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Encyclopédie internationale
des histoires de l’anthropologie

Une pensée du rituel : Raisons du rite dans l’œuvre de Jean Cuisenier

Nicolas Adell

Université Jean-Jaurès, Toulouse

2021
Pour citer cet article

Adell, Nicolas, 2021. « Une pensée du rituel : Raisons du rite dans l’œuvre de Jean Cuisenier », in Bérose - Encyclopédie internationale des histoires de l'anthropologie, Paris.

URL Bérose : article2280.html

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Publié dans le cadre du dossier documentaire consacré à Jean Cuisenier, dirigé par Nicolas Adell (Université Jean-Jaurès, Toulouse) et Martine Segalen (Université Paris-Nanterre)

Face au rituel

Des nombreux objets de recherche dont Jean Cuisenier s’est emparé tout au long de sa carrière, , le rituel est sans doute celui qui lui a résisté le plus longtemps [1]. Non tant en raison du fait qu’il lui aurait échappé sur le terrain, mais plutôt parce qu’il s’imposait à lui à tout moment et sous diverses facettes. Thierry Wendling l’avait bien souligné à l’occasion d’un précédent hommage rendu au fondateur de la revue Ethnologie française coïncidant avecla parution d’une synthèse tardive, Penser le rituel (2006) [2] :

Un intérêt permanent pour les rites, les fêtes et les cérémonies court tout au long de l’œuvre de Jean Cuisenier, tissant ainsi une riche étoffe d’observations et de réflexions sur les actions humaines [3].

L’« intérêt permanent » était sans aucun doute ancré dans les domaines de recherche de Jean Cuisenier, dès ses premiers travaux sur la parenté en Méditerranée orientale, et spécifiquement autour du mariage qui constituait pour lui, en bon lévi-straussien, l’opération centrale du système de parenté et la clé interprétative des formes de famille et de leurs enjeux sous-jacents [4]. Comment expliquer l’important décalage entre les premiers travaux mobilisant la matière considérable de rituels et cérémonies d’échange et d’alliance [5] et, trente années après et à partir de terrains différents en Europe de l’Est, ceux qui en viennent à aborder de front la question du rituel, d’abord au sein de la parenté, puis à un niveau plus général [6] ? Il n’y a pas là, a priori, la matière d’une énigme difficile. Deux explications au moins pourraient immédiatement satisfaire la curiosité des historiens de l’anthropologie française. En premier lieu, l’on est légitimement autorisé de croire que si Jean Cuisenier s’est beaucoup intéressé aux questions d’alliance dans les travaux qu’il a conduits dès les années 1960, il n’a en fait que peu interrogé, ni même décrit, les rituels par lesquels ces choix du conjoint se cristallisent. Car son objet se situait alors en amont de la cérémonie du mariage, ou des fiançailles, dans la mise au jour des logiques qui organisent l’éventail des possibles. Aussi, les 150 mariages tunisiens qui ont fourni le riche matériau servant à élaborer une nouvelle façon de se saisir des structures complexes de la parenté – et une nouvelle façon de schématiser les relations de parenté par la même occasion – n’ont-ils d’intérêt pour le chercheur qu’eu égard aux acteurs qu’ils mobilisent et aux forces socio-économiques qui les contraignent. En aucun cas, l’action rituelle n’a ici de rôle à jouer dans l’analyse dans la mesure où, en toute logique, l’étude des systèmes d’alliance et celle des rituels de mariage ne forment en aucun cas un ensemble nécessaire. Il y a dès lors une profonde cohérence entre cette perspective et la proposition faite par Jean Cuisenier d’inverser les modes de figurations habituels des schémas de parenté depuis Lewis H. Morgan. Car,

[…] les schémas de Morgan, rigides et lourds, se prêtent fort mal à la figuration graphique d’un système aussi complexe. Dans les diagrammes tracés sur leur modèle, en effet, l’individu, symbolisé par un triangle ou un cercle, est l’unité : l’alliance et la filiation, symbolisées par le signe égal et des traits, sont les relations. Aussi, quand les relations étudiées sont nombreuses, les lignes s’entrecroisent en un enchevêtrement tel que le diagramme devient illisible. Dans ces conditions, il y a un avantage certain à utiliser la dualité, en inversant unités et relations. Le mariage, figuré par un point, est alors l’unité, l’individu, homme ou femme, figuré par un trait, la relation. L’ensemble des relations de parenté est ainsi transcriptible en un réseau, ou plus exactement en un arbre, dont les mariages sont les nœuds [7].

