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Encyclopédie internationale
des histoires de l’anthropologie

Patrimoine ethnologique et « revival » musical : le pas de deux contrarié de l’administration et des associations

François Gasnault

Conservateur général du patrimoine
Ministère de la Culture, UAR 3103 InVisu

2023
Pour citer cet article

Gasnault, François, 2023. « Patrimoine ethnologique et “ revival ” musical : le pas de deux contrarié de l’administration et des associations », in Bérose - Encyclopédie internationale des histoires de l'anthropologie, Paris.

URL Bérose : article3137.html

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Publié dans le cadre du thème de recherche « Histoire de l’anthropologie française et de l’ethnologie de la France (1900-1980) », dirigé par Christine Laurière (CNRS, Héritages).
Publié dans le cadre du thème de recherche « Histoire de l’ethnomusicologie », dirigé par François Gasnault (INHA, InVisu) et Marie-Barbara Le Gonidec (Ministère de la Culture, Héritages).

Résumé : L’essor de la Mission du Patrimoine Ethnologique (MPE), au fil de la décennie 1980, coïncide avec le moment où les associations de musiques traditionnelles, apparues dans le sillage de la vague « folk », sont reconnues comme des partenaires pertinents de la politique d’ouverture esthétique que promeut de son côté la direction de la Musique du ministère français de la culture. En pratique, ce dernier élabore un dispositif de formation théorique et méthodologique pour les cadres associatifs et les musiciens désireux de se professionnaliser et tout autant soucieux d’articuler la création avec la recherche, en consolidant des savoirs braconnés dans l’autodidaxie. Mais le schéma coopératif est vite malmené par les tropismes des réseaux mobilisés, tant administratifs et scientifiques qu’artistiques, au profit de dynamiques centrifuges. La figure idéal-typique du musicien-chercheur qu’il s’agissait de promouvoir succombe, à quelques individualités près, sous les assauts déconstructivistes qui balayent les dernières illusions romantiques, lors du stage « Musiques traditionnelles et pratiques scientifiques » que la Mission organise à Saint-Malo en janvier 1987 avec le concours de Jacques Cheyronnaud et de l’association bretonne Dastum. Car la perspective d’un désenchantement radical n’est pas conciliable avec le projet, tant politique que social, dont la mouvance associative s’est investie : aussi le développera-t-elle désormais en marge du champ académique et en privilégiant la capitalisation archivistique des « collectages ». Et symétriquement la MPE cesse de miser sur un amateurisme trop peu enclin à faire son deuil des mythologies fondatrices.

À la recherche du crédit

Pourquoi s’intéresser aux groupes militants, venant de l’éducation populaire et souvent acquis à la cause régionaliste, qui se sont mobilisés pour la conservation, la promotion et la diffusion des musiques et danses populaires et/ou traditionnelles du domaine français ? [1] Entre autres raisons parce que ces collectifs, qui ont tous fini par revêtir la forme juridique de l’association loi de 1901, ont été rapidement repérés et sans doute légèrement redoutés, à l’origine du moins, pour leur capacité de nuisance politique, par les promoteurs de l’institution du patrimoine ethnologique (Gasnault 2018). Et parce qu’ils ont accompli, eux aussi, durant les décennies 70 et 80, ce même passage de la marge à une légitimité minimale qu’ont opéré les inventeurs et praticiens de l’ethnologie de la France, au gré d’un processus d’institutionnalisation mené avec le soutien, tantôt résolu tantôt hésitant, de l’administration culturelle ou plutôt d’administrations culturelles, la direction de la Musique et de la danse (DMD) et celle du Patrimoine (DP), conjuguant, par intermittence, leurs efforts [2]. Du fait de l’implication volontariste de celles et ceux qui avaient fondé et qui animaient ces associations, le dispositif institutionnel et organisationnel qui a émergé a bien été une co-construction, une interconnexion de réseaux.

C’est pourquoi le propos doit s’inscrire – sans s’y laisser enfermer – dans le registre de l’histoire administrative, puisqu’aussi bien il va dérouler le récit de l’adossement improbable d’organisations militantes à l’ordre immuable de l’appareil d’État. Mais comme il s’agit tout autant de reconstituer une forme d’errance initiatique qui a ménagé à des associatifs mal élevés, initialement dépourvus de culture scientifique comme administrative, et, dans leur immense majorité, d’attaches parisiennes, la découverte du processus de fabrication d’une politique publique, forcément depuis Paris, avec ses interlocuteurs fonctionnellement typés et ses procédures codifiées, on empruntera aussi au genre du roman d’apprentissage.

La leçon qu’il fallait ici assimiler concernait l’art et la manière de faire passer un projet socioculturel au crible de la bureaucratie sans qu’il succombe à cette épreuve, au prix d’arrangements, parfois de renoncements, mais aussi en jouant sur les cloisonnements avec lesquels il arrive que l’administration se piège elle-même, au moins fugacement, les deux puis trois directions ministérielles concernées tenant chacune guichet ouvert dans une conjoncture budgétaire plutôt clémente qui n’incitait guère à coordonner l’action publique, au risque de malmener sa cohérence et sa lisibilité. De tâtonnements en ajustements, entre ce que leurs solliciteurs réclamaient mais surtout ce qu’ils comprenaient des règles du jeu et ce qu’elles étaient prêtes – ou non – à lâcher, s’est dessinée une trajectoire, plus ondoyante que rectiligne, qui, sous la surface de l’anecdote, charrie des histoires de clientèles, de réseaux, de professionnalismes, d’incorporations inabouties et de légitimités finalement déniées. Or, dans ce jeu, qu’il serait prématuré de qualifier de petit ou de grand, et pour ces joueurs qui étaient, pour paraphraser Pirandello, non pas exactement des « personnages en quête d’auteur » mais bien des entités en quête de crédit(s), on relève le caractère longtemps erratique des positionnements à l’égard du concept et de la pratique de la recherche, qu’il leur a fallu d’abord dégager de ce qui ressortit de la formation, avant de l’articuler avec la démarche documentaire et patrimoniale. Il n’a pas fallu moins que le double septennat de François Mitterrand pour que s’opère une clarification, diversement rationalisée comme une éviction du champ académique ou comme l’abandon de positions d’abord bruyamment revendiquées. Pour déterminer si ces interprétations ex post sont radicalement divergentes ou partiellement combinables, on refera le parcours au sein duquel trois séquences peuvent être distinguées : l’apprentissage du travailler ensemble, au cours du premier ministère Lang (1981-1986), l’amorce d’une cristallisation dans le contexte paradoxalement porteur de la cohabitation (1986-1988), enfin un lent décrochage de la double attraction, scientifique et artistique, la mouvance « trad’ » s’ancrant de façon chaque jour de façon plus exclusive dans l’orbite de la DMD (1989-2005).

En avant-deux

Le projet de promotion du patrimoine ethnologique, dans sa dimension d’appui à la recherche scientifique, semble avoir reposé, sans s’y résumer, sur une ambiguïté congénitale, fidèle en cela à la tradition administrative de faire coexister les contraires, en postulant qu’ils parviendront au moins à se côtoyer paisiblement et, au mieux, à développer de réelles affinités. Ici, l’administration marieuse ambitionnait à la fois, en promouvant l’« ethnologie du proche » (Simon et Le Gall 2016), de procurer de nouveaux terrains à des chercheurs chevronnés que le contexte post-colonial avait parfois coupés de leurs bases exotiques, de mettre en selle la relève issue des nouvelles formations universitaires, mais aussi de prendre en compte les pratiques amateurs et le volontarisme associatif, quitte à les réguler, à les canaliser, à les discipliner à tous les sens du terme. Cette largeur de vues s’arrêtait cependant assez vite une fois énoncée la pétition de principe : pour la distribution de son budget d’intervention, le Conseil du patrimoine ethnologique (CPE) avait en effet institué une distinction significative, sinon intentionnellement mortifiante, entre crédits de recherche et crédits d’action culturelle [3]. Mais surtout, il avait exclu de son premier appel d’offres les travaux portant sur la musique, ce qui avait d’ailleurs placé Jean-Philippe Lecat, le très giscardien ministre de la Culture, dans une situation embarrassante, compte tenu du contexte fratricide au sein de la majorité présidentielle d’alors, puisqu’il avait dû promettre à Jacques Chirac de « saisir à nouveau en 1981 le Conseil [4] » pour qu’il prenne en considération le projet de collectage en Limousin déposé par l’association « revivaliste » des Musiciens routiniers [5]. La promesse ne put être tenue pour cause d’alternance et le CPE campa assez longtemps sur la ligne consistant à tenir la musique en lisière, de propos tout à fait délibéré puisque Chiva reconnaissait qu’il s’agissait bien d’une « omission volontaire, motivée par une réserve marquée [6] », explicitée comme suit : « Trop peu de gens sont assez formés et le département d’ethnomusicologie du musée national des arts et traditions populaires ne pourrait faire face aux demandes de formation qui ne manqueraient pas d’affluer, pour qu’on puisse sans danger susciter la recherche en ce domaine [7] ».

