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Encyclopédie internationale
des histoires de l’anthropologie

Carlos Castaneda chez les anthropologues. De la fécondité des supercheries

Bernard Traimond

CEMMEC, Université de Bordeaux

2019
Pour citer cet article

Traimond, Bernard, 2019. « Carlos Castaneda chez les anthropologues. De la fécondité des supercheries  », in Bérose - Encyclopédie internationale des histoires de l'anthropologie, Paris.

URL Bérose : article1648.html

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« Quand Carlos Castaneda raconte “des trucs” – me disait en français en 1995, une de ses amies américaines –, on ne sait si c’est vrai ou non. » Rien dans sa vie comme dans son œuvre n’échappe à ces ambiguïtés. Pensons que sa nécrologie publiée dans l’Anthropology Newsletter de l’American Anthropological Association du 6 septembre 1998 le faisait naître le jour de Noël 1925 à São Paulo (Brésil) ou à Cajamarca (Pérou). Christophe Bourseiller avance quant à lui la date du 25 décembre 1926 dans cette dernière ville (2005 : 26). Nul ne saurait lever ces incertitudes même si nous disposons d’une abondante littérature : outre ses propres ouvrages, on compte aussi ceux de ses disciples, des « dévots », tout comme ceux de ses critiques. Toute cette activité éditoriale est à prendre en considération pour expliquer le contexte de ses succès. En outre, aux sources écrites s’ajoutent des informations orales, des témoignages pouvant compléter ou contredire l’analyse des textes [1]. Castaneda apparaît en effet comme une figure singulière dans l’anthropologie par ses succès éditoriaux – ses livres ont été traduits dans 17 langues (est-il écrit) et vendus à des milliers d’exemplaires – qui occultent d’autres aspects. S’il a eu d’ardents défenseurs, il a eu aussi de terribles ennemis dont Richard De Mille (1922-2009), neveu du célèbre cinéaste et adepte de l’église de scientologie, qui fut certainement le plus offensif. Faute d’informations totalement fiables, j’insisterai essentiellement ici sur le contexte de la production de ses travaux et tenterai de comprendre les logiques et les effets de ces dynamiques contradictoires qui ont agité l’anthropologie à la fin du XXe siècle, et pas seulement sur ses marges. Qui pourrait dire qu’elles ont cessé de troubler la discipline ?

L’époque psychédélique, 1960-1970

L’œuvre de Castaneda ne peut se comprendre que dans le contexte historique de la mode de la consommation de champignons hallucinogènes des années 1969 et 1970 dans les pays occidentaux. Parmi ceux qui affirmaient son originalité et son intérêt, un Français, Robert Heim (1900-1979), directeur du Museum d’histoire naturelle de Paris, membre de l’Académie des Sciences, allait lui aussi y chercher des champignons hallucinogènes (Heim, Wasson 1958). Également, sans surprise après les difficultés qu’il avait rencontrées aux États-Unis, un des leaders « psychédéliques » de cette époque, Timothy Leary (1920-1996) s’installe à Zihuatanejo, à l’époque gros village de la côte pacifique en face de la Californie mexicaine (disposant d’un aéroport). Que viennent-ils chercher au Mexique outre la mer, un faible coût de la vie, et pour certains, la nécessité d’échapper aux poursuites policières ?

En premier lieu, s’est mis en place à cette époque, pour la première fois semble-t-il, ce qu’on appellera le « tourisme médical » – aujourd’hui toujours aussi actif comme le montrent les formes qu’en ont étudiées récemment Jean-Loup Amselle (2013) ou Nadège Chaboz (2016) qui nous indiquent que les lieux se sont déplacés dans l’Amazonie péruvienne autour d’une plante hallucinogène, l’ayahuasca, ou au Gabon avec l’iboga. Dans les années 1960, ce courant touristique et thérapeutique se focalisait dans la région d’Oaxaca au Mexique autour d’une guérisseuse dont les mémoires ont été publiées et même traduites en français, Maria Sabina (Sabina 1994). Gordon R. Wasson, un banquier américain amateur de champignons, l’avait « découverte » en 1955.