Il est probable que Jean Cuisenier, longtemps, n’ait pas eu l’occasion d’observer l’un de ces « nœuds » et, encore moins, de s’employer à le dénouer de façon pragmatique. Il n’en fait aucune mention dans son article de 1962, et l’évoque sous une forme singulière dans son maître ouvrage Économie et parenté. Leurs affinités de structure dans le domaine turc et dans le domaine arabe (1975) [8]. Il s’agit en l’occurrence d’un long tableau analytique [9] qui découpe en unité d’actions (D. 2 « sert du thé à boire » ; D. 5 « reçoit le chef de famille » ; P. 25 « conduit à la maison des donneurs un mouton » ; D.53 : « préparent le lit nuptial », etc. ; où D désigne les donneurs et P les preneurs) ce que J. Cuisenier qualifie de « rituel des fiançailles et des mariages » fondé sur un scénario, exceptionnellement stable, qui est en usage dans le district d’Eregli, à quelque 200 km à l’ouest d’Istanbul sur la mer Noire. La tentation d’une analyse structurale déployant dans l’ordre des actions (singulières, car ritualisées) ce que Claude Lévi-Strauss s’était employé à mettre en œuvre dans l’ordre des discours (singuliers, car mythiques) recouvrait l’attention et interdisait de plonger dans le chaos des « innombrables variations individuelles » pour privilégier l’étude d’un « canon » remarquablement conservé et souffrant très peu de variantes locales [10].

Par ailleurs, et c’est la seconde explication, le manque d’intérêt de Jean Cuisenier pour l’action rituelle pouvait aussi s’expliquer par le fait que de nombreux travaux abordaient ce domaine précis dans les années 1970 d’une manière très différente, rendant l’approche faite depuis les mythes insuffisante. Avec des démarches non mitoyennes et à ignorance relativement réciproque, les revisites de la notion de « rite de passage » par les nouveaux ethnologues du domaine français, les propositions interactionnistes d’Erving Goffman, l’ethnographie de la performance dans le sillage des travaux de Victor Turner – dont il avait dirigé la traduction de The ritual process dans la collection « Ethnologies » aux PUF – et de Richard Schechner d’une part, et de Pierre Smith d’autre part, occupaient largement le terrain du rituel. À l’exception de ceux de V. Turner, ce sont autant de travaux dont J. Cuisenier ne fait pas mention dans ses propres analyses.

Depuis l’une ou l’autre des explications données, l’on peut parvenir à une même conclusion. C’est à mon sens l’emprise et la puissance de la théorie lévi-straussienne du rite et la démarche structurale dans son ensemble qui ont longtemps empêché Jean Cuisenier d’en suggérer une autre. Il aura fallu, à un moment donné, le caractère irrésistible des matériaux récoltés et des situations affrontées pour rendre nécessaire le pas de côté, sans toutefois aller jusqu’à la controverse avec le maître. Je montrerai cependant qu’il aurait pu l’engager mais qu’il a préféré garder pour lui, et encore sous une forme particulière, les arguments les plus déterminants dans un texte demeuré inédit.

L’emprise de la théorie lévi-straussienne du rite : la conjonction et l’attachement

Il est donc nécessaire en premier lieu de rappeler les grandes lignes de la théorie du rituel chez Claude Lévi-Strauss, ou plus exactement la lecture qu’en fait Jean Cuisenier et sur laquelle il n’aura de cesse de prendre appui. Le rituel, dans son noyau minimal, ce sont « des paroles proférées, des gestes accomplis, des objets manipulés [11] ». Et ces paroles, gestes et objets sont, pour Claude Lévi-Strauss, issus d’une opération de morcellement du vécu, de l’ordinaire quotidien et de l’environnement immédiat – comme si l’on avait extrait de leur contexte habituel des objets, des gestes, des mots, dès lors resémantisés, augmentés d’un autre environnement et, ainsi, chargés d’une autre efficacité – pour être soumis à une seconde opération, celle de la répétition, qui en intensifie le nouveau pouvoir. Morcellement et répétition fondent de ce fait le cœur de l’action rituelle pour Claude Lévi-Strauss [12]. Il en tire une conclusion qui a eu, à mes yeux, une influence considérable sur la façon dont Jean Cuisenier s’est saisi de la question :

En morcelant des opérations qu’il détaille à l’infini et qu’il répète sans se lasser, le rituel s’adonne à un rapetassage minutieux, il bouche des interstices et il nourrit ainsi l’illusion qu’il est possible de remonter à contre-sens du mythe, de refaire du continu à partir du discontinu. Son souci maniaque de repérer par le morcellement et de multiplier par la répétition les plus petites unités constitutives du vécu traduit un besoin lancinant de garantie contre toute coupure ou interruption éventuelle qui compromettrait le déroulement de celui-ci […]. Au total, l’opposition entre le rite et le mythe est celle du vivre et du penser, et le rituel représente un abâtardissement de la pensée consenti aux servitudes de la vie [13].

Le rituel comme règne de la conjonction, et qui fait justement du continu avec du discontinu. C’est tout à fait l’inverse du mythe et de la pensée selon C. Lévi-Strauss – ce à quoi a beaucoup souscrit Jean Cuisenier – qui fabriquent des coupures, construisent des catégories, établissent des frontières : entre la Nature et la Culture, entre les Humains, entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, etc.