Sous couvert de prévention d’un risque quasi-systémique, l’exclusion s’inscrivait dans la tactique, résolue mais qu’il aurait été inconvenant d’afficher, de contournement du musée des Arts et traditions populaires (MATP) qui inspirait pour une part la politique du patrimoine ethnologique. Toutefois la manœuvre avait échoué. Elle avait en effet buté contre un obstacle imprévu, qu’Elizabeth Fleury-Lévy, la responsable de la mission du Patrimoine ethnologique (MPE), caractérisait en ces termes, dès novembre 1981 : « Un inconvénient majeur au bon fonctionnement du conseil est apparu dès la nomination de ses membres. Le jeu des institutions a en fait favorisé le MATP, au détriment de jeunes chercheurs condamnés au silence [8] ». Outre le conservateur en chef du musée, Jean Cuisenier, membre de droit, y siégeaient, en effet, les deux ethnomusicologues qu’on peut qualifier d’historiques du centre d’Ethnologie française (CEF), Claudie Marcel-Dubois et Maguy Pichonnet-Andral, non pas ès fonctions mais ès qualités : la première représentait la Société d’ethnologie française, dont elle assurait alors la présidence, et la seconde était la déléguée de la section disciplinaire du comité national de la Recherche scientifique. Pour atténuer cette « sur-représentation » des chercheurs institutionnels qui ne mettait que trop en relief « l’absence d’usagers de l’ethnomusicologie, alors même qu’il y a tout à faire dans ce domaine », É. Fleury-Lévy prônait une « remise en cause de la composition du conseil » consistant à lui agréger neuf nouveaux membres, à choisir notamment « parmi les (…) jeunes chercheurs et responsables d’associations [9] ». Satisfaction lui fut partiellement donnée par un arrêté ministériel publié à la sortie de l’hiver 1982, qui, aux côtés d’un quatuor de « jeunes chercheurs [10] » et d’une figure de l’éducation populaire et de l’action culturelle, Jean Hurstel [11], nommait en la personne d’Éric Montbel un représentant de ce qu’on pourrait appeler l’ethnomusicologie alternative, membre de ces collectifs de musiciens-collecteurs qui renouvelaient l’interprétation des musiques traditionnelles du domaine français.

Fig. 1.
Éric Montbel, musicien et ethnomusicologue, en 1982, à l’époque de sa nomination au Conseil du patrimoine ethnologique
Photo de Jean-Claude Blanc

Repéré dans le cadre d’une présélection puisant dans le même vivier des Musiciens routiniers, É. Montbel avait été choisi, après mûre réflexion [12], non pas au privilège inversé de l’âge (quoiqu’il fût en effet le plus jeune) mais plutôt, semble-t-il, parce que ses fonctions de responsable de la revue Plein Jeu [13], bientôt rebaptisée Modal [14], lui conféraient une respectabilité – ou au moins une visibilité – intellectuelle minimale. Et c’est aussi ce qui lui a valu d’être immédiatement agrégé à un groupe de travail « Recherche-création », dont l’intitulé était en parfaite adéquation avec la démarche artistique et scientifique des Routiniers [15]. En outre et comme pour lui souhaiter la bienvenue par un témoignage inédit de considération à l’égard du travail des chercheurs non statutaires, la commission permanente du CPE s’était prononcée favorablement sur quatre des projets reçus hors appel d’offres, qui intéressaient les musiques populaires à défaut d’être pleinement musicologiques ou ethnomusicologiques [16]. Leur examen ne remettait pas en cause la distinction entre la « vraie » recherche et celle associée à une démarche d’« action culturelle » mais il se fondait explicitement sur des critères d’appréciation, dont la « qualité du travail de collectage et d’inventaire envisagé [17] », sous-entendant la conviction que les porteurs des meilleurs projets parviendraient à se hisser au niveau d’exigence requis. Au reste le caractère initiatique, ou probatoire, de l’épreuve se déduit de l’annonce, officialisée juste après la proclamation des résultats, qu’« un thème ethnomusicologique pourrait être envisagé lors d’un prochain appel d’offres [18] », et ce dans la perspective proclamée de sortir le « domaine d’étude » de sa marginalité.

La promesse, irréfléchie, prématurée ou tactique, fut prestement escamotée mais les vents favorables soufflent toujours lorsque le CPE s’assemble à nouveau en formation plénière, le 3 mai 1983 [19] : la salle retentit alors de propos bienveillants à l’égard des acteurs associatifs ! Il n’est sans doute guère surprenant d’y entendre M. Valière, qui fut co-fondateur de l’UPCP [20] et qui s’exprime davantage en partie qu’en juge, plaider pour que, « dans le domaine de l’ethnomusicologie, le rôle des praticiens ne soit pas négligé » ; on ne saurait davantage s’étonner que Daniel Fabre recommande d’être attentif à la « demande émanant d’acteurs sociaux qui entretiennent avec les universités et les instances de recherche des rapports complexes comportant attraction et rejet ». Mais c’est plus à contre-emploi que M. Andral, qui a, depuis deux ans, remplacé C. Marcel-Dubois à la tête du « département Musique » et de la Phonothèque du MATP-CEF, soutient aussi, en sus de quatre nouveaux projets « ethnomusicologie » sélectionnés par la commission permanente [21], le projet « recherche » sur l’accordéon diatonique en Bretagne soumis par Yves Defrance, co-fondateur de l’association revivaliste La Bouèze [22]. Il est vrai qu’Y. Defrance a été un auditeur assidu du séminaire de C. Marcel-Dubois à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS).

Si une seconde réforme de la composition du Conseil, qui intervient au premier semestre 1984, envoie un signal discordant puisque l’annonce d’une ouverture « aux bénévoles » afin de « démocratise[r] les représentations scientifiques [23] » se concrétise paradoxalement par la non-reconduction de M. Valière et d’É. Montbel [24], Jack Lang, qui a tenu à présider, en décembre 1984, la séance d’installation du nouveau CPE, prononce une allocution dans laquelle, subordonnant la connaissance à la création (« qui dit patrimoine ethnologique, dit transmission et donc appropriation et créativité » [25]), il plaide pour « une véritable déontologie de la diffusion de la recherche ».

Du côté de la Mission, on ne se départit pas de l’attitude bienveillante manifestée, on l’a vu, dès 1981, et qui a commencé à se traduire en actes avec deux initiatives, prises fin 1982, et l’une comme l’autre particulièrement bien ajustées aux attentes des musiciens-ethnographes : la création de bourses (ou « allocations ») d’étude et la programmation de stages [26]. Dans les deux cas, la mise en œuvre est confiée à la chargée de mission « Formation » de la MPE, Claude Rouot [27] qui va s’impliquer avec fougue dans ce rôle d’intermédiation entre la mouvance « trad’ » et l’ethnologie institutionnelle.

La question de la formation reste en effet centrale pour les promoteurs de la cause du patrimoine ethnologique, comme l’avait souligné le rapport Benzaïd en pointant l’ampleur du déficit et l’urgence du rattrapage. Mais, sur le terrain de l’ethnomusicologie, elle est minée, ou du moins complexe dès lors que deux « écoles » concurrentes s’en disputent la maîtrise.

La première, de loin la plus ancienne, s’est longtemps incarnée dans la figure de C. Marcel-Dubois, fondatrice (en 1961-1962) et animatrice d’un séminaire relevant des enseignements de l’EHESS mais toujours assuré dans les locaux du « musée-laboratoire », au palais de Chaillot puis au « nouveau siège » du bois de Boulogne. La relève qu’après 1981, M. Pichonnet-Andral et Jacques Cheyronnaud assurent, d’abord conjointement, s’accompagne de la prise de conscience qu’il faut répondre à la « demande de formation des associations », tant sur le plan conceptuel que méthodologique [28]. C’est pourquoi aux séances de travaux pratiques dispensées au musée s’ajoutent, à partir de l’année universitaire 1983-1984, les cours assurés au titre d’une unité d’enseignement ouverte à l’université de Nanterre, et où la présence d’auditeurs libres est admise.

La seconde « école » a pour foyer le séminaire du musée de l’Homme (MH) dont le département d’ethnomusicologie, où Gilbert Rouget a succédé à André Schaeffner, cohabite sans échanger dans aucun domaine avec son homologue du MATP, sous prétexte de la répartition cloisonnée qui caractérise leurs terrains respectifs d’enquête. Or elle est en passe d’accroître fortement son audience dès lors que l’un de ses plus brillants représentants, Bernard Lortat-Jacob [29], s’est vu charger, au printemps 1982, par le directeur de la Musique, le charismatique Maurice Fleuret (Veil et Duchemin, 2000), de concevoir et de déployer une politique ministérielle des musiques traditionnelles. Aussitôt admis au CPE comme représentant de sa direction, Lortat-Jacob joue plutôt, dans le domaine de la recherche, la carte de la complémentarité avec la MPE [30]. Mais il a pris une longueur d’avance dans celui de la formation, d’une part avec la création, sur crédits DMD, de bourses [31] dont les bénéficiaires sont incités à suivre le nouveau séminaire d’ethnomusicologie institué au MH, et, d’autre part, avec la fondation de la société française d’Ethnomusicologie [32] à laquelle il fait attribuer des subventions pour l’organisation de stages d’initiation assurés par ses membres. En deux sessions (1984 et 1985), une centaine de stagiaires « professeurs de conservatoire, instrumentistes et chercheurs en formation [33] » sont ainsi accueillis dans le cadre majestueux du couvent royal de St-Maximin La Sainte-Baume (Var). Cet effectif impressionnant rassemble des musiciens issus des circuits les moins académiques qui soient, qu’il faut préparer aux épreuves des examens et concours régulant l’accès au professorat dans les conservatoires et les écoles de musique, prérequis pour l’ouverture de classes d’instruments traditionnels dans ces établissements. Ce serait donc le principe de subsidiarité et non un zèle intempestif, moins encore un empiétement indélicat sur les compétences de la MPE, qui justifierait une initiative non destinée aux apprentis-chercheurs.

Il n’empêche ! Pour la chargée de mission de la MPE, la voie est étroite : aussi C. Rouot s’y engage-t-elle par étapes. La première consiste à instruire les demandes d’allocation de formation qui permettent à des provinciaux peu argentés de suivre les cours de Nanterre et, en fonction de leurs affinités intellectuelles, l’un ou l’autre des séminaires, au MATP ou au MH : entre 1983 et 1987, en bénéficient seize musiciens-ethnographes désireux d’opérer un retour réflexif sur leur expérience du collectage [34].