En second lieu, apparaît un intérêt croissant pour les champignons hallucinogènes comme le révèle l’article de Lévi-Strauss publié dans L’Homme en 1970 et repris dans Anthropologie structurale II en 1973 : « Les champignons dans la culture », compte rendu d’un ouvrage de Wasson, personnage clef des pérégrinations en question. S’est ainsi instaurée une espèce d’« ethnomycologie » qui pouvait s’inscrire dans de larges espaces mais aussi dans de curieux domaines. Les champignons devenaient un objet d’étude anthropologique bien loin des « lactères délicieux » que Lévi-Strauss devait être le seul à cueillir dans les Landes à l’automne 1932 alors que les gens du cru ne ramassaient que des cèpes – ou à la rigueur, selon les zones, des girolles (moserilhas en occitan) ou des tricholomes équestres (boriu ou bidau, également en occitan), ainsi qu’il l’a raconté à Sylvie Licard (2008).

Maria Sabina le dit elle-même : « Avant Wasson, personne ne prenait de champignons pour trouver Dieu. On les avait toujours pris pour soigner des malades » (Sabina 1994 : 83). Ainsi, un vaste mouvement prenait prétexte d’une pharmacopée dite « traditionnelle » pour la plier aux désirs occidentaux du moment. Dès 1954, après et avant beaucoup d’autres, le livre Les portes de la perception (The Doors of Perception) d’Aldous Huxley (1894-1963) relatait des expériences d’ingestion de différents produits utilisés par des Amérindiens. Il y décrit les transformations de ses propres perceptions après la prise de substances hallucinogènes, comme celles qu’utilisent des habitants de ces lieux. Lui-même les considérait comme le moyen d’accéder à de nouvelles expériences et surtout à « d’autres mondes ».

C’est alors qu’apparaît justement la mode des drogues exotiques. Non qu’elles fussent inconnues antérieurement (opium, cocaïne...), mais elles se popularisaient en particulier avec l’usage du cannabis et l’apparition, avant bien d’autres, d’un produit synthétique, le LSD. Dans un article joint aux mémoires de Maria Sabina, Wasson nous dit que « deux psychologues, Timothy Leary et Richard Alpert, ont pris le champignon et ont connu l’expérience dans toute son ampleur » (Sabina 1994 : VII). Ces deux chercheurs de l’université Harvard furent les promoteurs du LSD dont ils voulaient faire une thérapie sociale et un instrument de « libération intérieure ». En 1965, en France, ces objectifs furent présentés sous un jour favorable dans une revue aujourd’hui disparue, Planète (dont le directeur était Louis Pauwels avant qu’il devienne celui du Figaro Magazine) par Jacques Mousseau qui dirigera la diffusion de la chaîne de télévision française TF1. Marque de l’époque, il présentait positivement l’usage de certaines drogues (Mousseau 1965).

Ce mouvement s’inscrivait dans le courant psychédélique en pleine expansion dans le monde anglo-saxon, relayé par divers vecteurs dont des chanteurs comme les Beatles avec leur album Sergent Pepper’s Lonely Hearts Club Band (Bigot 1996). Il était né à l’université Harvard où des psychologues, dont Leary, préconisaient la consommation de LSD. Exclus de l’université en 1963, ils lancent l’IFIF (International Federation for Internal Freedom) installée durant les étés 1962 et 1963 au Mexique, à Zihuatanejo, avant leur expulsion du pays. Plus généralement ces expressions s’inscrivaient dans la tendance de fond qu’on a appelé la « contre-culture », aux multiples facettes, littéraires avec les écrivains de la « beat generation », politiques avec les mouvements contre la guerre du Vietnam ou les Blacks Panthers, artistiques avec les productions « underground », musicales avec la musique psychédélique... L’air du temps apporte son lot d’innovations dans les domaines les plus divers, y compris en anthropologie.

