Edward Burnett Tylor naît à Camberwell (Surrey) le 2 octobre 1832, dans une famille aisée de confession quaker [1]. Il est le quatrième fils de Joseph Tylor (1793-1852), propriétaire à Londres d’une fonderie de cuivre, et d’Harriet Skipper († 1851). Son frère aîné, Alfred Tylor (1824-1884), deviendra un géologue amateur réputé [2].
Le jeune Edward fait ses études à la Grove House School de Tottenham, une école appartenant à la Société religieuse des Amis [3]. À l’âge de seize ans il rejoint l’entreprise familiale, pour y travailler avec ses frères. En 1855, les premiers symptômes d’une tuberculose le poussent à voyager pour recouvrer la santé [4] : il se rend aux États-Unis, où il explore la vallée du Mississippi et la Louisiane, avant d’aller à Cuba. En 1856, ayant rencontré à La Havane l’archéologue et ethnologue quaker Henry Christy (1810-1865), Tylor choisit de l’accompagner au Mexique. Le périple mexicain dure trois mois [5] et Tylor en rapporte la matière de son premier livre, un récit de voyage intitulé Anahuac : Or Mexico and the Mexicans, Ancient and Modern. La rencontre avec Christy décide de l’avenir de Tylor, car Christy orientera ses intérêts vers l’archéologie, l’ethnographie et l’ethnologie.
Rentré au Royaume-Uni en 1856 et disposant d’une « modeste fortune » (modest competency) [6], Tylor entreprend un vaste programme de lectures dans les domaines des sciences de la nature et des humanités, en accordant la priorité à l’ethnologie, l’ethnographie, l’archéologie, la linguistique, l’histoire des techniques et le folklore (Leopold 1980). En 1858, il épouse Anna Rebecca Fox (1831-1921), également issue d’une famille quaker fortunée. Le couple n’aura pas d’enfants et Anna partagera les voyages, lectures et intérêts de Tylor tout au long de leur vie conjugale. Tylor voyage en effet, de 1852 à 1904, en Europe, en Afrique du Nord, en Amérique septentrionale et centrale (Petch 2012a). Il maîtrise plusieurs langues dont l’allemand, le français, l’espagnol, l’italien, le hollandais et le latin. Ses remarquables compétences linguistiques lui permettent d’avoir accès à une vaste littérature d’intérêt ethnographique [7], ainsi qu’au débat ethnologique, philologique et archéologique européen et notamment à la tradition philologique et ethnologique allemande (Leopold 1980).
Le choix d’achever sa formation en dehors des institutions académiques s’expliquerait, selon plusieurs biographes de Tylor, par le fait que les universités britanniques étaient réservées aux membres de l’Église anglicane (Stocking 1994 : xi). Toutefois, si Oxford et Cambridge ne délivraient leurs diplômes qu’aux fidèles de l’Église d’Angleterre, Tylor aurait tout de même pu se former aux universités de Londres ou d’Édimbourg, ouvertes aux membres des églises non conformistes (Larsen 2014 : 14-15). Quoi qu’il en fût de ses motivations, dans les années 1856-1865, Tylor élabore son programme d’études en autodidacte sous l’égide d’Henry Christy et de son frère Alfred. Son premier livre, Anahuac, paraît en 1861. Trois ans plus tard, en 1864, Tylor quitte la Société des Amis [8].