Dans un second temps, elle apporte un soutien inconditionnel au « projet de grande ampleur présenté par la Fédération des musiciens routiniers [35] », qui prévoyait « l’organisation de 1100 journées de formation sur les régions Centre et Auvergne [36] ». I. Chiva, tout en redoutant la confusion entre « l’aide à une pratique culturelle et l’aide à l’étude d’une pratique culturelle », convient que celle-ci « peut déboucher sur la recherche » et il encourage É. Montbel à « faire un synopsis des stages proposés [37] ».

Enfin, forte de l’assurance acquise, C. Rouot passe à la co-construction de formations qui ressemblent à s’y méprendre à des journées d’étude.

Le prototype en est fourni par un stage sur les « sources pour l’ethnologie de la France », qui se déroule à Poitiers et à Niort en janvier 1985 et dont M. Valière a conçu le programme [38], en lien avec ses anciens camarades de l’UPCP, fort désireux de faire découvrir la « Maison des Ruralies », sorte d’écomusée dont la gestion leur a été confiée (Gasnault 2018 : 73) et qui intègre une médiathèque « régionale » chargée de rassembler, de cataloguer et de rendre accessibles les archives issues de leurs collectages. Parmi les intervenants figure Donatien Laurent, alors directeur du Centre de recherche bretonne et celtique [39], venu parler du croisement des sources orales et écrites dans les recherches sur la chanson ; des présentations de la « magnétothèque régionale » bretonne Dastum, de la Phonothèque nationale et de l’AFAS [40] sont également assurées.

Fig. 2.
Michel Valière (1941-2019), cofondateur de l’UPCP Métive, ethnologue régional de Poitou-Charentes (1982-2006) et membre du Conseil du patrimoine ethnologique
Photo de Marion Valière, prise en décembre 1982 pendant une inondation d’un affluent du Clain

Les retours des participants sont à la fois si positifs et si bien relayés que l’idée s’impose sans peine de renouveler l’expérience, avec une moindre délégation de la maîtrise d’œuvre. À la séance du CPE tenue à la fin du printemps 1986, il est donc annoncé qu’un stage entièrement dédié à l’ethnomusicologie se déroulera en Bretagne au début de l’automne [41]. La localisation dérive du concours apporté par Dastum, émanation de cette mouvance associative à la fois bénéficiaire et partenaire de la démarche, qui va contribuer à l’organisation matérielle mais qui peut surtout se prévaloir d’une compétence technique incarnée par sa phonothécaire, Véronique Perennou, que C. Rouot connaît bien.

La gavotte de Saint-Malo

Il faut s’arrêter un peu longuement sur ce stage [42] intitulé « Musiques traditionnelles et pratiques scientifiques », qui constitue incidemment une des premières actions de formation placées à l’enseigne de l’Institut du Patrimoine [43], et dont le ministère soulignait fin 1988 qu’il avait « fait date [44] », sans doute parce qu’il avait à la fois répondu aux attentes de connaissances et de reconnaissance du milieu, mais l’avait aussi confronté à la fragilité des représentations qui l’avaient naguère structuré. Ce cocktail improbable de satisfaction et de désarroi a manifestement contribué à en perpétuer le souvenir – qui est celui d’une conflagration – chez plusieurs de ses participants [45]. Mais avant même son ouverture, la MPE pressentait l’importance de ces « trois journées de réflexion consacrées à l’analyse des rapports Musique et Sociétés, au traitement institutionnel, scientifique et technique des données [issues d’]un important travail de collecte et à leur diffusion [46] », ne serait-ce que parce qu’elles clôturaient une trilogie ouverte avec le stage de Poitiers et poursuivie avec celui tenu au prieuré de Salagon (Alpes de Haute-Provence) en mars 1986 sur « Littérature orale et ethnologie », des « dossiers » devant reprendre pour chacun les interventions qu’ils avaient suscités.

Repoussé de quelques mois par rapport à ce qui avait été annoncé, peut-être pour peaufiner sa préparation, le stage se déroule du 12 au 14 janvier 1987 à Saint-Malo, sur un domaine, propriété du département d’Ille-et-Vilaine, qui domine le barrage de la Rance, le parc de la Briantais. Le programme et la liste des intervenants témoignent d’une volonté de rassemblement quasi œcuménique [47], et, incidemment, de la prouesse que constitue le fait d’y être parvenu. Voix au chapitre est en effet donnée aux représentants des trois ordres structurant l’imaginaire du revivalisme, ainsi appelés à ce qui est bien, étymologiquement, un concert, polyphonique et, est-il souhaité, consonant : l’administratif (milites ?), le scientifique (sacerdotes ?) et l’associatif (laboratores ?). Au titre du premier ordre, on recense cinq intervenants ; ils sont neuf pour le deuxième et huit pour le troisième. Du moins sur le papier et au prix de quelques distorsions car, parmi ceux censés parler au nom du ministère de la Culture, administration centrale et services déconcentrés confondus, on relève un enseignant-chercheur détaché [48] et un ancien permanent associatif [49] ; la fongibilité catégorielle s’observe aussi du côté du « tiers-état », du moins à moyen terme puisque deux de ses orateurs quitteront ultérieurement ses rangs pour devenir des chercheurs statutaires [50]. Il faut encore noter que parmi ceux qu’on a rangés dans le deuxième « ordre », une majorité gravite dans la sphère des « musées-laboratoires », à Paris [51] mais aussi à Grenoble et Bruxelles [52]. Enfin, ces journées de formation et d’étude de Saint-Malo sont bien entendu appropriées comme un brevet d’anoblissement par les intervenants bretons ressortissant de la mouvance associative. Patrick Malrieu, co-fondateur et président de Dastum, qui, au tournant des années 1970-1980, s’était heurté au refus des responsables du MATP-CEF de le laisser accéder aux enregistrements effectués sur les terrains bretons, prend ici une douce revanche et ne se prive pas, dans son allocution liminaire, de manifester combien il la savoure [53]. C’est aussi pourquoi il désigne systématiquement par le terme de colloque ce qui n’était pour la MPE qu’un stage parmi tant d’autres [54]. Mais en exhaussant une action de formation au rang de rencontre scientifique, il augmente aussi, intentionnellement, la portée de cette coopération ponctuelle entre son équipe et le ministère, qu’il interprète comme la reconnaissance par l’État de l’importance du travail des associations culturelles dans le domaine du patrimoine ethnologique, avec probablement l’espoir qu’elle l’engage de façon irréversible.

L’examen de la liste des participants n’est pas moins riche d’enseignements. Frappe d’abord le nombre des inscrits, qui sont trente-neuf [55]. Seconde surprise : la répartition trinitaire qui s’est imposée pour les intervenants vaut également pour les auditeurs, même si les contingents sont proportionnellement moins homogènes : on ne dénombre pas plus de trois chercheurs ou enseignants-chercheurs [56], même s’il serait tentant de leur adjoindre trois doctorants qui ont plus tard rallié le CNRS ou l’université [57], mais encore neuf représentants de l’administration, pour la plupart en poste à la MPE ou « ethnologues régionaux » affectés en DRAC [58], l’appoint étant fourni par deux conseillers techniques et pédagogiques Jeunesse et Sports [59]. Hormis deux ou trois inscrits difficiles à cerner, tous les autres stagiaires sont musiciens et/ou militants associatifs [60] ; plus de la moitié d’entre eux résident en Bretagne et participent au mouvement culturel breton [61].

La plupart des interventions qu’entendent les stagiaires [62] et qu’ils sont invités à discuter sont des retours d’expériences ou plutôt de terrains, menés majoritairement en France par leurs pairs, lesquels sont rompus à la pratique du collectage plus qu’ils ne sont familiers de la littérature anthropologique. Toutefois une initiation à une approche comparatiste leur est fournie par les exposés incontestablement ethnomusicologiques de trois chercheurs statutaires, Monique Brandily, B. Lortat-Jacob et H. Zemp, centrés sur les aires culturelles dont ils sont les spécialistes (Tibesti, Atlas marocain, Sardaigne, Suisse alémanique) ; en outre certaines approches du domaine français sont assurées par d’autres chercheurs [63] qui démontrent par l’exemple que le matériau collecté peut trouver des emplois distincts de l’enrichissement du répertoire des musiciens et des chanteurs pour le concert ou pour le bal.

Fig. 3.
Les ethnomusicologues Monique Brandily et Bernard Lortat-Jacob avec Patrick Malrieu, co-fondateur de Dastum, au château de La Briantais lors du stage de la MPE, en janvier 1987
photo de Laurent Grall-Rousseau

Les communications de Gérard Lenclud [64] et de J. Cheyronnaud, placées en ouverture et en coda du stage, sans doute sciemment [65], empruntent de tout autres voies : évacuant le registre monographique comme l’approche pédagogique, elles se veulent déstabilisatrices, démystifiantes, déconstructivistes, et elles produisent bien l’effet de sidération recherché, même si les séquelles sont nécessairement hétérogènes : du ressort de l’illumination pour certains, quand d’autres ont plutôt été confortés dans l’idée – ou le préjugé – que les « pratiques scientifiques » auxquelles le stage était supposé les initier restaient décidément un jeu byzantin hors de leur portée.

Conclu dans une certaine précipitation pour permettre aux participants de regagner leurs pénates avant qu’une offensive du général Hiver ne rende les conditions de circulation trop difficiles [66], le stage était censé connaître, on l’a vu, un prolongement éditorial dont le niveau d’ambition a toutefois été relevé. En effet, à la publication des « actes », terme qui tendrait à prouver que le président de Dastum avait rallié ses partenaires à la requalification du « stage » en « colloque », J. Cheyronnaud, dont cette séquence met en évidence qu’il s’est imposé comme l’interlocuteur privilégié de la MPE, recommande d’ajouter un ouvrage qui ne serait ni un précis ni un manuel d’ethnomusicologie, concept disciplinaire qu’au reste il récuse, mais un « outil élémentaire de formation à l’intention du public associatif [67] » : il s’agirait d’un ouvrage collectif, co-écrit principalement avec d’autres intervenants de Saint-Malo [68], et « provisoirement » intitulé « Musiques traditionnelles » [69], Éléments d’étude.