Et le fait que J. Cuisenier ait beaucoup travaillé sur la parenté, et notamment sur le mariage et les rites nuptiaux – qui forment en quelque sorte le rituel de référence dans ses travaux – l’a rendu particulièrement sensible à cette interprétation du rite comme lieu privilégié de la conjonction. Faire du même avec du différent, du continu avec du discontinu, c’est la fonction explicite, centrale même, de ces rites nuptiaux. C’est bien avec eux que l’idée de la conjonction s’exprime dans toute sa littéralité et avec le plus de force. C’est une dimension que l’on retrouve également dans le rituel du « feu vivant » [14], ce feu de l’âtre des bergeries des Carpates, ce feu qui est « vivant » parce qu’il est source de vie et qu’il assure une sorte de protection pour le berger et son troupeau – en aspergeant les brebis avec l’eau bénite qui a passé sur le feu. Il garantit contre les aléas – la maladie, le mauvais temps, la malchance –, c’est-à-dire qu’il permet de continuer malgré les imprévus, d’assurer la continuité de l’existence en conjurant les événements qui feraient rupture. Faire du continu dans un monde qui ne peut malgré tout qu’être fait de hasards, d’irruptions, de cassures dans le fil du temps. C’est sans doute cet entêtement du rituel à élaborer, y compris envers et contre tout, de la conjonction qui provoquait « l’enchantement » et « l’émotion » que Jean Cuisenier décrit dans Mémoire des Carpathes (2000) face à ces rituels qui ne se contentent pas de perdurer ou de résister, mais qui se revivifient dans l’adversité même d’un contexte politique écrasant, celui de la Roumanie de Ceaucescu ou de la Bulgarie de Jivkov [15]. Si cela trahit sans doute une certaine fascination pour la quête d’authenticité – si férocement attachée à certaines manières savantes de construire une ethnologie du proche [16] –, la durée d’une pratique forme aussi un objet intellectuel qui mérite l’attention tant elle exprime simultanément sa dureté et sa plasticité, une fermeté d’intention et une souplesse de mise en œuvre.

C’est précisément à partir de ce point que Jean Cuisenier, sans en faire un objet de controverse et tout en s’inscrivant ouvertement dans la suite des propositions de Claude Lévi-Strauss, a fait faire à l’analyse du rituel un pas supplémentaire, dans une direction tout à fait différente de celle vers laquelle les recherches contemporaines – dans les années 1990 et 2000 – s’orientaient. Il faut là rendre justice à une distinction entre ce que J. Cuisenier publie dans ses textes savants d’un côté, et ce qu’il laisse entendre par ailleurs dans des entretiens ou des récits qui n’étaient pas moins soutenus par une démarche scientifique mais qui pouvaient prendre vis-à-vis de cette démarche même une liberté de ton et une distance critique, un positionnement que Jean Cuisenier qualifie, de façon un peu abusive à mes yeux, d’« anthropologie réflexive » [17]. C’est dans cet écart – inexistant structurellement au départ, du fait de l’absence ou de la quasi-absence du second terme – que s’est progressivement construit le lent éloignement de l’approche lévi-straussienne du rite.

Ce processus s’est nourri d’un important ressort que Jean Cuisenier a su percevoir principalement sur ses terrains roumains et bulgares : la « capacité d’adaptation étonnante » du rituel [18]. Le travail autour des Noces de Marko fut sans doute, de ce point de vue, un moment décisif. Il mettait en tension la relation du mythe et du rite d’une façon telle que ce fut une prouesse intellectuelle de tenir ensemble l’idée que le rite demeurait une actualisation du mythe tout en étant lui-même le lieu d’une pensée propre et riche, au-delà même de ce que le mythe – ici la figure épique de Marko, héros de la lutte contre les Turcs – propose. Sans s’y adosser explicitement, J. Cuisenier n’était en ce sens guère éloigné de la démarche qu’avait employée près d’un demi-siècle plus tôt Louis Dumont dans son analyse du légendaire de la Tarasque à partir de la description des fêtes locales contemporaines [19]. Et si Jean Cuisenier écrivait d’un côté sur la réciprocité du travail que le rite et le mythe effectuent l’un sur l’autre, il souscrivait cependant à l’idée que le lieu véritable d’expression de la pensée n’était pas celui où le maître du structuralisme l’avait située. Mais peut-être n’était-ce qu’un effet de contexte, lié au caractère différentiel d’une société « chaude » qui loge sa pensée dans le rituel tandis que les sociétés « froides » ont le privilège du mythe comme siège principal de l’activité intellectuelle. Ainsi pourrait-on interpréter la manière dont Jean Cuisenier ménage les propositions lévi-straussiennes à la fin des Noces de Marko, après en avoir éprouvé à tout le moins la non-pertinence sur ses terrains : « Le rite, mieux que le mythe dans les mondes désenchantés, propose les gestes et les paroles qu’il faut pour célébrer les commencements et les fins [20]. »