Tout en proposant une chronique de son itinéraire mexicain, Anahuac accorde la priorité à l’analyse des antiquités précolombiennes et aborde les problèmes posés par l’ethnologie diffusionniste de la première moitié du XIXe siècle, dont l’une des figures de proue était, en Grande-Bretagne, le médecin, aliéniste et ethnologue James Cowles Prichard (1786-1848) (Stocking (1987)1991 : 157). Tylor s’interroge ainsi sur l’origine des peuples américains, l’explication des similitudes et des différences entre leurs cultures et celles de l’Ancien Monde, le rôle des emprunts et des processus spontanés de développement dans la genèse des civilisations précolombiennes. Longtemps perçu par les biographes de Tylor comme une simple relation de voyage [9], Anahuac juxtapose en réalité les observations sur la société mexicaine aux réflexions historiques et atteste d’une connaissance approfondie de l’ethnographie, l’ethnologie et l’archéologie américanistes. Tylor prend en compte, dans cet ouvrage, les hypothèses du naturaliste Alexander von Humboldt (1769-1859) sur l’origine asiatique des peuples américains et les processus de diffusion culturelle liant les sociétés de l’Asie et des Amériques [10]. Le premier livre de Tylor offre également des réflexions méthodologiques concernant l’aptitude des mythes à élucider, par leurs analogies, les connexions ethniques et les migrations antéhistoriques des groupes humains (Tylor 1861 : 339).
La publication d’Anahuac sera suivie d’une période intense d’études et de recherches [11], culminant, en 1865, avec la publication du deuxième ouvrage de Tylor, intitulé Researches into the Early History of Mankind and the Development of Civilization. Tylor y développe des thèmes déjà abordés dans Anahuac – l’explication des analogies culturelles, les liens entre les peuples et les civilisations des Amériques précolombiennes et de l’Ancien Monde – et des sujets de recherche qu’il n’avait pas traités dans son premier livre : l’émergence progressive des écritures alphabétiques, le rapport entre le geste et la parole dans la genèse du langage, l’origine de la pensée et des pratiques magiques, le développement de la culture matérielle et des techniques, l’explication des usages apparemment irrationnels tels les comportements de couvade, l’origine des mythes. Les enjeux des Researches sont à la fois théoriques et méthodologiques, car ce texte propose un projet de collecte et classification raisonnée des données ethnographiques, une réflexion sur leurs modalités d’interprétation, enfin l’argumentation des deux principales hypothèses de Tylor : l’unité de l’espèce humaine, le développement naturel et progressif du langage et de la civilisation à partir de conditions culturelles comparables à celles des peuples extra-européens qualifiés de « sauvages ».
Ces théories, développées dans les articles des années 1866-1870 [12], seront pleinement élaborées dans le troisième ouvrage de Tylor, paru en 1871 sous le titre Primitive Culture : Researches into the Development of Mythology, Philosophy, Religion, Art, and Custom. Dans Primitive Culture, Tylor défend le statut scientifique des recherches anthropologiques visant à éclairer les origines et les premiers développements de la culture, définie comme « ce tout complexe comprenant les connaissances, les croyances, les arts, la morale, le droit, les coutumes et toute autre aptitude ou disposition habituelle acquise par l’homme en tant que membre d’une société » (that complex whole which includes knowledge, belief, art, morals, law, custom, and any other capabilities and habits acquired by man as a member of society : Tylor 1871a, I : 1). Par l’analyse comparative des cultures extra-européennes et occidentales, du psychisme infantile et des vestiges matériels des cultures préhistoriques, Tylor entend reconstituer l’origine et l’évolution naturelle du langage, de la morale, de la pensée mythique et religieuse, des rites et des techniques. Accordant une place prééminente aux phénomènes religieux, Primitive Culture théorise le développement graduel du monothéisme à partir de l’« animisme », définition minimale et première expression de l’expérience religieuse, caractérisée par la croyance aux âmes et aux êtres spirituels. Tylor envisage le passage de l’animisme au polythéisme, ensuite l’essor du monothéisme et l’incorporation progressive des impératifs moraux dans les systèmes religieux, la formation des variantes épurées du monothéisme constituant l’aboutissement de l’évolution religieuse [13]. Ces hypothèses, fondées sur l’analyse comparative d’une vaste littérature d’intérêt ethnographique, sont confortées par l’examen des « survivances », traits de culture apparemment irrationnels, observés chez les peuples « semi-civilisés » ou « civilisés » et conçus comme vestiges de conditions sociales obsolètes, véritables reliques de stades évolutifs antérieurs. Adoptée dès 1866, la notion de survival restera acquise à l’anthropologie tylorienne et plus généralement à l’anthropologie évolutionniste, ainsi qu’aux études britanniques de folklore du dernier quart du XIXe siècle [14].