Mission et Conseil valident apparemment le principe de la double publication, même si elle n’a pas été budgétairement anticipée et si les partenaires plausibles pour une co-édition, tant publique (DMD) que privés (Dastum et FAMT-Modal), n’avaient rien provisionné. En particulier la Mission ne ménage pas ses efforts pour obtenir au moins de la grande majorité des intervenants à St-Malo la version écrite de leurs communications [70], ce à quoi elle parvient fin 1988 [71]. Mais à cette date déjà la mécanique s’est enrayée, du moins pour la parution des actes de Saint-Malo : pour ranimer la flamme, J. Cheyronnaud et C. Rouot proposent d’organiser une table ronde qui débattrait d’un texte « rend[an]t compte des enjeux du stage et des perspectives d’action qu’il a ouvertes en faveur des musiques traditionnelles [72] ». Mais, alors qu’É. Fleury-Lévy est partie prendre de nouvelles fonctions, le directeur du Patrimoine juge préférable d’« en reste[r] là dans l’attente de la nomination d’un nouveau chef de la Mission pour la redéfinition d’une politique de la MPE à l’égard de l’ethnomusicologie en général et des ouvrages pédagogiques d’ethnomusicologie en particulier [73] », ce qui entraîne le report sine die de la table ronde.

Très discrètement, l’histoire se prolonge pour le « manuel » puisque c’est seulement en janvier 1992 qu’est transmis à la Mission le dactylogramme d’un recueil finalement intitulé « Pour l’étude des musiques traditionnelles », qui rassemble les contributions de sept auteurs, chercheurs « statutaires » pour la plupart [74]. L’expertise à laquelle il est soumis vire pourtant à l’exécution : la seule note de lecture conservée, mais sans doute aussi la seule établie, après avoir pointé l’hétérogénéité et le « disparate » de l’ensemble, les dissonances, les « redites aussi fastidieuses qu’inutiles » et jusqu’aux « propositions erronées », conclut à l’inopportunité « de sa publication en l’état » [75]. Condamnation radicale, entérinée sans excès d’état d’âme par le chef de la MPE qui, presque six ans après le « stage », notifie donc aux auteurs sa décision de ne pas publier et la justifie par les trop grandes différences dans les « niveaux d’approche » et leur incompatibilité avec les « visées méthodologiques » initiales [76], ce dont convient avec équanimité le coordonnateur [77]. Rendez-vous définitivement manqué pour la « scientification » des musiques de tradition orale du domaine français ? Si l’accès à l’allée d’honneur est bien hors de question, il ne s’agit pas pour autant d’expulser du champ moins des indésirables que des peu désirées, pas plus que leurs thuriféraires si modestement capés.

Valse-hésitation à Tatihou

Fidèle à son modus operandi (ou à son ethos ?), l’administration répugne à rompre, autant qu’elle excelle dans la graduation du désengagement, en veillant bien à s’arrêter au seuil de l’irréversible. De fait, sur le théâtre d’opérations dont il est ici question, la force qu’incarne la MPE ne s’évanouit pas du jour au lendemain. Le dialogue avec les associations de collecteurs perd en intensité mais plusieurs projets de recherche élaborés par des musiciens ou des responsables associatifs de la mouvance des musiques traditionnelles sont retenus et financés après 1987 et jusqu’en 2000 : ils aboutissent à la remise d’une quinzaine d’études ethnomusicologiques portant sur sept régions qui, hormis la Bretagne et les Pays de la Loire, sont celles du quart sud-ouest de la France métropolitaine où se situe en effet le centre de gravité du mouvement « trad’ [78] ».

Si le contact n’est donc jamais rompu, le soutien à la mouvance, qui, à aucun moment, n’a été conçu comme stratégique, apparaît de plus en plus accessoire. Et c’est au fond très tôt que sont dressées des évaluations tout sauf enthousiastes pour un investissement dont le retour sur investissement est jugé par trop décevant. Elles figurent dans deux des rapports établis à la demande d’I. Chiva, dans les mois qui suivent le stage de Saint-Malo, pour nourrir le bilan de son action à la tête du CPE, alors qu’il s’apprête à en quitter la présidence. Or leurs auteurs ne sauraient être suspectés de préventions et moins encore de partis pris défavorables.

Il s’agit d’abord de M. Valière. Militant de l’éducation populaire, longtemps investi de responsabilités associatives, il porte pourtant sur la « structuration du milieu [79] » un regard très désabusé : « Trop d’associations, assène-t-il, ne s’intéressent à l’ethnologie qu’en référence au “ patrimoine ethnologique ” qu’elles abordent avec une démarche folklorisante, régionaliste ou de revendication identitaire ». Vient ensuite le rapport de B. Lortat-Jacob, redevenu chercheur CNRS à temps plein, dont le propos porte exclusivement sur la problématique de l’ethnomusicologie : si les prémisses de son analyse soulignent les circonstances atténuantes qu’il impute aux « carences institutionnelles, [à une] conception jacobine du savoir [et aux] positions individualistes des chercheurs en poste [80] », il pointe ensuite avec une égale sévérité la « qualité irrégulière » des recherches que la Mission a subventionnées, du fait de leur enfermement dans « des perspectives monographiques étroites [81] » ; quant à son plaidoyer final pour l’« implantation de phonothèques de recherche en région », il revient à cautionner in petto une division du travail entre professionnels, chercheurs statutaires seuls investis de la compétence requise, et amateurs dont les moins inaptes lui semblent ces phonothécaires en charge des archives sonores recueillies (et souvent aussi créées) par les associations [82].

Ce double constat des limites décidément indépassables de l’amateurisme, qui le maintiendraient de façon rédhibitoire en deçà de la démarche scientifique, n’a pu qu’encourager à la prise de distance la MPE et un Conseil recomposé sous la présidence de Marc Augé. Parallèlement, il n’a guère ému celles et ceux dont les aptitudes – et la curiosité – anthropologiques étaient si médiocrement évaluées, sans doute parce qu’à la même période, spécialement durant le triennio 1989-1991, ils ont trouvé plus qu’une compensation dans la reconnaissance des musiques traditionnelles, comme esthétique et comme proposition artistique, qui s’est alors manifestée et qui s’est en particulier traduite par des avancées institutionnelles naguère jugées hors d’atteinte.

L’événement déclencheur a été la participation d’un millier de musiciens jouant des instruments « traditionnels » à la parade, réglée par le graphiste et publicitaire Jean-Paul Goude, qui a défilé sur les Champs-Elysées le soir du 14 juillet 1989, marquant l’apothéose de la célébration du bicentenaire de la Révolution française. Cette marche des Milles (Gasnault, 2016), raillée par Philippe Muray comme le comble de la « festivocratie » (Muray, 1989), a eu l’heur de ravir J. Lang et la foucade ministérielle a duré assez pour amener une augmentation sensible des subventions ainsi que le déploiement d’un réseau de « centres de musiques traditionnelles en région » (CMT) dûment conventionnés avec les DRAC, toutes mesures supervisées par la DMD et coordonnées par la FAMT. Incidemment et sans doute pas de façon totalement inconsciente, ces CMT recyclaient la formule du « centre de culture régionale » conceptualisée par É. Fleury-Lévy pour fédérer à l’échelle des territoires l’action des associations en matière de documentation et de recherche ethnographiques. Au reste, les missions que leur assignaient les conventions d’objectifs comprenaient, à côté de la transmission et de la valorisation des pratiques, la centralisation, la publication et la valorisation des archives sonores résultant des collectages.

Dans cette dynamique, la DMD, principale dispensatrice des subventions garantissant le fonctionnement de la FAMT comme celui de la SFE, laissait peu d’espace à la MPE pour mener une politique de l’ethnomusicologie prodiguant au domaine français une considération égale à celle dévolue aux musiques extra-européennes, qui constituaient les terrains d’élection des chercheurs attachés au MH. La Mission ne s’est pas en tout cas saisie des perches que J. Cheyronnaud lui tendait encore, en 1990, en lui proposant de s’appuyer sur son intermédiation pour aider l’ethnographie associative à se dégager « [d’]orientations prioritairement en rapport avec l’approvisionnement et la thésaurisation documentaires (…) qui tendraient à faire de la collecte et de l’analyse musicale un en soi [83] ». Le responsable du département Musique du MATP pouvait en effet se prévaloir d’une réelle audience au sein de la FAMT, dont plus d’un administrateur avait été son étudiant et, du même fait, avait pu naguère bénéficier d’une allocation de formation accordée par la direction du Patrimoine. Sont pourtant demeurées lettre morte ses appels à la co-construction de programmes de recherche « instruisant la question d’une ethnologie de la musique dans nos propres sociétés », loin « des perspectives musicologiques (ou ethnomusicologiques) classiques [84] ». En définitive, c’est exclusivement dans le cadre institutionnel des unités mixtes de recherche CNRS-EHESS que J. Cheyronnaud a poursuivi après 1990 le « développement des problématiques remettant en cause la validité heuristique des grandes oppositions dualistes (oral/écrit, savant/populaire, etc.) appliquées au domaine musical [85] ».