L’irruption Castaneda

C’est dans ce contexte auquel Castaneda lui-même ne pouvait échapper – selon Leary, Castaneda avait tenté de le rencontrer à Zihuatanejo au printemps 1963 – qu’il arrive aux États-Unis en 1951. Il poursuit des études d’anthropologie à l’université de Californie à Los Angeles, en particulier auprès d’Harold Garfinkel dont il suit les séminaires. L’inventeur de l’ethnométhodologie s’inscrivait dans la tradition phénoménologique par le truchement d’Alfred Schütz, voire de la lecture de Sartre, et notamment de L’Être et le Néant traduit en 1956. Il s’intéressait en particulier aux façons dont les individus verbalisaient leurs pratiques. D’ailleurs, dans A Separate Reality : Further Conversation with don Juan (Voir), Castaneda dit suivre « une méthode phénoménologique » (Castaneda 1973 : 22).

Ce dernier propose alors un manuscrit, A Yaqui Way of Knowledge (L’herbe du diable et la petite fumée) à la prestigieuse University of California Press qui, comme l’a raconté son directeur de l’époque, August Frugé, a reçu un accord favorable du comité éditorial bien que le manuscrit fût « peu ordinaire » (Frugé 1993 : 148). Publier dans une telle maison assure en 1968 une évidente notoriété. La critique sera également favorable. Un compte rendu paraît dans la New York Review of Books du 5 juin 1969, alors au faîte de sa renommée, signé par Edmund Leach en personne. Selon ses habitudes, le maître de Cambridge joue sur l’ambiguïté en alternant éloge et dénonciation. En particulier, après l’avoir comparé avec une supercherie notoire que seuls les lecteurs informés pouvaient comprendre (« dans cette philosophie, quelle est la part de don Juan et celle de Castaneda dégurgitant le Livre des révélations ? »), il termine en affirmant que « le livre de Castaneda n’est certainement pas complètement une mystification, mais si cela avait été le cas, il aurait pu ne pas être très différent » (cité dans Noël 1989 : 41). Qu’importe, malgré ses ambiguïtés, ce compte rendu a participé au succès du livre en lui accordant une caution académique supplémentaire. Castaneda soutint sa thèse trois ans plus tard et, durant dix ans, jusqu’en 1978, tous ses livres reçurent un accueil enthousiaste de l’American Anthropologist, l’illustre revue américaine.

Non seulement il reprenait des thèmes à la mode, le Mexique, les drogues, il proposait des objets relativement nouveaux, l’accès à un au-delà (« le mysticisme est à la mode », disait Leach) mais surtout, il les présentait par le truchement de la parole de ses locuteurs, du « peuple ». Ce n’était pas l’observateur qui découvrait des conceptions « spirituelles » mais l’indigène qui proposait à l’anthropologue les moyens d’accéder à un autre monde. Castaneda recueillait le « discours d’en bas » – dans la veine du Dieu d’eau de Griaule traduit en anglais en 1965 et qu’il avait lu –, afin de mettre au jour les conceptions indigènes pour les sociétés du « Nord ». L’enquêteur devenait « apprenti ». C’est ce qui sera retenu de son travail par les anthropologues, surtout dans un premier temps. Ce type de projet exigeait une nouvelle écriture. Même s’il reprend de Malinowski, et plus généralement des Britanniques, l’usage du « je », Castaneda présente les paroles et les choses telles qu’il les a perçues, même quand il ne les comprenait pas, comme l’a remarqué Paul Riesman (cité in Noël 1989 : 52). Il démontait ainsi le point de vue autoproclamé « scientifique », unique et omniscient, à la limite « divin », enfin abandonné au profit du témoignage de l’enquêteur qui relève aussi fidèlement que possible les paroles de ses interlocuteurs. Enfin, Castaneda n’étudie qu’un seul individu, don Juan Matus, un Amérindien yaqui. Il présente ses discours et ses conceptions qu’elles soient ou non partagées par d’autres. Dès lors, le résultat ne peut découler que de rencontres, d’interactions, chacun des protagonistes contribuant au comportement et aux propos de l’autre. Il s’arrimait à l’échelle microscopique.