Malgré l’usage du terme culture dans son acception large et universaliste, reconnaissant les pouvoirs d’élaboration culturelle à tous les groupes humains, les méthodes et hypothèses avancées par Tylor présupposent l’idée d’une échelle hiérarchisée des cultures, établie en fonction du degré de développement. Leur diversité est censée illustrer les différentes étapes d’un processus d’évolution sociale essentiellement uniforme, embrassant l’humanité dans son ensemble et allant de l’état « sauvage », accessible par l’observation des populations exotiques de chasseurs-cueilleurs, à l’état « civilisé » atteint par les sociétés occidentales modernes. Dans les Researches et dans Primitive Culture, Tylor explore les facteurs intellectuels et cognitifs du progrès, en mettant l’accent sur le développement de l’esprit humain. De même que les Researches, Primitive Culture prend en compte les questions méthodologiques, en focalisant l’attention sur les critères de scientificité de la recherche anthropologique et des données empiriques qui en constituent le fondement. Primitive Culture propose en effet, comme les Researches, de vastes corpus de données ethnographiques classées méthodiquement, en fonction de leurs ressemblances. Les deux ouvrages revendiquent l’unité psychique de l’humanité, attestant de son appartenance à une seule et même espèce malgré sa variabilité somatique et culturelle, le caractère foncièrement progressif de l’histoire, l’invention purement humaine du langage et de la civilisation. En démontrant l’origine animiste des pratiques et représentations religieuses, y compris la notion d’un dieu créateur unique, Tylor parachève l’argumentation de ces options théoriques. Primitive Culture souligne enfin que le progrès moral, qui n’avait pas été abordé dans les Researches, accompagne le développement intellectuel et technique.
Tylor s’inscrit ainsi dans le débat anthropologique des années 1860 sur les débuts antéhistoriques de la civilisation, dans lequel s’illustrent, au Royaume-Uni, le naturaliste, préhistorien et ethnologue John Lubbock (1834-1913) et le juriste, historien et ethnologue écossais John Ferguson McLennan (1827-1881) [15]. De même que Tylor, Lubbock et McLennan entendent démontrer le progrès naturel de l’humanité à partir de conditions techniques, intellectuelles et sociales qu’on pourrait reconstituer par la comparaison des populations extra-européennes qualifiées de « sauvages » et « barbares ». Rétrospectivement définies comme « évolutionnistes », les recherches de Lubbock, McLennan et Tylor convergent, malgré leurs écarts et spécificités théoriques, en ce qu’elles interrogent la diversité culturelle pour établir l’origine, les premiers développements et les lois d’enchaînement des phénomènes de civilisation, les peuples exotiques étant censés éclairer le passé des sociétés occidentales. Faisant appel aux canons de la méthode inductive et à une vaste littérature illustrant la variabilité culturelle, les ethnologues de l’époque victorienne revendiquent le statut scientifique de leurs investigations, qui se situent dans un contexte intellectuel caractérisé par la reconnaissance de la haute antiquité de l’homme, le développement de la géologie, la paléontologie et l’archéologie préhistorique, la discussion des théories évolutionnistes de Charles Robert Darwin (1809-1882) et de Herbert Spencer (1820-1903), la remise en cause des conceptions providentialistes de la nature et de l’histoire (Stocking [1987] 1991). Ainsi, tout en proposant des hypothèses développementalistes comparables aux théories du progrès naturel des sociétés élaborées par les philosophes des Lumières, postulant la succession sauvagerie – barbarie – civilisation [16], l’évolutionnisme anthropologique des années 1860 se démarque par l’extension de l’axe temporel assigné à l’histoire culturelle, qui dépasse nettement les chronologies bibliques, et par l’ampleur de sa documentation ethnographique et archéologique (Stocking [1987] 1991). Si Tylor a explicitement nié avoir été influencé par l’évolutionnisme de Darwin et de Spencer (Tylor [1871] 1873 : vii-viii), ses travaux illustrent clairement l’impact des recherches géologiques, paléontologiques et archéologiques attestant la longue durée de la préhistoire et la succession orientée des âges de la pierre et des métaux.