De leur côté, Conseil et Mission s’inscrivent, un lustre durant, aux abonnés absents. C’est seulement à l’automne 1995 qu’on voit poindre un regain d’intérêt pour la coopération scientifique avec les associations de musiques et de danses traditionnelles dans le domaine du patrimoine ethnologique. Se tient alors sur l’île de Tatihou (Manche) un séminaire réunissant les responsables de la MPE et les ethnologues affectés dans les DRAC. Réunion importante puisqu’il semble que c’est en ce lieu et à ce moment qu’a été conçu le label d’ethnopôle [86] quand bien même on peut considérer que seule l’appellation est inédite et qu’elle ne fait qu’habiller la dernière tentative de recycler à nouveaux frais l’idée d’un réseau de centres de cultures régionales. En tout cas la discussion conduit M. Valière à faire remarquer que, parmi les « équipements associés à l’histoire de la Mission (…), en Poitou-Charentes, c’est la Maison des cultures de pays de Parthenay, centre de recherche et de documentation sur l’oralité, qui est la plus à même d’être labellisée [87] » et il insiste sur deux atouts : « un lieu structuré en tête de réseau avec un ethnologue en poste [88], la plus grosse maison d’édition de la région [89] ». Mais il n’emporte pas la décision car la richesse des fonds documentaires détenus par les associations peut aussi bien être perçue comme une charge insoutenable, du fait du coût encore prohibitif de la numérisation des archives sonores. « Ethnopôliser » l’UPCP ou aider Dastum à informatiser son catalogue de chants enregistrés, même s’il s’agit d’un « authentique travail de recherche », risque de créer un appel d’air entraînant la multiplication des demandes des associations. Face à ce qui « peut devenir un gouffre financier », il est rappelé que « l’avis du Conseil est réservé ».

Une fois encore cependant, la porte entrouverte n’est pas complètement refermée, le séminaire se prononçant en faveur de la « constitution d’un comité de pilotage pour une étude sur le traitement des archives orales [90] ». Loin d’être un renvoi en commission valant enterrement de l’affaire, le processus déclenche, un peu plus d’un an après, la commande d’une étude de faisabilité sur un « projet de constitution d’un réseau de valorisation des archives orales », passée à l’association C.O.R.D.A.E./La Talvera [91]. Peu importe ensuite que l’appropriation par la MPE des préconisations énoncées dans le rapport remis en septembre 1998 [92] manque de consistance car le traitement des attentes, dans leurs dimensions techniques et financières, est repris par de nouveaux acteurs, au sein du ministère dans le cadre du « plan national de numérisation » (Dalbera, 2015), mais aussi à la Bibliothèque nationale de France avec le développement du réseau des pôles associés dans lequel la FAMDT [93] parvient à s’insérer en 1999 : de la sorte, globalement, la réponse de l’appareil administratif a été et reste perçue comme convenablement proportionnée.

Fig. 4.
Publication par la Fédération des associations de musiques et danses traditionnelles (éditions Modal) du rapport Bouthillier-Loddo, commandé par la MPE (2000)

Parvenu au 21e siècle, les échanges entre la MPE – ou plutôt ses avatars – et les composantes les mieux assises de cette Fédération continuent d’abord de relever d’un régime de basse intensité. Mais, depuis une décennie, on enregistre les signaux d’une activité conjointe plus soutenue, ce qui paraît pouvoir être corrélé avec l’adoption par la France de la convention sur le patrimoine culturel immatériel (PCI), compte tenu de la place que ce texte attribue aux pratiques musicales comme aux efforts de préservation dont elles peuvent avoir besoin de bénéficier. Si le dispositif normatif et plus encore ses présupposés anthropologiques suscitent de fortes réserves chez les artistes de la scène « trad’ », qui pointent le risque d’un néo-folklorisme susceptibles d’entraver le processus créateur, elles ne retiennent nullement plusieurs associations de contribuer à l’établissement des fiches de l’« Inventaire national » du PCI et même de s’engager bien au-delà : ainsi Dastum a-t-il été, le fer de lance de la « communauté » qui a porté la candidature de la France à l’inscription du fest-noz sur la liste représentative de l’Unesco [94]. Et s’il ne faut pas chercher un lien mécanique de cause à effet, cette implication sur plusieurs fronts a conféré au réseau associatif un indice renforcé de visibilité, dont on peut faire l’hypothèse qu’il a rendu plus aisément concevable l’apposition du label d’ethnopôle à d’autres associations dont l’action pour le patrimoine musical populaire combine mise à disposition des ressources, valorisation et recherche.

Sans doute l’ethnopôlisation de l’Institut occitan (InOc Aquitaine), avec pour « domaines [d’intervention] l’ethnomusicologie de la France [et celle] des territoires [95] », comme celle de l’Institut culturel basque, observatoire du « rapport Patrimoine-Création dans les domaines de la danse, du chant, de la musique et de la langue [96] », ne sont-elles qu’à moitié probantes puisque pas plus l’association béarnaise que la basque n’ont à ce jour adhéré à la FAMDT [97]. Mais cette réserve est hors de propos s’agissant du Centre des musiques traditionnelles Rhône-Alpes qui siège depuis sa création (1991) à son conseil d’administration et dont les recherches-actions sur l’interculturalité ont commencé à l’initiative de ses deux premiers co-directeurs [98], lesquels furent, l’un et l’autre, des allocataires de formation puis de recherche de la MPE. Il semble du reste qu’on ne s’arrêtera pas en si bon chemin, puisque de nouvelles candidatures sont en préparation.

Dérobée

Il est temps de stopper la chronique et de la remettre en perspective, en considérant, après les appareils, les trajectoires, hétérogènes mais comparables, de cette grosse centaine de musiciens et/ou militants associatifs de la mouvance « trad’ » qui, entre 1980 et 2000, sont allés sur le terrain à la rencontre des derniers musiciens routiniers pour pratiquer le collectage en immersion, et qui ont ensuite tenté d’appareiller sur les eaux de la recherche, le CPE jouant le rôle du pilote, la Mission celle du bosco. Car c’est bien la singularité de cette minorité agissante d’artistes : à l’heure de la culture de masse, de la musique pop et de la déferlante nord-américaine, attentifs à l’objurgation du folk-singer Pete Seeger de ne pas se laisser « coca-coloniser [99] », sans se revendiquer comme « ethnologues » mais soucieux de ne pas être des « musiciens sans mémoire », ils ont expressément inscrit leur démarche « dans la relation féconde entre documentation-archivage et pratique musicale, voire création [100] ». La conviction qui les animait semble avoir été qu’avec des partis pris interprétatifs aussi ethnologiquement informés que ceux de leurs camarades « baroqueux » l’étaient historiquement [101], ils renforceraient la charge émotionnelle des musiques traditionnelles, qu’ils élargiraient ainsi leur audience et qu’ils obtiendraient leur réévaluation par un bond prodigieux sur l’échelle de la distinction.

Si le pari, avec le recul chronologique dont on dispose aujourd’hui, peut être considéré comme manqué, le bilan, sur le plan des itinéraires personnels, apparaît moins déficitaire que contrasté. En chargeant un peu le trait, on distingue trois types de trajectoires.

Pour quelques-uns, très peu nombreux, le contact avec des chercheurs qui avaient d’abord été leurs formateurs les a conduits à changer de tribu [102], avec une prise de distance parfois radicale à l’égard du clan d’origine.

Un deuxième groupe, majoritaire, rassemble des musiciens désireux à l’inverse de le rester, d’autant plus exclusivement, peut-être, que leurs incursions dans le monde de la recherche ne leur avaient pas permis d’y atteindre le niveau de considération espérée. La plupart semble avoir compensé en investissant la posture du créateur, sans d’ailleurs faire l’impasse sur les années de collectage : bien au contraire, la découverte du terrain a été sacralisée en rite de passage, moins parce qu’il aurait constitué le socle du répertoire que parce qu’il avait prodigué une initiation stylistique et constitué plus encore une expérience humaine refondatrice. Aussi insiste-t-on, dans ce groupe, sur l’intensité de la relation humaine construite avec des informateurs érigés en gourous, ou, pour reprendre la formule malicieuse de la chanteuse Marthe Vassallo, en « maître(s) indien(s) [103] ».

Elle-même incarne, presque seule à sa génération mais avec son aîné É. Montbel et quelques autres, la troisième voie qui serait celle d’une synthèse : la carrière artistique domine l’agenda, autant qu’elle prodigue l’essentiel de la notoriété, mais elle vient aussi étayer, par un jeu subtil de légitimations croisées, un travail de recherche qui, loin des praticables, à la périphérie des laboratoires, donne naissance à des publications musicologiques accueillies sans condescendance par les cercles académiques [104]. C’est au moins à cet accommodement que le croisement des catégories (patrimoine, administration, recherche) et/ou l’intersection des disciplines (ethnologie, musique) que semblent avoir conduit, pour l’heure du moins, fausses ou intermittentes, les connivences d’un « moment ».

Références bibliographiques

Dalbera, Jean-Pierre. 2015. Le plan de numérisation du ministère de la culture, 1996-2003, exposé à la MSH d’Angers, 25 mars 2015 (en ligne), https://fr.slideshare.net/Dalbera/le-plan-de-numrisation-du-ministre-de-la-culture.

Gasnault, François. 2016. La marche des mille ou l’apothéose involontaire des musiques traditionnelles, Ministère de la Culture, collection « Les carnets du LAHIC multimédia », 2016 ; (en ligne), http://garae.fr/Carnet%20LAHIC%2010%20COMPRESSE.pdf.

Gasnault, François. 2018. « L’avènement du patrimoine ethnologique (1975-1984) : domestiquer, disqualifier l’ethnographie associative », Vingtième Siècle, revue d’histoire, 137, « spécial Patrimoine, une histoire politique », p. 63-75.

Muray, Philippe. 1989. « Le Bicentenaire est terminé », Art Press, 141.

Pébrier, Sylvie. 2017. « Faire tomber les barrières, entretien avec Arlette Farge et Jean-François Vrod », Culture et Recherche 136, « Recherches en scène », p. 10-12.

Simon, Jean-François et Laurent Le Gall (dir.). 2016. Jalons pour une ethnologie du proche, Savoirs, institutions, pratiques, Centre de Recherche Bretonne et Celtique, collection « Collectif », Brest.