Après d’autres, Castaneda affirmait à sa façon l’importance et l’autorité de la parole indigène, la nécessité de privilégier les discours des autres, de « sortir de notre propre culture » comme le dit Paul Riesman (cité in Noël 1989 : 50), et surtout de ne pas nous poser, par différentes procédures, comme supérieurs. Pour Castaneda, le savoir et le pouvoir de don Juan l’emportaient sur ceux de quiconque, point de vue qui évidemment valait pour tous les autres, partout et toujours. L’anthropologue cessait d’être l’« observateur » des autres pour devenir leur « greffier », le transcripteur de leurs paroles.

Le succès

Depuis A Yaqui Way of Knowledge en 1968 (L’herbe du diable et la petite fumée), tous les livres de Castaneda ont connu un succès mondial comme A Separate Reality : Further Conversation with don Juan (Voir) en 1973, A Journey to Ixtlan (Voyage à Ixtlan, sa thèse) en 1974, The Eagle’s Gift (Le don de l’aigle) [2]. Si le premier fut publié en France par le Soleil noir, les suivants ont paru chez Gallimard. Le succès éditorial était tel qu’il lui assurait de pouvoir vivre de ses écrits, fait très rare pour un auteur de sciences sociales. Ce retentissement est d’autant plus remarquable que, dans un premier temps, et non sans d’inévitables nuances, il reçut une approbation, sinon unanime, du moins massive du monde académique (Traimond 2000 : 86-87). L’article de Paul Riesman (1938-1988) publié dans la New York Review of Books du 22 octobre 1972 présente ainsi une série d’arguments en faveur des trois premiers livres de Castaneda. Il faut souligner que cet anthropologue américain qualifie la deuxième partie du premier livre consacrée à une analyse structurale, d’« atroce ». Il avait en effet soutenu sa thèse en France sur les Peuls sous la direction de Georges Balandier et l’avait publiée en 1974 dans la collection des « Cahiers de l’homme », Société et liberté chez les Peul Djelgôbé de Haute-Volta. Outre le sous-titre, Essai d’anthropologie introspective, son livre se divisait en deux parties, la première consacrée aux « structures de base de la société peule », la seconde à « ’la vie’ vécue », afin de « confronter deux méthodes ethnologiques ». Mais Riesman affirme n’être pas parvenu à réaliser ce projet par incapacité à se dédoubler. Il en conclut qu’il ne faisait que rendre compte « de la rencontre d’un homme appartenant à la civilisation occidentale, et hanté par les questions que lui pose la vie quotidienne dans cette civilisation, avec une civilisation radicalement différente... » (Riesman 1974 : 14). N’était-ce pas l’exact projet de Castaneda avec le Yaqui don Juan ?

En dénonçant les maladresses mais surtout le principe même de la démarche structuraliste qui, au lieu d’étudier le détail des paroles de l’Amérindien, choisit de s’appuyer sur « le fait qu’elles paraissent systématiques et cohérentes » (Riesman cité in Noël 1989 : 52), Riesman propose une autre anthropologie : « L’analyse structurale est donc un déni pathétique de la réalité des expériences présentées dans la première partie du livre et se révèle ainsi exemplaire de l’arrogance et de la peur de la plupart d’entre nous, anthropologues occidentaux, qui faisons comme si nous connaissions la réalité, tandis que les autres cultures n’en auraient que des versions approximatives. » Il faut donc faire autre chose. Et les premiers ouvrages de Castaneda illustrent l’importance des paroles indigènes et la nécessité de réaffirmer un indispensable relativisme. Telles sont les principales raisons qui expliquent l’approbation qu’il rencontre jusqu’en 1976, pour chacun de ses livres, dans la revue American Anthropologist.