La publication de Primitive Culture valut à Tylor d’être élu à la Royal Society en 1871 et de recevoir le diplôme de Doctor of Civil Law, octroyé honoris causa par l’université d’Oxford en 1875. Après la parution de Primitive Culture, les travaux de Tylor témoignent d’un intérêt croissant pour les institutions de parenté, l’organisation sociale et politique, l’évolution du droit, l’introduction des méthodes statistiques en anthropologie [17]. L’expression la plus achevée de ces nouveaux centres d’intérêt est l’essai « On a Method of Investigating the Development of Institutions ; Applied to Laws of Marriage and Descent », présenté en 1888 à la British Association for the Advancement of Science et publié in extenso dans le XVIIIe volume du Journal of the Anthropological Institute. Soulignant l’exigence d’adopter des méthodes comparables « aux opérations des mathématiques, de la physique, de la chimie et de la biologie » (Tylor 1888b : 245), Tylor étudie les corrélations (dites adhesions (ibid. : 246) qu’entretiennent, dans un échantillon de « trois cents à quatre cents sociétés » (ibid.), les normes réglant le mariage, la résidence, le mode de filiation, l’évitement entre parents par alliance, les comportements de couvade et la « pratique de nommer les parents d’après l’enfant », dite teknonymy (ibid. : 248). La fréquence des « adhésions » entre les institutions étudiées amène Tylor, tout d’abord, à corréler les pratiques de « teknonymie » et d’évitement avec le mode de résidence. Il en déduit ensuite la priorité évolutive des structures matrifocales de la famille, les pratiques de couvade marquant la transition vers les formes patrilinéaires, patrilocales et patriarcales des institutions de parenté. Enfin, il observe les corrélations étroites liant l’organisation dualiste exogame, le mariage des cousins croisés et les terminologies classificatoires de parenté, tout en expliquant l’exogamie comme moyen de réduire la conflictualité entre les premières communautés humaines et d’en assurer la cohésion. Tylor s’inscrit ainsi dans le débat britannique de la deuxième moitié du XIXe siècle sur l’évolution de la famille et des structures sociales et juridiques, caractérisé par les échanges polémiques entre Lubbock, McLennan et le juriste et historien anglais Henry J. S. Maine (1822-1888), ainsi que par la réception des recherches de l’ethnologue américain Lewis Henry Morgan (1818-1881) et de l’historien et juriste suisse Johann Jacob Bachofen (1815-1887) [18].
La période 1871-1888 est également marquée par la publication d’études diffusionnistes [19] et de onze articles pour la neuvième édition de l’Encyclopaedia Britannica, parus entre 1875 et 1886, dont la première entrée de cette encyclopédie entièrement consacrée à l’anthropologie (« Anthropology », 1875) [20]. Tylor approfondit la réflexion sur le développement de la morale, entamée dans Primitive Culture [21], et travaille à la rédaction de guides d’enquête et questionnaires visant à orienter la recherche ethnographique de terrain [22]. Il pratique lui-même l’enquête de terrain en participant aux réunions d’un groupe spirite londonien, en novembre 1872, ainsi qu’en visitant les Indiens ojibwa du lac Huron et les Indiens pueblo de l’Arizona et du Nouveau-Mexique, en 1884. Tylor n’était pas novice dans l’observation directe et intentionnelle de ses objets d’investigation, ayant consacré plusieurs mois, au début des années 1860, à l’étude du langage gestuel des sourds-muets, auprès du Königlichen Taubstummenanstalt de Berlin [23].