Veil, Anne et Noémi Duchemin. 2002. Maurice Fleuret : une politique démocratique de la musique, Comité d’histoire du ministère de la culture, Paris.




[1Cette contribution forme une manière de diptyque avec l’article «  L’avènement du patrimoine ethnologique (1975-1984) : domestiquer, disqualifier l’ethnographie associative  » (Gasnault 2018). Elle a d’abord fait l’objet d’une présentation orale lors du colloque «  Du moment du patrimoine ethnologique  », coorganisé par le Centre Georges Chevrier et l’Institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain, qui s’était tenu à la MSH Dijon du 7 au 9 décembre 2016. Sa préparation est largement redevable aux entretiens qu’ont bien voulu m’accorder Yves Defrance, Olivier Durif, Gérard Ermisse, Élisabeth Fleury-Lévy, Pierre Guillard, Christian Jacquelin, Éric Montbel, Alain Morel, Pierre Moulinier et Claude Rouot. Qu’ils trouvent ici un témoignage public de ma gratitude à leur égard.

[2Il faut aussi mentionner l’implication, plus épisodique encore, de la direction du Développement culturel qui a pris, à certains égards, le relais du Fonds d’intervention culturelle, lequel, relevant des services du Premier ministre, avait mené une action très marquante au tournant des années 1970 et 1980.

[3Suivant la proposition énoncée, à la séance du 23 avril 1981, par Jacques Lautman (Archives nationales – désormais AN –, fonds de la Mission du patrimoine ethnologique – désormais fonds MPE –, 19960615/2).

[4Lettre du 9 octobre 1980 (AN, fonds de la direction de la Musique et de la danse – désormais DMD –, 198706453/13, dossier Rhône-Alpes Auvergne (Limousin), Musiciens routiniers). Sur le fond, ce soutien ne heurtait pas les convictions du ministre qui, à l’orée de l’année du patrimoine (1980), avait multiplié les déclarations sur sa conception extensive du patrimoine, incluant «  les chants d’hier et d’aujourd’hui  » (Le Progrès du 29 janvier 1980 : ainsi, «  Dans l’Écomusée du Creusot, M. Jean-Philippe Lecat annonce des mesures en faveur de l’ethnologie  »), ou encore «  notre maison, nos bibelots, nos outils de travail  » (Le Journal quotidien Rhône-Alpes, 26 janvier 1980, «  Feu vert pour l’année du patrimoine  » par Brigitte Seux qui relève aussi cette remarque du ministre : «  Le folklore a toujours été suspect  »).

[5Ce terme qui désignait dans les anciens milieux ruraux les instrumentistes non-lecteurs jouant des airs appris par transmission orale, a été repris par les membres fondateurs d’une association revivaliste particulièrement active dans la décennie 1975-1984.

[6Compte rendu de la séance du CPE tenue le 23 avril 1981 (AN, fonds MPE, 19930615/2). Ce propos du directeur adjoint du Laboratoire d’anthropologie sociale faisait suite aux interventions du directeur de la Musique, Jacques Charpentier («  (…) la musique traditionnelle de la France, mal connue, est en train de mourir. Elle offre pourtant un terrain de recherches fondamentales très riche (…) De plus des initiatives d’amateurs se multiplient sur le terrain au risque d’altérer gravement le domaine  »), et de Claudie Marcel-Dubois, directrice de recherche au CNRS et responsable de la phonothèque du MNATP, qui se disait «  également étonnée d’une telle absence  ».

[7Ibidem.

[8«  Patrimoine ethnologique, bilan et perspectives  », rapport au CPE (AN, fonds MPE, 19930615/2).

[9Ibidem.

[10Gérard Althabe, Jean-Claude Bouvier, Daniel Fabre, qui effectuait plutôt son retour dans la compagnie car il avait fait partie du groupe de travail à l’origine du rapport Benzaïd, et Christian Jacquelin, présenté comme le «  seul ethnologue régional pour l’instant  ». En effet, la nomination de Michel Valière à la même fonction en Poitou-Charentes n’était pas encore finalisée.

[11J. Hurstel (1947-2017) était, au moment de sa désignation au CPE, directeur de l’action culturelle du bassin houiller lorrain et des scènes nationales de Saint-Avold et de Freyming-Merlebach (Moselle).

[12Dont portent témoignage des notes et documents de travail, datant de janvier 1982, où figurent, pour certains barrés, les noms des personnes entre lesquels la Mission balançait (AN, MPE, 19930615/2).

[13Sous-titré «  Cahier d’éco-musique  », Plein-jeu n’a eu qu’une seule livraison, parue en 1981.

[14Cinq numéros publiés entre 1982 et 1986. Si la revue cesse alors de paraître, Modal devient l’enseigne abritant l’activité éditoriale, tant discographique que livresque, de la Fédération des associations de musiques traditionnelles (FAMT), fondée en 1985.

[15Dès sa première séance ce groupe de travail affiche son ambition de «  travailler au rapprochement des scientifiques et des acteurs du développement culturel œuvrant dans le domaine du patrimoine ethnologique  » (AN, fonds MPE, 19930615/2, compte rendu de la séance de la commission permanente du CPE en date du 20 décembre 1982, p. 5).

[16L’un de ces projets, «  Corpus technologique d’un instrument de musique populaire, la chabrette limousine  », avait du reste été déposé par É. Montbel  ; ont également été retenus celui concernant les traditions musicales liées à la «  Petite église  » dans les Deux-Sèvres (ARCUP, Jany Rouger et Jean-Louis Neveu), un troisième sur la «  sauvegarde de la musique traditionnelle à La Réunion  » (association La Selve, Robert Chaudenson) et, sous réserve, un quatrième intéressant le domaine corse (E Voce di U Cumune, Nicole Casalonga). Le montant cumulé des subventions accordées avoisinait 200 000 F  ; seule a été écartée la demande portée par l’Institut d’études occitanes pour une étude sur «  la musique à danser en Haute-Loire  » (AN, fonds MPE, ibidem, commission permanente des 1er et 2 mars 1982).

[17Ibid., commission permanente du 1er avril 1983.

[18Ibid.

[19Les citations qui figurent dans le paragraphe sont empruntées au compte rendu de cette séance (AN, fonds MPE, 19930615/2).

[20Union pour la culture populaire en Poitou-Charentes et Vendée (aujourd’hui UPCP-Métive), fédération fondée en 1968-1969 pour rassembler les associations œuvrant dans l’inter-région pour la sauvegarde de la culture paysanne  ; à partir de 1990, liée par convention avec la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) Poitou-Charentes en tant que «  centre de musiques traditionnelles en région  ».

[21Formulés en réponse à l’appel d’offres «  généraliste  » axé sur la thématique «  Appartenance régionale et identité culturelle  », ils concernent respectivement la facture instrumentale à Jenzat (Jean-François Chassaing), les chansons et danses traditionnelles du Vivarais (Sylvette Béraud-Williams), du Languedoc central (association Musica nostra) et de Gascogne (Guy Bertrand) : le montant cumulé des soutiens financiers qu’ils obtiennent s’élève à 250 000 F. Six autres projets «  ethnomusicologiques  » n’ont en revanche pas été retenus.

[22Terme gallo qui signifie «  boîte  » et qui était employé pour désigner l’accordéon, dénoncé par les recteurs (curés) bretons de la première moitié du 20e siècle comme l’instrument du diable dans ces lieux de tentation qu’étaient les bals de campagne. L’association La Bouèze, créée en 1979, ne mène plus de recherches ni même de collectages mais elle assure encore aujourd’hui (2023) des cours d’instruments traditionnels dans une trentaine de communes d’Ille-et-Vilaine et des Côtes d’Armor. D’abord localisée à St-Aubin du Cormier, elle a transféré son siège social à Rennes et occupe, depuis 1999, la Ferme des Gallets, un manoir dont certains murs remontent au 15e siècle.

[23Note de Jacques Sallois, directeur de cabinet du ministre de la Culture, à Jérôme Clément, conseiller technique auprès du Premier ministre, en date du 24 avril 1984 (ibidem).

[24B. Lortat-Jacob continue en revanche de siéger, d’abord comme représentant de la DMD puis comme président de la Société française d’ethnomusicologie qu’il vient de co-fonder.

[25CPE, 6 décembre 1984, «  discours d’ouverture de Monsieur le Ministre  », p. 9 (AN, fonds MPE, 19930615/3).

[26L’annonce en est faite à la commission permanente du 20 décembre 1982, non sans une mise en garde d’Isac Chiva qui «  estime que ces bourses ne doivent aller qu’aux «  amateurs éclairés  » (ibid.).

[27Sociologue de formation, elle avait précédemment appartenu au Centre d’études, de recherches et de formation institutionnelles (CERFI), un organisme de recherche indépendant fondé par Félix Guattari, et elle a fait partie de l’équipe dirigeante de la revue qu’il éditait, Recherches.

[28Intervention de M. Pichonnet-Andral au CPE du 3 mai 1983 (AN, fonds MPE, 19930615/3).

[29Né en 1941, musicien de formation classique, il a été initié à l’ethnomusicologie à partir de 1962, en assistant C. Marcel-Dubois et M. Andral à la phonothèque du MATP ainsi que sur le terrain de la Recherche coopérative sur programme Aubrac (1963-1967). Il a rejoint le département d’ethnomusicologie du MH et le CNRS en 1969.

[30Comme en témoignent ces propos rapportés dans le compte rendu de la commission permanente du 1er avril 1983, p. 5 (AN, fonds MPE, 19930615/3) : «  La Mission et la Direction de la Musique devront orienter au mieux les équipes vers un travail de recherche  ».

[31C’est bien pourquoi le compte rendu de la commission permanente du 20 décembre 1982 soulignait la nécessité d’une «  étroite collaboration avec la direction de la musique  », du fait que cette direction «  dispose également de bourses d’étude  » (AN, fonds MPE, 19930615/2).