Mais cette même année paraît le premier livre de Richard De Mille, Castaneda’s Journey. The Power and the Allegory. Non seulement il accuse Castaneda de supercherie mais il arrive à retourner la corporation des anthropologues, au point que Castaneda est exclu de la puissante American Anthropological Association, ce qui lui causera, selon un témoin, un grand dépit. La suite des événements ne fera que renforcer la suspicion désormais installée. Non seulement en 1980 Richard de Mille publie un nouveau livre encore plus volumineux, The Don Juan Papers. Further Castaneda Controversies, mais surgit peu après l’« affaire Donner ». Florinda Donner (1944- ) est l’auteure en 1982 d’un livre sur les Yanomami, Amérindiens du Vénézuela étudiés par Jacques Lizot, Napoléon Chagnon et bien d’autres, intitulé Shabono : A visit to a Remote and Magical World in the Heart of the South American Jungle, immédiatement traduit en français par Sophie Mayoux. Une très courte préface de Castaneda, moins d’une page, affirme que le livre « est un chef-d’œuvre » car il rend compte d’une expérience, présente une réalité difficilement accessible et ce, de façon artistique. Le livre est très mal accueilli par les anthropologues. Ainsi dans la livraison de l’American Anthropologist de septembre 1983, Rebecca B. de Holmes relève les emprunts au livre d’Ettore Biocca, Yanoama (publié en français dans la collection « Terre humaine »), signale qu’aucun Vénézuelien n’a vu l’auteure sur place et que le bureau qui délivre les permis d’accéder aux zones indigènes ne lui en a jamais accordé. Le débat est repris de façon synthétique par Mary Louise Pratt dans le texte publié dans le célèbre volume Writing Culture de 1986.

Mais cette préface ne constitue pas le seul lien entre Florinda Donner et Castaneda. Sans entrer dans les détails que nous donne Christophe Bourseiller, précisons qu’elle participe à tous les projets de l’anthropologue aussi délirants soient-ils, parfois sous le nom de Régine Thal. Elle va jusqu’à disparaître dès le jour de sa mort (Bourseiller 2005 : 229). À partir de 1976, nous dit Bourseiller, Castaneda s’était en effet consacré à la mise en place d’ateliers où il initiait des « apprentis » à des savoirs et des techniques ésotériques. En outre, il avait constitué autour de lui un « harem » de « sorcières » (Bourseiller 2005 : 194). En un mot, tout cela ressemblait davantage à une démarche sectaire que scientifique. Les derniers temps, il s’est consacré avec ses disciples aux « arts martiaux précolombiens ». Tous ces aspects présentent peu d’intérêt si l’on néglige l’essentiel, l’important apport de Castaneda au développement de l’anthropologie académique.

L’effet Castaneda

Dans sa recension, Paul Riesman affirmait qu’il représentait une certaine anthropologie contre une autre. Partons de son propos selon lequel l’analyse structurale de la seconde partie de L’herbe du diable et la petite fumée « est atroce ». Il serait possible d’accuser l’incompétence de Castaneda, mais Riesman propose deux autres explications plus fécondes. La deuxième partie du livre contredit la première qui ne faisait que reprendre les propos de don Juan ; d’autre part, faire rentrer le « discours naturel », celui de tous les jours, dans une problématique et des catégories préconstruites ne conduit ni à comprendre les propos examinés et les conduites des personnes étudiées, ni à justifier les montages extérieurs. Riesman en conclut à la nécessité de privilégier les « expériences », tant celles des locuteurs que celles de l’enquêteur. Reste, en aval, à choisir les techniques d’interprétation des paroles, herméneutiques, pragmatiques ou autres... L’essentiel réside dans les propos des locuteurs même si nous les suscitons, les modifions, les transcrivons, les traduisons, les écrivons, chacune de ces opérations conduisant à les transformer de manière irréversible. Pour Riesman, la besogne des anthropologues consiste à mettre au jour les propos de leurs locuteurs. Quand en 1947, Griaule s’était fait le porte-parole d’Ogotemmêli, il permit au « discours naturel » de parvenir au cœur des préoccupations des anthropologues. La réussite la plus évidente dans ce registre, plus de trente ans plus tard, est évidemment Tuhami de Vincent Crapanzano (1980) que son auteur avait annoncé par le « portrait » de Navajos, The Fifth World of Enoch Maloney en 1969. Rencontre, influence ou « atmosphère intellectuelle », ces deux livres adoptent bien des aspects de la démarche de Castaneda : l’étude des savoirs d’une seule personne, la transcription chronologique des dialogues entre la personne étudiée et son interlocuteur, l’attention portée au détail de leur propos. Le locuteur propose des informations sur le monde naturel et humain auquel il accède mais il se confie également sur les aspects les plus intimes de son existence. Il présente ainsi les facettes les plus cachées de sa vie personnelle, celles qui restent généralement secrètes ou qui ne sont dévoilées que dans des circonstances exceptionnelles, en particulier par les enquêtes de police. En fait, le héros de Castaneda, don Juan, se trouve à mi-chemin entre Griaule qui amène Ogotemmêli à lui présenter des savoirs ésotériques des Dogon et Crapanzano qui fait parler Tuhami de sa vie intime, même si le lecteur peut élargir cette singularité à des domaines plus généraux.

