Le moment 1950. L’anthropologie française, entre crise de croissance et crise de conscience

L’anthropologie française au début des années 1950, combien de divisions ? En 1953, selon le décompte d’André Leroi-Gourhan, « la petite armée des ethnologues français » se composerait de « soixante-quinze chercheurs pour étudier les sociétés vivantes sur toute l’étendue de la France, de l’Union [française] et du reste du monde ». Parmi eux, il dénombre une douzaine d’ethnologues enseignant dans le supérieur, dont deux chaires à l’université (en Sorbonne avec Griaule, à Lyon avec la chaire d’ethnologie coloniale attribuée au même Leroi-Gourhan, auxquelles il convient d’ajouter la création toute récente de la maîtrise de conférences à Bordeaux dévolue à Pierre Métais). En Grande-Bretagne, ils sont 38 universitaires la même année. Sur une tout autre échelle, l’anthropologie est enseignée dans plus de 300 établissements aux États-Unis et au Canada, il y a plus d’une cinquantaine de départements universitaires dont vingt-cinq délivrant un doctorat. Au-delà des chiffres qui frappent l’esprit mais sont au sens propre incomparables, Claude Tardits, de retour d’un séjour de deux ans dans plusieurs universités étatsuniennes, note que « l’ethnologie est en train de s’implanter en profondeur dans le système d’éducation américaine et de se créer une solide infrastructure » : les ministères et les organismes privés embauchant des dizaines d’ethnologues, « le problème des débouchés est pratiquement résolu ». En France, il n’y a ni licence ni doctorat d’ethnologie, « la carrière […] est encore à peine admise ». (...)

Télécharger en pdf
PDF - 771.1 kio