[32Le MATP réplique avec un certain retard en favorisant, en 1987, la création d’une «  Association pour la formation et la diffusion d’archives orales du domaine français  », dont J. Cuisenier assure la présidence et J. Cheyronnaud le secrétariat, et en sollicitant à son bénéfice le versement de subventions permettant d’étoffer l’offre de formation.

[33AN, fonds DMD, 20010276/13, lettre-circulaire du directeur de la Musique et de la danse en date du 2 octobre 1985 accompagnant l’envoi du programme du stage.

[34Dont un deux années de suite. Durant la période de référence, 44 allocations de stage sont attribuées par la MPE : le contingent ethnomusicologique représente donc 36% de l’effectif total mais on constate un amenuisement rapide au fil des années, au bénéfice d’allocataires au profil plus généraliste.

[35Regroupement des cinq associations créées, dans le sillage de la pionnière lyonnaise, en régions Rhône-Alpes, Auvergne, Limousin, Centre et Ile-de-France.

[36Compte rendu de la commission permanente du 1er avril 1983 (AN, fonds MPE, 19930615/3, p. 7) : C. Rouot a précisé en séance que les stages seraient «  organisés en ateliers de vidéo, lutherie, histoire de la musique, sociologie et ethnologie (…), démarche originale [qui] doit contribuer à une circulation des savoirs (…) et à la création de musiques vivantes.  »

[37Ibidem.

[38Dont un exemplaire est conservé sous la cote AN, fonds MPE, 20060629/135.

[39Unité de recherche rattachée à l’université de Bretagne occidentale (Brest).

[40Association française des détenteurs d’archives sonores et audiovisuelle, fondée en 1979 à l’initiative notamment de Marie-France Calas, directrice de la Phonothèque nationale, et de C. Marcel-Dubois.

[41Compte rendu de la commission permanente du 19 juin 1986, p. 8 : «  Mme Rouot fait le point sur les actions de formation actuellement préparées par la Mission. Un stage d’ethnomusicologie, organisé avec l’association Dastum, aura lieu en octobre en Bretagne  » (AN, fonds MPE, 19930615/4).

[42Dont les sources écrites sont principalement conservées aux AN, fonds MPE, 19930615/135. Dastum détient pour sa part l’enregistrement sonore intégral des trois journées.

[43Structure de préfiguration de la future École nationale du patrimoine (elle-même rebaptisée en 2001 Institut national du patrimoine), à laquelle le statut particulier des conservateurs du patrimoine (décret n°90-404 du 16 mai 1990) allait confier la formation initiale et continue de ces hauts fonctionnaires culturels.

[44La formule figure dans les «  Conclusions de la réunion éditoriale du 18 octobre 1988  » qui s’est tenue dans les locaux de la MPE et à son initiative (AN, fonds MPE, 19930615/135).

[45Le «  stage de Saint-Malo  » est au moins mentionné et parfois évoqué dans plusieurs des entretiens que j’ai menés au début de mon enquête sur la mouvance revivaliste, en 2011, auprès d’informateurs qui n’y avaient pas tous participé.

[46Note interne MPE, datée (manuscritement) «  Janvier 1987  » (AN, fonds MPE, 19930615/135).

[47Un document interne à la DP, intitulé «  Historique des relations avec la Direction de la Musique et de la Danse à propos du Dossier de stage de Saint-Malo  » et daté de novembre 1989 (ibidem) évoque les «  différentes parties concernées par l’ethnomusicologie, parties ordinairement divergentes et exceptionnellement réunies à l’occasion du stage de Saint-Malo  ».

[48Michel de Lannoy, maître de conférences détaché à la DMD comme inspecteur des musiques traditionnelles.

[49Serge Moëlo, qui fut permanent de Dastum et qui a rejoint la DRAC Bretagne comme contractuel «  chargé de mission pour les musiques traditionnelles et communautaires en Bretagne  ».

[50Pierre Laurence, alors en fonction à l’Office départemental d’action culturelle de l’Hérault, et Lothaire Mabru, devenu maître de conférences HDR à l’université Michel de Montaigne (Bordeaux).

[51MATP pour J. Cheyronnaud, MH pour B. Lortat-Jacob et pour Hugo Zemp, tous chercheurs CNRS, au CEF pour le premier, au département d’ethnomusicologie pour les deux autres. À peu d’années près, le deuxième aurait pu incarner la même figure ambivalente que Michel de Lannoy.

[52À savoir le Musée dauphinois, qui héberge le Centre alpin et rhodanien d’ethnologie, l’association éditrice de la revue Le monde alpin et rhodanien dont Alice Joisten et Georges Delarue animaient la rédaction, et le Musée instrumental de Bruxelles dont Hubert Boone, membre de la commission royale de folklore de Belgique, était le «  collaborateur scientifique  ». Il ne semble qu’aucun des trois n’ait été physiquement présent à St-Malo mais les motifs de leurs dédits n’ont pu être retrouvés. Ils auraient dû intervenir respectivement sur le passage, continuité ou rupture, «  du folklore à l’ethnologie  » et sur le revival de la cornemuse en Belgique.

[53Il a aussi battu avec succès le rappel de la presse locale. Ouest-France annonce le 13 janvier 1987 la «  rencontre nationale d’ethnomusicologie  » puis en rend compte le 15 dans un article intitulé «  Chercheurs et associations : le dégel  », qui souligne que les «  associations sont devenues des interlocuteurs à part entière des scientifiques  ».

[54Présentant à la séance du CPE tenue le 30 avril 1987 un bilan des stages organisés par la Mission, C. Rouot évalue à «  une vingtaine  » ceux qu’elle a organisés «  depuis 1984  » (AN, fonds MPE, 19930615/4). Au passage elle confirme que les trois jours de St-Malo correspondent au format usuel de ces stages.

[55Cet effectif n’est pas en soi insolite : traditionnellement, au ministère de la Culture, la formation continue accueille largement, comme on le constate encore aujourd’hui à l’Institut national du patrimoine. Mais le nombre de candidatures posées par des non-fonctionnaires – et validées par l’administration – singularise ce «  stage  ».

[56Éliane Bec-Gauzit, Jacques Coget et André-Marie Despringre.

[57Y. Defrance, Patricia Heiniger et Hervé Rivière.

[58Dont Denis Chevallier, C. Jacquelin et M. Valière. Le comptage intègre également un cadre de la Phonothèque nationale (Monique Refouil) et un contractuel en poste au CENAM, l’association-relais de la DMD, qui est une figure historique du folk français (Philippe Krümm).

[59Bernard de Parades et Marcel Glever, l’un et l’autre pourvus d’attaches bretonnes, le premier étant connu comme l’organisateur des fêtes de Cornouaille à Quimper, longtemps présidées par Pierre-Jakez Hélias.

[60Tels Pierre Corbefin, danseur et directeur du Conservatoire occitan de Toulouse, et Olivier Durif, violoniste, co-fondateur de l’association des Musiciens routiniers et ancien rédacteur en chef de la revue Modal, l’un et l’autre futurs présidents de la FAMT.

[61Adhérents de Dastum et de deux des grandes confédérations musicales, Bodadeg Ar Sonerien (bagadoù) et Kendalc’h (cercles celtiques).

[62Et dont des résumés ont été publiés, d’avril 1987 à février 1988, dans les numéros 70 (p. 18), 71 (p. 7), 72 (p. 18), 74 (p. 18), 76 (p. 18), 77 (p. 16), 78 (p. 15) et 83 (p. 16-17) de Musique bretonne, la revue de Dastum. Cette association conserve par ailleurs les archives sonores du «  colloque  », qui ont été numérisées (cotes 19870112A à G, 19870113A à I et 19870114A à C) et qui, à défaut d’être en ligne sur son site, sont accessibles sur demande.

[63Ainsi Jean-Paul Callède proposant une «  approche sociologique des pratiques associatives de la musique traditionnelle  » qui forment le quotidien de la majorité des stagiaires, ou Jean-Noël Pelen analysant la place du chant dans la construction d’une identité cévenole.

[64Lequel livre l’esquisse de ce qui deviendra «  La tradition n’est plus ce qu’elle était… Sur la notion de tradition et de société traditionnelle en ethnologie  », article publié dans Terrain, n°9, octobre 1987, p. 110-123.

[65Le programme distribué prévoyait l’intervention de J. Cheyronnaud juste après celle de G. Lenclud. Son report à la dernière séance a donc bien été délibéré, au moins entre eux deux, avec l’accord probable de C. Rouot.

[66Des chutes de neige particulièrement importantes se sont abattues sur toute la France les 14 et 15 janvier 1987.

[67Note du 10 juin 1987 au président du CPE (AN, fonds MPE, 19930615/135). L’ouvrage, tel qu’il le projette et dont il détaille le plan en cinq chapitres, semble correspondre au «  cahier intitulé Musique traditionnelle, éléments d’ethnomusicologie  » dont C. Rouot, dans son rapport au CPE cité ci-dessus (séance du 30 avril 1987), annonçait la publication dans «  la collection des Cahiers Ethnologie de la France co-éditée par la direction du Patrimoine et la Maison des sciences de l’homme  », en précisant que «  la direction de la Musique  » se joindrait aux co-éditeurs (ibidem).

[68M. de Lannoy, B. Lortat-Jacob, L. Mabru et V. Pérennou. Mais des contributions seraient également demandées à J.-F. Chassaing (pour l’organologie) et à D. Laurent (pour la «  poétique orale  »), qui était intervenu à ce propos au stage de Poitiers.

[69Les guillemets sont du directeur de publication pressenti.

[70Dont témoignent parallèlement un échange de notes entre les deux directions (AN, fonds DMD, 20000194/3) et la tenue de la «  réunion éditoriale  » signalée en note 44.