Mais c’était encore, en définitive, traiter le rite comme le mythe. Ce faisant, la conviction que les mondes désenchantés – que sont les sociétés occidentales modernes pour J. Cuisenier – portaient leur pensée dans leurs rites (plutôt que dans leurs mythes) conduisait, en retour, à « (ré)enchanter [21] » quelque peu le rite et à en faire une incomparable machine à avancer dans le temps, à susciter du travail intellectuel et à produire de la critique, car « c’est dans le rituel que s’exerce le plus finement la pensée [22] ». Il y avait là de quoi passer sous silence la part des émotions et de la réflexivité des acteurs – on attend du rite qu’il vous fasse faire ou être quelque chose ou quelqu’un d’autre, et non simplement qu’il vous fasse réfléchir –, l’importance des échecs, des ratages, les rôles pluriels que chaque individu peut y jouer (et non seulement les spécialistes rituels). Car tous sont transformés par l’action rituelle. À l’époque où Jean Cuisenier développait ses réflexions, l’anthropologie du rituel avait pris un large tournant pragmatique qui, loin de renverser ou de requalifier les relations du mythe et du rite, les dissociait absolument.

Constant dans son approche – d’aucuns ont noté la remarquable continuité qui existe entre Le feu vivant (1994), Les noces de Marko (1998) et Penser le rituel (2006) –, Jean Cuisenier n’a pas pris ce tournant pour le cycle rituel de son œuvre. Il a opté pour la fidélité à une ligne ethnographique et épistémologique éprouvée, celle qui consiste à restituer au fait que l’on considère son champ de signification pertinent. C’est pourquoi, en dépit de son éloignement apparent – tôt justifié par les types de sociétés considérées –, l’auteur de Penser le rituel a, à mon sens, cherché à faire avec le rituel ce que Claude Lévi-Strauss avait fait avec le mythe. Il s’est agi de supposer que chaque élément, y compris le plus insignifiant, est chargé de sens et de raison à la condition qu’on soit capable de lui restituer l’espace qui le fait signifier. C. Lévi-Strauss rendait compte de celui-ci par deux moyens : d’une part, la mobilisation de l’ethnographie détaillée qui renseignait sur les connaissances et les pratiques des acteurs ; d’autre part, la confrontation avec d’autres mythes, appartenant parfois à des groupes différents vivant sur d’autres territoires, qui pouvaient mutuellement s’éclairer. Jean Cuisenier, au fond, n’a pas procédé très différemment. Tandis que C. Lévi-Strauss restituait principalement pour la matière mythique les savoirs concernant la nature, les qualités sensibles et concrètes de l’environnement, vivant ou non, et s’appliquait à examiner les transformations des motifs et des narrations dans l’espace, J. Cuisenier a rendu compte de savoirs historiques et socio-politiques qui rendent les rituels instrumentalisables par des régimes politiques – mais qui sont aussi bien, dans d’autres cas, des dispositifs critiques vis-à-vis de l’État –, tout en suivant leurs transformations dans le temps. S’il n’évoque pas explicitement cette symétrie de démarche, l’intention d’opérer ce décrochage pour continuer l’œuvre du maître – car c’est bien d’une rupture par fidélité qu’il s’agit – transparaît dans Penser le rituel qui s’ouvre sur un modèle de rite socio-politico-historique :

Quel est ce cube de béton blanc, incongru sur cette place centrale de Sofia, devant lequel des gardes en grande tenue paradent ? Pourquoi cette architecture massive et ce cérémonial qui l’entoure ? Et pourquoi ces gens font-ils la queue pour s’en approcher dans le froid, en ce début d’octobre 1989 ? Mila et Christo me l’apprennent : c’est le mausolée de Georghi Dimitrov, le grand dirigeant du parti communiste bulgare, mort en 1949. Militants et affiliés viennent honorer son corps réfrigéré. Combien y ont-ils été contraints, et comment ? Je l’ignore. Invité par les autorités académiques de Bulgarie, je suis dispensé de me conformer au rite, mais ne manque pas d’examiner comment il est pratiqué. La scène est moins grandiose qu’à Moscou quand, à plusieurs reprises, je l’avais observée, dans le courant des années 1970 et 1980, lorsque les délégations convoyées par le Parti défilaient, sous les hauts murs de la forteresse séculaire, en processions interminables. Elles venaient y honorer, en contre-bas, les dépouilles de Lénine et de Staline. En cette fin des années 1980, le rite qui se déroule à Sofia est le même, à quelques menues variantes près. Le cortège se plie et se déplie dans l’apparence de la liberté, sous l’œil de rares policiers. Dans la raideur, certes, mais sans les moindres signes de contrainte. Comme une procession lors d’un pèlerinage [23].

Suivi dans le temps et repérage des variantes de ces rites socio-politiques, rapports entre « lien social » et « profondeur du temps » [24] donnent le ton de la matière de Jean Cuisenier et de son approche. S’y associe également le souci d’examiner et de rendre compte des compétences des acteurs même si, comme dans le cas des mythes amérindiens, une partie de leur sens et de leur fonctionnement leur échappe. C’est la vertu du regard « étranger » qui fonde d’ailleurs le principe de l’approche du rituel ici défendue, à l’encontre donc de celle, contemporaine, qui défend une plus intense participation et une plus grande variété de points de vue (tantôt l’invité, tantôt l’acteur, etc.) pour cerner le cœur de l’action rituelle.