Pourtant, contrairement aux autres, Tuhami n’est le porte-parole de personne sauf de lui-même. Crapanzano ne présente que le portrait d’un Marocain alors que Castaneda parle, pour sa part, d’une « voie yaqui de la connaissance », titre américain de son premier livre, érigeant don Juan en représentant d’une « culture » ou en tout cas d’un type de connaissance partagée. Dans les deux cas cependant, les enquêtes veulent donner la parole à un individu dans sa singularité. Le recueil de ses propos constitue l’essentiel de la démarche dans laquelle seul le je est utilisé, tant par l’enquêteur que par le locuteur. Le « nous » académique ou collectif ou le « il » indirect ont disparu.

Sont ainsi proposées d’autres formes d’écriture de l’anthropologie hors des monographies et traités canoniques. La forme adoptée est celle du compte rendu d’enquête selon l’ordre chronologique : « Je vais faire de l’histoire, de l’historicité de l’enquête elle-même une voie de compréhension de cet univers », disait Gérard Althabe (Traimond 2012 : 88). Cette attitude ruine évidemment tout recours à la causalité puisque les informations apparaissent selon l’ordre de leur expression et non selon des relations causales imaginées par l’auteur. En même temps se trouvent mis à mal quelques paradigmes posés implicitement par les formes antérieures tels que la totalité, les déterminations de certaines instances par d’autres ou plus simplement, les relations de cause à effet comme je l’ai déjà noté. Cette écriture devient une épistémologie. Les informations se juxtaposent sans interférer explicitement les unes sur les autres. Seul le lecteur peut, selon son goût, amalgamer, lier, croiser, induire, et ce à ses risques et périls, alors que l’enquêteur ne fait que transcrire et transmettre la parole indigène, expression d’une réalité à laquelle il nous fait accéder.

Pour Castaneda, il s’agit de voies conduisant « à un état de réalité non ordinaire » c’est-à-dire qu’il s’agit de se mettre à la recherche d’un au-delà spéculatif ou mystique qui va dans une direction et porte sur un objet inacceptable pour un chercheur [3]. Grossièrement, je vois quatre usages différents de ses livres : le premier légitime l’usage de drogues exotiques ; le second en fait une utilisation mystique, un chemin à suivre pour accéder à une réalité transcendantale ; le troisième y trouve une attention au discours indigène permettant d’en recueillir toute la richesse et toute l’autorité ; enfin, en quatrième lieu, il fait de l’enquête un instrument de connaissance. Si les anthropologues que j’invoque écartent les deux premiers types de lecture aspects pour les réserver à ceux que j’appelle les « dévots », ils n’en ont pas moins gardé, consciemment ou pas, les deux derniers.

