur de Notre chanson folklorique : en guise d’éloge funèbre, Marcel-Dubois s’en tient à quatorze lignes où il est présenté comme un disciple attardé de la Rezeptiontheorie, qui n’aurait vu dans la chanson folklorique française que le « résidu des chansonniers urbains » (Marcel-Dubois 1960c : 89), un auteur d’« ouvrages édifiés sur des sources livresques ou sur des récoltes anciennes », par opposition à leurs propres « études faites à partir d’observations récentes de terrain ménageant l’étude du contexte socio-ethnologique de la musique » (Marcel-Dubois 1960a : 115).
La relation avec André Schaeffner semble avoir été moins expéditive et sûrement plus embarrassante car il avait accueilli la très jeune (21 ans !) Marcel-Dubois au MET et lui avait donné les bases de sa formation. Mais les logiques institutionnelles avaient favorisé l’émulation, vite muée en rivalité, entre le MH et le MNATP qui, au surplus, ne relevaient pas de la même administration [60]. Et l’autre « grand partage [61] », celui auquel avaient procédé leurs départements d’ethnomusicologie respectifs, longtemps logés à quelques dizaines de mètres l’un de l’autre dans les ailes est et ouest du palais de Chaillot, avait creusé un fossé qu’on n’enjambait pas usuellement. Mais précisément, c’est peut-être ici qu’est venue se nicher la dimension genrée d’un antagonisme opposant à gros traits de mâles aventuriers s’exposant aux risques physiques des lointains à des casaniers des deux sexes dont toute l’audace aurait consisté à franchir le seuil des burons et sur l’orientation sexuelle desquels couraient les sous-entendus d’usage dans une société hétéronormée. Cette représentation dévalorisante ne s’étale certes pas dans les archives publiques mais, ajoutée aux rugosités indéniables de caractère de Marcel-Dubois, elle a pu faire écran à l’évaluation raisonnée de son apport scientifique et plus encore de celui de Pichonnet-Andral.
Une fin de carrière sous les assauts de la contestation revivaliste
Dans ce contexte, on ne s’étonne pas que la solidarité des pairs ait fait défaut aux deux femmes quand elles ont eu à subir, à partir de la fin des années 1970, les critiques, formulées en termes peu académiques, par des jeunes gens en colère, des garçons pour la plupart bien entendu, qui incarnaient le revival des musiques et danses traditionnelles.
Préparée par les réseaux d’éducation populaire, notamment ceux implantés en milieu rural, stimulée par l’esprit de mai 68, la vague de la folk music qui déferle comme un mascaret sur la France des villes et des facs entend remonter à la source de la musique populaire, vite localisée, sous sa forme la plus concentrée, au MNATP. Réagissant en gardiennes du temple effarouchées tant par ce qu’elles perçoivent comme un néo-folklorisme que par l’impréparation méthodologique de ces « folkeux » mal accoutrés, incapables de mesurer l’abîme qui sépare le « reportage » de « l’enquête ethnomusicologique » (Marcel-Dubois 1961 : 13), mais qui exigent un libre accès à leurs enregistrements, Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral les éconduisent. Sans doute rendent-elles involontairement service à leurs solliciteurs, qui n’ont plus d’autre issue que de se rendre sur le terrain pour y mener leurs propres enquêtes et collectages. Mais, bien entendu, cette attitude leur forge, au plus mauvais moment, la moins flatteuse des réputations.
En effet, l’alternance de 1981 provoque la nomination comme directeur de la musique au ministère de la culture du journaliste Maurice Fleuret, qui va se révéler un grand administrateur et promouvoir une politique en faveur des musiques traditionnelles. Celui qui est aussi un collectionneur expert d’instruments de musique de tous les continents (Surrans 2010 : 110), perçoit la ferveur des « collecteur », désormais fédérés en collectif. Conseillé par l’ethnomusicologue Bernard Lortat-Jacob, qui avait d’ailleurs été formé par Marcel-Dubois (fig. 8) avant de rallier le laboratoire d’ethnomusicologie du MH, il se rend en juin 1982 aux assises qui les réunissent en région parisienne, et se convainc de « la valeur culturelle (et, dans une mesure non négligeable, scientifique) du travail des jeunes chercheurs-collecteurs-acteurs sociaux [62] ».
Quoique le MNATP et a fortiori le CEF ne relèvent pas du périmètre d’intervention de sa direction, il fait pression sur Pichonnet-Andral, désormais installée à la tête du département d’ethnomusicologie, pour qu’elle améliore l’accès aux archives sonores, ce à quoi elle objecte qu’il s’agit d’un « travail gigantesque (…) hors de [se]s possibilités matérielles [63] ». Lortat-Jacob monte alors au créneau pour faire la leçon à son aînée : « pratiquer une politique de fermeture n’entre ni dans mes dispositions naturelles ni dans les perspectives culturelles qui devraient orienter notre action [64] ». Impavide, elle réplique qu’elle est « a priori disposé à accueillir les collecteurs, ce qui, soit dit entre nous, m’apparaît être une attitude généreuse face à la leur, souvent peu empreinte d’urbanité à notre égard, c’est le moins que je puisse dire [65] ».