De la sorte, il offrait à la pensée de Claude Lévi-Strauss un prolongement, en insistant sur ce que ce dernier avait mis au jour, à savoir la capacité du rituel à fabriquer de la conjonction et de la continuité.

Au-delà de C. Lévi-Strauss : le temps et le rite

Cette propriété du rite qu’il mentionne dans le fameux « Finale » de L’Homme nu clôturant l’entreprise des Mythologiques, C. Lévi-Strauss la construit à partir du script du rituel et de son environnement social et naturel immédiat. À ce niveau, le modèle qu’il a en point de mire n’est pas tant celui du mariage que celui de la cure chamanique. Car le mariage offre moins de prise pour articuler un aspect essentiel de la démonstration, à savoir les rapports entre le rite et le mythe. De ce point de vue en effet, la cure chamanique ou les rites sacrificiels, ceux qui font entrer en communication avec des esprits ou des dieux (ou des grandes valeurs : la République, la Liberté, la Paix, etc., dira J. Cuisenier), sont bien plus efficaces. L’opération de conjonction du rituel consistera ainsi très précisément, et par des moyens très concrets, à surmonter la distance qui existe dans le temps ordinaire entre le monde des humains et le monde surnaturel pour que les êtres qui habitent ce dernier aient une action – ou bien cessent d’avoir une action – sur le monde des hommes. Pour cela, il faut entrer en communication, c’est-à-dire fabriquer un temps et un espace où ces mondes habituellement disjoints peuvent se rejoindre pour échanger, souvent – mais pas nécessairement – par le truchement d’un médiateur, spécialiste rituel.

L’empreinte de cette leçon reste vive dans l’œuvre de J. Cuisenier. Il en fait d’ailleurs le noyau de la distinction entre une cérémonie (qui n’a pas besoin de cette communication avec un autre monde) et un rite. Si le rituel du « feu vivant » a tant attiré l’attention de l’ethnologue dans les Carpates, c’est qu’il lui révélait que l’opération de conjonction que le rite établit fonctionne non seulement pour unir des différences qui cohabitent à un moment donné – deux groupes familiaux distincts dans le cadre d’un mariage, des hommes et des divinités dans le cadre d’un sacrifice – mais également pour réparer des disjonctions qui se sont installées dans le temps ou qui pourraient s’installer dans le temps. Ainsi, le rituel, au moins dans les sociétés modernes qu’il qualifie d’« historiques » – conjoint finalement surtout le passé, le présent et le futur. Bien que Jean Cuisenier n’ait pas formulé les choses de façon aussi explicite, il a clairement énoncé la proximité qu’entretenaient selon lui le rite et la biographie d’une part – les rituels sont « en affinité réelle avec le déploiement de la vie individuelle », écrit-il [25] – et d’autre part le rite et le temps historique – les rituels sont aussi le lieu d’une « conscience de l’histoire [26] ». C’est le résultat le plus immédiat des travaux qu’il a livrés dans Le Feu vivant ou Les noces de Marko, et qu’il a synthétisés dans Penser le rituel  ; le rituel est une machine à établir de la continuité dans le temps. Quand le feu vivant, pour poursuivre avec cet exemple si emblématique, protège le troupeau et prévient des maladies et des infortunes, il met en œuvre radicalement une telle continuité : il s’adresse à l’avenir pour l’inviter à ne pas faire surgir d’événements imprévus, à être identique au présent d’un troupeau en bonne santé.

Mais le processus est véritablement exploré dans toutes ses dimensions à partir de l’analyse qu’il propose de l’activité rituelle des Arméniens installés en France, et tout particulièrement du rite du « tirage des sorts » qui se fait le jour de l’Ascension [27]. Jean Cuisenier installe en premier lieu le rituel dans le temps historique en revenant à son origine en Arménie même, puis en explorant les différentes transformations qu’il a subies en avançant dans l’histoire et en changeant de contexte socio-culturel. Il s’agit toujours d’illustrer la « capacité d’adaptation étonnante » du rituel. J’identifie plusieurs raisons au fait que ce soit précisément ce rituel particulier qui a fait l’objet d’une analyse consacrée spécifiquement à ce tressage du temps qu’est le « travail de la mémoire », ici central pour J. Cuisenier, davantage même que dans les grands rites commémoratifs. En premier lieu, le tirage des sorts rejoignait son intérêt ancien pour les rites nuptiaux dans les mondes turcs et arabes (même si la dimension proprement rituelle n’avait pas alors focalisé son attention) puisqu’à l’origine seuls les jeunes gens en âge de se marier y participaient. Il en ressortait ainsi des présages sur les belles rencontres qui allaient se produire dans l’année, ou les dangers qui surviendraient. En second lieu, ce rituel affrontait ouvertement la question du futur et du destin : il s’agissait de savoir ce qui allait advenir. Un thème que Jean Cuisenier avait aussi rencontré, sous une forme plus atténuée, dans le cadre des enquêtes menées autour du « feu vivant ». Celui-ci s’y présentait en effet sous les traits de personnages de conte, notamment ceux des « fées du destin » (les ursitoare) [28] pour lesquelles on dressait des tables peu après la naissance d’un enfant, le troisième jour précisément, celui de la « nuit du destin », quand les rêves de la mère sont plus prémonitoires que les autres nuits. Le soir, la table est mise, le plus souvent par la mère du nouveau-né en personne, avec trois verres de vin et trois galettes de pain enduites de miel (colaci). Dans certains cas, on examine la table le lendemain pour y trouver le destin de l’enfant : « si c’est bien », comme le dit une informatrice de J. Cuisenier, et que rien n’est déplacé ni consommé, alors l’enfant ira bien ; « si c’est mal », parce qu’un verre est renversé ou les galettes dérangées, alors tout ira au plus mal. « Moi, poursuit la même informatrice, quand j’ai fait les ursitoare à ma fille, je les ai trouvées mal, c’était renversé […]. Et ma fille est morte. J’avais rêvé une grande, grande fosse [29]. »