En 1881, il publie Anthropology : An Introduction to the Study of Man and Civilization, ouvrage proposant un état des lieux des acquis, objets et problématiques de recherche anthropologiques. Tylor passe en revue tous les domaines de la discipline, qu’il entend présenter à un large public : préhistoire, « histoire naturelle » de l’homme et de ses « variétés », origine et développement du langage, des connaissances, des techniques et des arts, des institutions sociales, de la religion, du droit et de la morale. Anthropology atteste ainsi d’une conception large des enjeux disciplinaires, allant de l’anthropologie physique aux études de parenté et montre que les faits de culture, comme les faits biologiques, sont justiciables d’une approche scientifique. Dans le même temps, cet ouvrage illustre l’ampleur des intérêts et des lectures de Tylor, couvrant des domaines de recherche aussi variés que les méthodes de classification des races et la civilisation matérielle.
Après la publication d’Anthropology et suite à l’acquisition de la collection Pitt Rivers, l’université d’Oxford, en 1883, nomma Tylor conservateur de l’Oxford University Museum of Natural History et maître de conférences en anthropologie. Il s’occupera de la collection Pitt Rivers jusqu’en 1902, contribuant à son enrichissement. Tylor sera nommé professeur en 1895, dans une chaire d’anthropologie créée pour lui par la même université. La culture matérielle et les techniques compteront parmi les sujets de recherche et d’enseignement des années oxoniennes [24].
Avant qu’il ne fût élu professeur, Tylor donna deux séries de dix conférences à l’université d’Aberdeen, dans les années 1889-1890 et 1890-1891, qui furent parmi les premières Gifford Lectures [25]. La matière de ces conférences, réélaborée pendant les dix années suivantes, aurait dû donner lieu à un ouvrage portant le titre Natural History of Religion. Ce texte ne fut jamais achevé, le dernier livre de Tylor restant Anthropology [26]. Les publications des années 1890 attestent de l’intérêt constant de Tylor pour les processus de diffusion [27], ainsi que d’un retour réflexif sur les notions et théories qu’il avait élaborées [28].
Tylor annonça sa retraite en 1909 et quitta Oxford en 1910. Il poursuivit ses activités de recherche jusqu’à publier, en 1910, une version révisée de son article « Anthropology » pour l’Encyclopaedia Britannica (Tylor [1875] 1910). Ses principaux traités furent plusieurs fois réédités de son vivant et firent l’objet de traductions en différentes langues : les Researches, traduites en allemand en 1866, furent rééditées en 1870 et 1878 [29] ; Primitive Culture, réédité en 1873, 1891, 1903, 1913, fut traduit en russe en 1872, en allemand en 1873, en français dans les années 1876 et 1878, en polonais dans les années 1896 et 1898 [30]. Les rééditions des Researches et de Primitive Culture furent l’occasion de mises à jour ethnographiques et théoriques, permettant à Tylor de prendre en compte les développements contemporains de la recherche de terrain et du débat anthropologique, y compris sur les pratiques et représentations de couvade [31].
Tylor contribua non seulement à la définition des objets, problématiques, concepts et théories anthropologiques, mais aussi au processus d’institutionnalisation de sa discipline. Il participa activement à la vie des sociétés savantes ethnologiques et anthropologiques : il présenta des communications à l’Ethnological Society of London dès 1862 et fut membre, dès 1863, de l’Anthropological Society of London. Ayant quitté l’Anthropological Society, il rejoignit l’Ethnological Society en 1867 et contribua à la fusion des deux sociétés, en 1871, dans l’Anthropological Institute of Great Britain and Ireland. Tylor fut président de l’Anthropological Institute dans les années 1879-1880, 1891-1892. Membre de la British Association for the Advancement of Science dès 1865, il participa à la création, en 1884, d’une section anthropologique au sein de cet organisme. Premier président de la section « H. Anthropology » de la British Association, Tylor fut également vice-président de la Folk-Lore Society de 1880 à 1891 [32]. En 1905, il devint membre du Committee for Anthropology, responsable de l’organisation des enseignements et examens pour le nouveau diplôme d’anthropologie de l’université d’Oxford, institué pendant la même année [33].