Dans cette escarmouche administrative, c’est elle, plus aguerrie au maniement de la force d’inertie, arme fatale de la bureaucratie, qui l’emporte en ne cédant rien. D’autant qu’elle donne parallèlement des gages à la « festivocratie [66] » instituée par Jack Lang, en proposant de créer une antenne du musée dédiée à la thématique des « musiques et spectacles des rues [67] ». Toutefois, l’arrêt au même moment de la pratique d’enquête et le tarissement d’une production d’articles déjà parcimonieuse trahissent un essoufflement qui reflète une démotivation globale. Aux dires de Jacques Cheyronnaud, Pichonnet-Andral en était consciente : « Nous avons dû nous imposer face à la musicologie qui nous regardait de haut, et nous faire accepter par l’ethnologie que nos travaux n’intéressaient guère. Résultat : nous nous sommes coupées de l’une et de l’autre » (Cheyronnaud 2005 : 532). De fait, aucun chercheur ni aucune structure scientifique ne revendiquent l’héritage. Doit-on alors lui imputer ainsi qu’à Marcel-Dubois l’échouage de l’ethnomusicologie de la France sur les rivages de l’ethnographie associative ? Ou, au contraire, invoquer la responsabilité de pairs peu désireux de leur payer tribut ? Mieux vaut se garder des deux termes – également stériles – de cette alternative.
Marcel-Dubois et Pichonnet-Andral formaient un couple à la ville comme à la scène, ce qu’elles ne dissimulaient pas, sans en faire ostentation, les milieux musiciens et muséaux où elles frayaient ne s’émouvant guère d’une situation perçue comme banale, même si elle s’autorisait un écart avec la norme sociale. Les précédents n’avaient en effet pas manqué, du côté des folkloristes (Gauthier-Villars, Violet Alford) comme des gymnastes intéressées par la danse folklorique telle Maud Pledge, que Marcel-Dubois avait croisée à l’époque des Archives internationales de la danse (Gasnault 2016 : 404). Mais comme pour ces autres amazones, l’espoir d’une descendance biologique leur était interdit. Ce qui ne pouvait que leur faire désirer plus ardemment de léguer un héritage institutionnel et scientifique. Si elles n’y sont pas parvenues, ce n’est pas du fait de représailles qu’auraient exercées leurs partenaires-adversaires, même s’ils ont pu éprouver la tentation d’intenter à la plus puissante des deux femmes un procès en sorcellerie, bien dans l’air du temps de ces années 1970 où la figure de la sorcière faisait un retour en force [68]. Mieux vaut prêter attention à l’articulation entre leur méthode ethnographique et ce qu’elles appelaient l’élaboration de leurs matériaux d’enquête, car elle fait ressortir les lacunes que comportaient leurs présupposés heuristiques.
C’est, pour l’analyser et le schématiser, au phénomène sonore qu’elles ont accordé toute leur attention, aux conditions de son surgissement, aux truchements instrumentaux qu’il mobilisait, aux catégorisations musicales ou « paramusicales » qu’il empruntait, aux oreilles de ceux qui le percevaient. Sans doute interrogeaient-elles celles et ceux qui l’émettaient, mais surtout pour s’instruire des circonstances de leur apprentissage ou de l’étendue de leur répertoire. En revanche, sur leur ressenti, sur la reconnaissance que la maîtrise de l’instrument ou de la voix leur procurait – ou pas – dans leur groupe d’interrelations, tels qu’ils les percevaient et en tiraient – ou non – parti, leur curiosité ne se manifestait guère [69]. Au temps de la RCP Châtillonnais, elles ont cherché à questionner le rôle de la musique ’civique’ mais ni sa place dans la sociabilité villageoise ni son appréhension différenciée par classe d’âge ou par sexe. Enfin, fidèles à leur tropisme organologique qui les amenait à privilégier les informateurs instrumentistes, très majoritairement masculins, et, sans doute moins consciemment, à leur volonté de gagner le respect des hommes pour, devaient-elles penser, garantir le succès de leurs enquêtes, elles ont moins recherché la compagnie des chanteuses, elles n’ont pas, sauf exception [70], établi de connivence avec celles qu’elles assignaient principalement à leurs fonctions ménagères, peut-être parce que cela aurait réclamé un effort hors de portée ou paru peu crédible, pour elles qui n’étaient ni mères de famille ni femmes au foyer.
Pour leur plus grand désavantage, elles n’étaient décidément pas « des sorcières comme les autres [71] ».
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Vignette de couverture : Claudie Marcel-Dubois et Maguy Pichonnet-Andral (7 avril 1963 - 16 avril 1963), sur la place des Neuf Jets à Céret, préparant les micros pour l’enregistrement de la quête des oeufs et victuailles, le soir du Samedi Saint.
Photographe : Pierre Soulier, Mucem, Ph.1963.168.283