Des rituels pour fabriquer de la continuité dans le temps, annoncer l’avenir et le mettre en conformité avec le passé dans le cadre de ces expressions sociales de l’idée de destin. Certains pouvaient ne concerner que la couture de deux dimensions, le plus souvent le passé et le présent. Jean Cuisenier mentionne plusieurs cas de ce genre, dont les rituels funéraires sont comme le parangon. Il décrit d’ailleurs sous ce rapport le service véritable qu’ils rendent au défunt et qui ne consiste pas simplement en un rite de passage :

L’action rituelle offre ainsi une forme d’expression à la demande tendant, lors de la célébration en l’honneur du défunt, à rassembler des souvenirs épars, à relier des épisodes distincts, à ramasser le cours des événements auxquels il a pris part en une unité, bref, à fixer sa mémoire en faisant de sa vie une histoire. Ce que l’on appelle en hagiographie exactement une Vita. Narrativiser : tel me paraît être le mouvement décisif qu’opère le rite en émergeant de la cérémonie [30].

De la conjonction avec le passé par un récit qui façonne une cohérence biographique alors que la vie n’est traversée que par des hasards et des incohérences, ou de la conjonction avec le futur alors que l’avenir est l’incertitude même, telles sont les extensions que Jean Cuisenier a proposées, à bas bruit, du domaine de la théorie lévi-straussienne du rituel.

Détachement et disjonction

Quelques années après l’achèvement de son cycle rituel, Jean Cuisenier, hors de tout contexte académique, a livré de sa théorie du rituel une vision tout à la fois plus ferme, plus claire et plus riche, en tous cas plus détachée encore de l’emprise lévi-straussienne. La confiance nouée en une autre écriture – inaugurée par le succès du son livre Le périple d’Ulysse (2003) – et, peut-être, la mort du maître (2008) ont probablement contribué à l’émergence d’une autre forme d’expression de ses idées.

Dans un manuscrit achevé dans une première version en 2013 et resté inédit – intitulé L’itinéraire de Paris à Istanbul par Venise et la mer –, Jean Cuisenier a cherché à éclairer de façon singulière ce qu’est, en Europe, le désir d’Orient et en quoi la Sublime Porte le réalise et le déçoit en même temps [31]. Ce texte recelait également un questionnement crucial sur l’identité européenne, et spécifiquement sur la capacité de l’Union européenne à le porter [32] et sur ce que la Turquie peut en dire, comme en miroir. Tels sont les principaux enjeux du texte, rapportés sur un mode singulier à de multiples hauteurs de vue – sans doute est-ce là une qualité d’un « arpenteur-épistémologue [33] » – et selon un anachronisme volontairement ironique, puisque les références à ces itinéraires de romantiques qui cherchaient l’Orient – Chateaubriand est bien entendu la référence explicite – sont avancées pour être rejetées dans leur passé révolu.

Mais il y a aussi, au fil des pages, de « petites » questions qui sont traitées, ou plutôt de grandes questions mais abordées furtivement, comme en passant, et dont on ne saisit la portée qu’à la condition d’avoir à l’esprit au moins une partie des travaux et des réflexions évoqués ci-dessus. Dans le chapitre 11, Jean Cuisenier fait escale à Lesbos. On est presque à la fin du voyage. Par temps clair, on peut voir les côtes turques. C’est la dernière halte avant de s’enfoncer dans le détroit des Dardanelles. L’auteur consacre alors plusieurs pages à la poétesse Sappho, à ses œuvres et, fidèle à lui-même, au rituel des noces qu’elle contribue à organiser et aux pièces qu’elle écrit spécifiquement pour ces occasions, contribuant par-là à le renforcer. Ces petits poèmes sont destinés à être lus au moment du rite pour sceller l’union. Ils fonctionnent ainsi comme un philtre d’amour fait de paroles. Boire les mots de Sappho et tomber définitivement et éperdument amoureux.