[71En août 1988, ont du moins été recueillis les dactylogrammes des contributions de Jean-Claude Blanc, Jean Blanchard, M. Brandily, J. Cheyronnaud, P. Laurence, G. Lenclud, B. Lortat-Jacob, L. Mabru et J.-N. Pelen (AN, fonds MPE, 19930615/135).

[72C’est l’une des «  Conclusions de la réunion éditoriale du 18 octobre 1988  » (ibidem). Y auraient été conviés O. Durif (pour la FAMT) et P. Malrieu (Dastum), la modération étant confiée à C. Jacquelin, conseiller «  sectoriel  » à l’ethnologie à la DRAC Languedoc-Roussillon, «  unanimement souhaité comme animateur  ».

[73«  Historique des relations (…)  » (ibid.).

[74Outre Cheyronnaud («  Un magnétophone au-dessus de tout soupçon  »), Jean-François Chassaing («  Organologie  »), D. Laborde («  La chanson : texte et musique  ?  »), B. Lortat-Jacob («  Transcrire et analyser la musique  »), L. Mabru («  Apprentissage et transmission des savoirs, l’exemple du fifre en Bazadais  »), lequel co-signe avec V. Pérennou et Marie-Rose Simoni-Aurembou, un dernier chapitre sur «  l’archivage documentaire sonore  ».

[75Lettre de Maguy Pichonnet-Andral à Christine Langlois, responsable des publications de la MPE, 13 mars 1992, qui figure dans les dossiers du département d’ethnomusicologie du MNATP-CEF, auxquels je remercie Marie-Barbara Le Gonidec de m’avoir permis d’accéder en 2011  ; ils ont été versés aux Archives nationales en 2013, au moment de la fermeture et de la désaffectation des locaux parisiens de l’ancienne «  Maison Rivière  », devenue Musée des civilisations d’Europe et de Méditerranée.

[76Lettre-circulaire de Gérard Ermisse, chef de la MPE, aux contributeurs, 30 novembre 1992 (ibidem).

[77Dans sa réponse du 29 décembre 1992 à la lettre précitée du chef de la MPE, J. Cheyronnaud écrit notamment : «  Je prends acte de votre décision que je comprends au vu de l’état actuel du manuscrit  » (ibid.).

[78Onze d’entre elles sont énumérées dans un document intitulé «  Bilan des allocations de formation et de recherches 1988-1997  » (AN, fonds MPE, 20060629/1)  ; parmi elles, on relève notamment le travail d’Hervé Rivière (1964-2001) sur les «  Cantiques de pardon en langue bretonne  » (1992) mais peuvent encore leur être adjointes les recherches de Bénédicte Bonnemason sur la relance de la pratique de la cornemuse landaise (1998) et celles de Françoise Étay sur les bourrées limousines (1998 et 2000). À noter que durant les mêmes années, la DMD continue d’attribuer des bourses de recherche dont bénéficient notamment des musiciens revivalistes de premier plan comme O. Durif et Jean-François Vrod (enquête sur le violon populaire en Massif central, 1989) ou encore J. Rouger, Jean-François Miniot et Pascal Guérin (autour de l’avant-deux comme pratique de danse et comme répertoire de violoneux dans le bocage bressuirais, 1992 et 1993).

[79Intertitre du paragraphe de son rapport où figurent les citations qui suivent (AN, fonds MPE, 19930615/4). Il faut préciser que ce rapport synthétise les bilans établis par les «  ethnologues régionaux  » qui sont fonctionnellement ses pairs.

[80«  Ethnomusicologie et patrimoine, rapport présenté par B. Lortat-Jacob, membre du conseil  » (ibidem).

[81Ibid.

[82En tout cas son propos est, au choix, performatif ou prophétique car les associations vont développer dès le début des années 1990 une expertise documentaire qui entre encore aujourd’hui pour une notable part dans le crédit accordé à la mouvance dans les cercles scientifiques et techniques concernés.

[83«  Note à Monsieur le Directeur de la Mission du Patrimoine ethnologique, Propositions d’interventions de la Mission en matière d’aide à la recherche dans le domaine des musiques traditionnelles  » en date du 14 mars 1990, p. 3 (AN, fonds MPE, 19930615/90). S’il signe seul ce document, il ne s’y exprime jamais à la première personne du singulier mais se positionne en porte-parole d’un collectif dont les autres membres sont mentionnés au bas de la dernière page. Ses quatre partenaires sont tous investis de responsabilités dans des CMT : Henri Francès (Institut de musique populaire de l’Europe méditerranéenne à Collioure), L. Mabru (Centre Lapios, Aquitaine), É. Montbel (CMT Rhône-Alpes) et André Ricros (Agence des musiques traditionnelles d’Auvergne).

[84Ibidem, p. 3.

[85Ibid., p. 2. J. Cheyronnaud quitte en 1993 le MATP-CEF pour rallier l’antenne marseillaise de l’EHESS (laboratoire SHADYC – Sociologie, histoire, anthropologie des dynamiques culturelles – devenu au début des années 2000 le Centre Norbert-Elias, UMR 8562).

[86La première attribution du label intervient en 1996 au bénéfice du Groupe audois d’animation et de recherche ethnographique (GARAE) dont le centre de documentation a été fondé en 1983.

[87Cette citation, comme les suivantes dans ce même paragraphe, proviennent du compte rendu du séminaire des 19-20 septembre, p. 5 à 8 (AN, fonds MPE, 20060629/7). Implantée dans cette sous-préfecture des Deux-Sèvres, la Maison des cultures de pays est, depuis 1993, le siège de l’UPCP  ; en hommage au co-fondateur de cette fédération, elle porte aussi, en parlanjhe (ou dialecte poitevin-saintongeais), le nom de Mésùn André Pacher.

[88Valière fait sans doute allusion à l’anthropologue Jean-Loïc Le Quellec, alors salarié de l’UPCP.

[89Geste éditions, devenue La Geste, initialement filiale éditoriale de l’UPCP.

[90Compte rendu du séminaire des 19-20 septembre, p. 9 (AN, fonds MPE, 20060629/7). Ce «  comité  » réunit D. Fabre, Yvon Hamon, Alain Morel et M. Valière.

[91«  Centre occitan de recherche, de documentation et d’animation ethnographiques  » co-dirigé par Daniel Loddo et Céline Ricard, implanté à Cordes-sur-Ciel (Tarn). L’attribution du label d’ethnopôle à la Talvera a été envisagée, dans le contexte de cette étude.

[92Intitulé «  Les centres d’archives sonores en France : besoins et projets  », le rapport figure dans une publication de la FAMDT, Les archives sonores en France, éditée en 2000 dans la collection «  Modal Poche  ». D. Loddo le cosigne avec Robert Bouthillier, élève de Conrad Laforte, le directeur des Archives de folklore à l’université Laval de Québec (Canada), et ancien permanent de Dastum.

[93La FAMT est devenue en 1992 Fédération des associations de musiques et danses traditionnelles (FAMDT).

[94Du moins lors de l’amorce de la candidature, le relais étant vite pris par Bretagne Culture Diversité, une association nouvelle créée à l’initiative du Conseil régional de Bretagne pour faire contrepoids au Conseil culturel de Bretagne et dont la direction a été confiée à Charles Quimbert, précédemment directeur de Dastum.

[95Citations extraites de la présentation des ethnopôles labellisés sur le site internet du ministère de la Culture, accessible à l’adresse https://www.culture.gouv.fr/Thematiques/Ethnologie-de-la-France/Les-acteurs-de-la-recherche (page consultée le 9 février 2023).

[96Ibidem.

[97Ce qui ne préjuge pas de l’avenir, en particulier pour l’InOc, en instance de fusion avec le CIRDOC.

[98J. Blanchard (né en 1948) et É. Montbel (né en 1955), chanteurs, multi-instrumentistes et chercheurs.

[99La formule figure dans sa «  Lettre ouverte à l’intention des jeunes gens qui, au-dehors des Etats-Unis, sont fortement attirés par la musique folk et pop de ce pays  », dont la traduction par Jacques Vassal a été publiée dans Rock & Folk n°63 (avril 1972).

[100Citation empruntée aux «  notes de travail  » inédites (janvier 2017, révision mars 2018) de J.-F. Vrod, violoniste et compositeur, que je remercie de m’avoir autorisé à en reproduire cet extrait. Le même dans un entretien croisé avec Arlette Farge assure que sa «  pratique musicale est liée à la recherche  » (Pébrier, 2017 : 10).

[101Parallèle moins hardi qu’il n’y paraît : il s’agit de la même génération, la part de l’autodidaxie initiale, tant pour l’apprentissage musical que pour la formation scientifique, a été d’égale intensité et plus d’un musicien s’est illustré dans la pratique des deux répertoires, même si la pression des programmateurs pour une spécialisation excluante a fini par l’emporter.

[102Au rang des «  musicos  » devenus enseignants-chercheurs, figurent notamment Luc Charles-Dominique, Y. Defrance et L. Mabru.

[103«  Clichés et angles morts : des difficultés à se penser comme interprète de musique bretonne aujourd’hui  », texte paru en décembre 2014 sur le blog de l’artiste (The Kerbiquet Wheneverly), accessible en ligne à l’adresse : www.marthevassallo.com/the-kerbiquet-wheneverly/cliches-et-angles-morts-.html (page consultée le 9 février 2023).

[104É. Montbel est l’auteur d’une thèse, éditée (par L’Harmattan, en 2013) sous le titre Les cornemuses à miroirs du Limousin, xviie-xxe siècle : essai d’anthropologie musicale. M. Vassallo a proposé en 2015 une réédition avec apparat critique du recueil de mélodies populaires bretonnes publié en 1913 par le compositeur et homme politique Maurice Bourgeaux dit Maurice Duhamel, Les chants du livre bleu : à travers les musiques bretonnes de Maurice Duhamel. L’ouvrage, paru aux éditions Son an Ero, comprend un disque où l’artiste interprète une sélection de ces chants.