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International Encyclopaedia
of the Histories of Anthropology

La Revue des traditions populaires. Historique

Claudie Voisenat

IIAC-LAHIC, Ministère de la culture, Paris

2007
To cite this article

Voisenat, Claudie, 2007. « La Revue des traditions populaires. Historique », in BEROSE International Encyclopaedia of the Histories of Anthropology, Paris.

URL BEROSE: article218.html

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Published as part of the research theme “Networks, Journals and Learned Societies in France and Europe (1870-1920)”, directed by Claudie Voisenat (Ministère de la Culture, Héritages) and Jean-Christophe Monferran (CNRS, Héritages)

La Revue des traditions populaires, fondée par Paul Sébillot, est l’organe de la Société des traditions populaires créée en 1885. Le premier numéro de la RTP sort à Paris, le 25 janvier 1886, chez Maisonneuve Frères et Ch. Leclerc, 25 quai Voltaire.
Le numéro coûte 1 franc, mais la revue est adressée gratuitement aux membres de la Société des traditions populaires. Faisant le constat du retard pris en France par les recherches sur les traditions populaires, beaucoup plus développées dans les autres pays européens où « certains collecteurs de contes étaient regardés par leurs concitoyens comme des écrivains nationaux au premier chef », la revue veut s’attacher à l’étude des traditions populaires ou démologie. En dépit d’un certain flottement dans la dénomination de ce qui veut apparaître comme une nouvelle discipline, les principales matières de ces études sont clairement identifiées et se ramènent à six groupes principaux :
— La littérature orale
— Les jeux et les divertissements
— L’ethnographie traditionnelle
— La linguistique, en tant qu’elle se rapporte aux légendes et aux coutumes
— Les arts populaires
— Les productions littéraires envisagées dans leurs rapports avec les récits et les croyances du peuple.

On voit ainsi apparaître dès le départ toute l’ambiguïté du projet. Le nouveau champ d’études (celui des traditions populaires) qui se veut également une nouvelle discipline (la démologie), met allègrement sur le même plan (dans le classement de ses six matières principales) des productions culturelles (contes, légendes, œuvres d’art voire œuvres littéraires...) qui constituent son objet même, et des approches disciplinaires (ethnographie, linguistique) qui proposent des méthodes et des concepts pour les appréhender. Bref, dès sa définition, le projet révèle une certaine confusion.
Le projet est aussi biaisé par son héritage romantique et son goût pour le pittoresque : “Nous essayerons, tout en restant scientifiques, de montrer au public que les traditions populaires, souvent amusantes et charmantes, sont presque toujours naïves et poétiques”.

Il est vrai que la revue apparaîtra souvent comme un joyeux fourre-tout sur lequel viennent trancher les articles de son fondateur Paul Sébillot, les enquêtes qu’il cherche à initier et les contributions d’un petit groupe de fidèles dont Loys Brueyre...
Ce caractère éclectique lui sera d’ailleurs reproché par les revues concurrentes, Mélusine par exemple, mais également par certains membres de la société, tels Henry Carnoy, Émile Blémont, Charles Vicaire... qui la quitteront rapidement pour aller fonder La Tradition, revue illustrée du folklore et des sciences qui s’y rattachent, contenant la bibliographie des provinces. Mais, malgré les ambitions scientifiques qu’elle affichait, cette revue dissidente ne fut jamais “qu’une contrefaçon plus littéraire” [1] de la RTP. Celle-ci eut d’ailleurs le mérite de s’ouvrir à de nouveaux talents et aux bouleversements qui s’annonçaient en accueillant les premiers articles d’Arnold Van Gennep.

Paul Sébillot dirigera la revue jusqu’à sa mort en 1918, même si son nom n’apparaissait plus alors sur la couverture. En 1919, la Revue des traditions populaires fusionne avec la Revue d’ethnographie et de sociologie fondée par Arnold Van Gennep et devient la Revue d’ethnographie et des traditions populaires qui publiera 10 volumes, de 1920 à 1929.




[1Selon les termes d’Arnold Van Gennep dans la Bibliographie de son Manuel de Folklore français contemporain, p. 123.