Mais la séquence contient davantage. Alors qu’il s’est tout entier consacré à l’analyse de ces rites comme instruments de la conjonction, et singulièrement aux rites nuptiaux, Jean Cuisenier insiste à cet endroit sur un aspect méconnu de la vie de la poétesse qui paraît en contradiction. Sappho aurait expérimenté pour elle-même un rituel fort de disjonction, un rituel dont la fonction – tout au contraire de ce qu’a montré J. Cuisenier dans son œuvre – est de séparer et de désunir ; un rituel, devenu « traditionnel » après elle, selon Strabon [34], qui consiste à sauter de la haute falaise de l’île de Leucade pour guérir du mal d’amour. Leucade est sans nul doute une île que le navigateur Cuisenier connaissait bien. Située de l’autre côté du monde grec par rapport à Lesbos, elle est toute proche de la côte ouest de la Grèce continentale, à 10 km à peine au nord d’Ithaque. Poursuivant le Périple d’Ulysse, il n’aura pas manqué, à tout le moins, de la repérer. Sappho, et d’autres à suite, se soumettent donc à une terrible épreuve, celle d’un saut, très dangereux, mortel pour beaucoup, et si l’on n’y succombait pas, qui apportait la guérison. Une ordalie d’amour dont Ovide a rapporté, dans ses Épîtres (XV), les derniers mots : « Air, soutiens-moi : le poids de mon corps est léger. Et toi, tendre Amour, étends sur moi tes ailes pendant ma chute [35]. » Mais Sappho meurt, et c’est donc un suicide rituel.

Jean Cuisenier s’efforce alors de montrer qu’en réalité ce rituel de détachement et de disjonction que Sappho installe de façon dramatique est une résurgence d’un rite archaïque de justice sur l’île de Leucade. La poétesse l’aurait repris, personnalisé et lui aurait donné une autre signification. Ce rite, qui avait lieu tous les ans le jour de la fête d’Apollon, nécessitait de précipiter du haut de la falaise une victime expiatoire, souvent un condamné à mort que l’on avait peint et recouvert de plumes et dont les membres étaient accrochés à des volatiles vivants. Ces derniers pouvaient amortir sa chute, mais le plus souvent ils mouraient avec lui. Il arrivait cependant, dans quelques rares cas, que la victime survécût. Des pêcheurs, qu’on avait fait attendre à bord de leurs esquifs pour récupérer les corps, remontaient alors le miraculé. La peine de mort était alors commuée en bannissement définitif. Ce rituel archaïque d’exclusion délestait la cité d’un membre malade. Aussi bien pouvait-il ressusciter en tant que rite personnel de guérison pour les malades d’amour.

Il serait aisé de montrer que ces rituels de disjonction sont, en fait, des rituels de conjonction par la négative : en faisant disparaître l’auteur d’un crime, ne renforce-t-on pas la cohésion du groupe qui expose ainsi spectaculairement ses principes et ses règles ? En cherchant à soigner le mal d’amour, n’espère-t-on pas retrouver une adhérence à soi-même plutôt qu’à un autre qui vous déchire ?

Mais Jean Cuisenier n’a pas insisté sur cet aspect. Il avait sans doute suffisamment étudié les nombreux rituels de conjonction, ceux qui créent ou renforcent des liens et qui fondent la logique même du rite selon lui, pour qu’il laisse aux rares rituels qui les défont ou qui les rompent leur valeur propre et, peut-être, leur capacité à inquiéter un peu la domination tranquille des premiers. Là réside une grande qualité intellectuelle : demeurer attentif aux exceptions d’une règle qu’on a soi-même énoncée.




[1Je remercie Martine Segalen pour ses remarques fort précieuses sur une première version de ce texte.

[2Jean Cuisenier, Penser le rituel, Paris, PUF, 2006.

[3Thierry Wendling, « Du rite et des théories indigènes de l’action », Ethnologie française, vol. XXXVII (hors-série), 2007, p. 119-122 : 119. Du même volume « hors-série », les articles de Martine Segalen, Claude Rivière ou encore l’entretien conduit par Ioana Andreesco soulignent la prégnance du rite dans l’œuvre de J. Cuisenier.

[4Cf. Richard Bucaille & Jeanne Virieux, « Cuisenier, continuateur de Lévi-Strauss ? L’échange et l’alliance : splendeurs et audaces de la structuration », Bérose. Encyclopédie internationale des histoires de l’anthropologie, Paris, 2020. En ligne : https://www.berose.fr/article2012.html

[5Jean Cuisenier, « Endogamie et exogamie dans le mariage arabe », L’Homme, vol. II, n°2, 1962, p. 80-105 ; Économie et parenté. Leurs affinités de structure dans le domaine turc et le domaine arabe, Paris/La Haye, Mouton, 1975.

[6Jean Cuisenier, Le feu vivant. La parenté et ses rituels dans les Carpates, Paris, PUF, 1994 ; Les noces de Marko. Le rite et le mythe en pays bulgare, Paris, PUF, 1998 ; Penser le rituel, op. cit.