Parmi les sociétés savantes et clubs où Tylor fut élu on compte la Somerset Archaeological and Natural History Society, l’Oxford Natural History Society, l’Athenaeum Club, le Century Club (Petch 2012a), le Philosophical Club (Cantor 2005 : 121), la Philological Society (Atherton 2010 : 64) et l’Oxford University Anthropological Society, dont Tylor fut président honoraire en 1909 (Parkin 2007 : 139, 141). Nommé professeur émérite en 1910, il fut anobli en 1912 et mourut le 2 janvier 1917 à Wellington (Somerset) [34]. Sa femme lui survécut jusqu’en 1921.
Tylor fut considéré, de son vivant, comme l’un des « fondateurs » de l’anthropologie, un statut que la mémoire disciplinaire n’a jamais remis en cause. Il est surtout connu, de nos jours, pour ses notions de « culture » et d’« animisme », ainsi que pour sa conception évolutionniste et intellectualiste du développement culturel, axée sur l’analyse des facteurs cognitifs [35]. Néanmoins, comme nous l’avons vu, ses travaux illustrent son intérêt pour les processus de diffusion, la civilisation matérielle et les techniques, les caractères somatiques de l’homme, les institutions sociales et juridiques, l’anthropologie de la famille et de la parenté. Qualifié de « navigateur de livres » [36] pour son usage de données comparatives empruntées à une vaste littérature, sa biographie montre qu’il pratiqua aussi l’observation directe. Ayant voyagé en Europe, en Afrique septentrionale, en Amérique centrale et septentrionale, maîtrisant plusieurs langues vivantes, son expérience de l’altérité culturelle aura été plus complexe qu’une confrontation purement érudite à la variabilité de l’homme social, comme le souligne l’historien Efram Sera-Shriar (2013 : 155ss).
RÉSUMÉ :
Edward Burnett Tylor est né à Camberwell (Surrey) le 2 octobre 1832. Premier titulaire d’une chaire d’anthropologie au Royaume-Uni, il sera nommé maître de conférences (1883) puis professeur (1895) à l’université d’Oxford. Son ouvrage le plus connu, Primitive Culture, fut publié en 187
1. Par l’analyse comparative d’un vaste corpus de données ethnographiques, embrassant l’humanité dans son ensemble, ce traité vise à éclairer les origines et le développement progressif de la culture, définie comme « ce tout complexe comprenant les connaissances, les croyances, les arts, la morale, le droit, les coutumes et toute autre aptitude ou disposition habituelle acquise par l’homme en tant que membre d’une société ». Tout en accordant la priorité au développement des représentations religieuses, Primitive Culture prend également en compte la pensée mythique et les rites, la genèse du langage et l’évolution de la morale, le développement des techniques et de la civilisation matérielle. Parmi les nombreux centres d’intérêt de Tylor, documentés par l’ensemble de ses publications, figurent aussi la pensée et les pratiques magiques, les institutions sociales et juridiques, l’anthropologie de la famille et de la parenté. Surtout connu pour sa conception évolutionniste du développement culturel, Tylor s’intéressa également aux processus de diffusion et aux méthodes et critères de scientificité du comparatisme anthropologique. Parmi ses nombreuses publications on retiendra, outre Primitive Culture, l’article « On a Method of Investigating the Development of Institutions ; Applied to Laws of Marriage and Descent » (1888) et les ouvrages intitulés Anahuac : Or Mexico and the Mexicans, Ancient and Modern (1861), Researches into the Early History of Mankind and the Development of Civilization (1865), Anthropology : An Introduction to the Study of Man and Civilization (1881). Tylor mourut le 2 janvier 1917 à Wellington (Somerset).
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