[7Jean Cuisenier, « Endogamie… », op. cit. : 95.

[8C’est par ailleurs un point qui demeure obscur dans les ouvrages qui suivront. Il n’est pas toujours aisé de déterminer si Jean Cuisenier a assisté – et en quelle place – aux rituels qu’il décrit ou s’il s’agit de récits collectés auprès d’informateurs. Cf. les remarques faites par Gilles de Rapper à propos de Mémoire des Carpathes (compte rendu paru dans la Revue française de sociologie, 42 (2), 2001, p. 393-397).

[9Jean Cuisenier, Économie et parenté…, op. cit. : 174-180.

[10Ibid. : 173. C’est par une approche du même ordre qu’il s’est employé à analyser l’architecture rurale et l’art populaire. Je remercie M. Segalen d’avoir attiré mon attention sur cette constante méthodologique.

[11Claude Lévi-Strauss, Mythologiques. 4 : L’Homme nu, Paris, Plon, 1971 : 596.

[12C’était par ailleurs un aspect bien mis en évidence, à partir d’une autre matière, par Arnold Van Gennep. Il reste que, pour fonder une ethnologie moderne de la France, J. Cuisenier avait sans doute à se départir d’une figure savante complexe mais rattachée au monde d’avant, celui des folkloristes. Pour une relecture récente du personnage, cf. Daniel Fabre et Christine Laurière (dir.), Arnold Van Gennep, du folklore à l’ethnographie, Paris, Éditions du CTHS, 2018.

[13Claude Lévi-Strauss, Mythologiques. 4 : L’Homme nu, Paris, Plon, 1971 : 603.

[14Jean Cuisenier, Le feu vivant…, op. cit.

[15Sur cet aspect, cf. Martine Segalen, « Le recyclage des traditions : rites, communisme et ethnologie », Ethnologie française, vol. XXXVII (hors-série), 2007, p. 95-98.

[16Cf. l’analyse livrée à partir du cas étatsunien, mais largement exportable, par Regina Bendix, In search of authenticity, Madison, University of Wisconsin Press, 1997. Ainsi, J. Cuisenier se demande si les « activités [rituelles] ne procèderaient pas ultimement, pour les officiants et les pratiquants, du projet d’être au monde dans toutes les dimensions de l’existence, par authentique engagement » (Penser le rituel, op. cit.  : 15 [mes italiques]).

[17Jean Cuisenier, Mémoire des Carpathes. La Roumanie millénaire : un regard intérieur, Paris, Plon « Terre Humaine », 2000 : 555.

[18Ioana Andreesco, « En parcourant la Roumanie. Entretien avec Jean Cuisenier au sujet de Mémoire des Carpathes », Ethnologie française, vol. XXXVII (hors-série), 2007, p. 147-150 : 150.

[19Louis Dumont, La Tarasque. Essai de description d’un fait local d’un point de vue ethnographique, Paris, Gallimard, 1951.

[20Jean Cuisenier, Les noces de Marko…, op. cit. : 94. L’idée est reprise dans Penser le rituel, op. cit. : 24-25.

[21Pour les vertus positives du « réenchantement » opéré par Jean Cuisenier, cf. Claude Rivière, « Un réenchantement du monde », Ethnologie française, vol. XXXVII (hors-série), 2007, p. 157-160.

[22Jean Cuisenier, Penser le rituel, op. cit. : 25.

[23Ibid. : 11.

[24Jean Cuisenier, Les noces de Marko…, op. cit. : 126.

[25Jean Cuisenier, Penser le rituel, op. cit. : 35.

[26Jean Cuisenier, Les noces de Marko…, op. cit. : 161.

[27Jean Cuisenier, Penser le rituel, op. cit. : 88-106.

[28Jean Cuisenier, Le feu vivant…, op. cit. : 165-184.

[29Ibid. : 178.

[30Jean Cuisenier, Penser le rituel…, op. cit. : 35.

[31Ce manuscrit m’a été confié par les enfants de Jean Cuisenier et notamment par le truchement actif et enthousiaste d’Isabelle Pujade-Lauraine. Je les remercie encore de la confiance qu’ils m’ont, par ce geste, accordée.

[32En dernier lieu, on pourra lire comme un héritage des réflexions de Jean Cuisenier dans ce domaine : Monica Heintz (dir.), avec la collaboration d’André Burguière), Europe 27. La fabrication de la citoyenneté européenne, dossier réuni pour Ethnologie française, vol. L, n° 3, 2020.

[33Selon la qualification que lui attribue Jean-Pierre Martinon, « Passage et ancrage : écritures d’ethnologues et récits de voyageurs », Ethnologie française, vol. XXXVII (hors-série), 2007, p. 151-156 : 155.

[34Strabon, Géographie, X, 2, 9.

[35Cité par Jean Cuisenier, L’itinéraire de Paris à Istanbul par Venise et la mer, tapuscrit inédit, 301 p. : 252.