Même si cette mise au jour de ces « savoirs assujettis » (Foucault 1997 : 8), de ces « savoirs non sus » (Certeau 1980) se trouvait déjà dans le programme de Franz Boas et de bien d’autres, largement abandonné par le structuralisme, elle redevient avec Castaneda une des tâches de l’anthropologie. L’invocation de Foucault et de Certeau, décédés le premier en 1984, le second en 1986, désigne non seulement un objet d’étude mais aussi une démarche. Il ne s’agit plus d’inclure les paroles de nos locuteurs dans de grands récits préconstruits ou, pire, de les prendre comme prétexte pour imposer nos propres conceptions aussi généreuses soient-elles, mais au contraire de donner à voir ces autres façons de représenter le monde. De la même manière que les historiens se battent contre les anachronismes, les anthropologues devraient s’opposer à toute tentative d’annexer les autres points de vue aux nôtres, qu’ils soient proches ou éloignés de nous, même si paroles et écritures autorisent une communication minimale, en tout cas un « langage commun ». Au lieu de coloniser leur langage, il vaudrait mieux en faire le truchement pour accéder à leurs manières de penser et agir.

Dès lors, il devient possible d’inscrire Castaneda dans ce courant anti-structures (qu’on fasse des structures des invariants ou d’autres choses) pour affirmer que les processus d’enquête, les relations aux locuteurs et la poétique utilisée deviennent désormais essentiels. Évidemment, il n’était pas le seul. Outre les grands ancêtres (Malinowski, Evans-Pritchard...), plusieurs anthropologues ont préféré décrire des situations concrètes – Oscar Lewis [4], Gérard Althabe ou Jeanne Favret-Saada – plutôt que d’inscrire certaines informations dans des récits préconstruits. Le fameux combat de coqs de Clifford Geertz commençait par la description d’une scène concrète d’où découleront ses analyses postérieures (Geertz 1983 : 165). Remarquons que cet article ainsi que le fameux « Thick Description », premier chapitre de The Interprétation of Cultures, ont été publiés la même année, 1972, avant d’être réunis en volume l’année suivante. Il est possible de les lire comme une rupture avec les travaux antérieurs de Geertz qui s’inscrivaient soit dans l’examen d’une grande question (la religion, le pouvoir), soit dans le cadre d’une monographie de village selon le genre bien établi dès 1930, même s’il affirme en présenter « une image dispersive » (Geertz 1983 : 8). Désormais le point de départ de Geertz sera des situations, c’est-à-dire des relations personnelles entre l’enquêteur et ses locuteurs. Castaneda, et avec lui « l’air du temps », seraient-ils passés par là ?

Supercherie

Pourtant la question reste, insistante : le Yaki don Juan Matus a t-il existé ou est-il né de l’imagination féconde de Castaneda ? En resituant ce dossier dans une perspective d’histoire de l’anthropologie et en examinant les « vrais » effets d’un faux éventuel, je m’abstiens de poser la question d’autant que la réponse est évidemment difficile à établir. En outre, les supercheries peuvent jouer un rôle analogue à celui des textes authentiques tant qu’elles ne sont pas perçues comme telles. D’ailleurs, pour chercher à dénoncer une escroquerie, il faut bien y trouver quelque intérêt ne serait-ce qu’intellectuel. De plus, toute supercherie naît d’un contexte précis et répond à un besoin. « Rien n’est plus conformiste qu’un faux » car il ne peut pas susciter la méfiance, son crédit ne pouvant venir que de l’approbation des lecteurs et des utilisateurs. En l’occurrence, l’autorité des livres de Castaneda vient de leur conformité aux normes dominantes de la période que j’ai sommairement présentée plus haut. Le retournement de l’American Anthropological Association peut s’expliquer par la prise en compte des critiques de De Mille auquel elle ouvre ses pages en mars 1979 mais, certainement, encore davantage par l’épuisement des « années psychédéliques », de « l’après-68 » dirait-on en France. En conséquence, pour juger de l’influence de Castaneda sur les anthropologues de son époque, il n’est donc pas nécessaire d’évaluer l’authenticité de ses écrits et de ses enquêtes. Tous les étudiants en anthropologie américains des années 1960 l’ont lu et les plus ouverts ont apprécié ses relations avec ses locuteurs à l’image de Paul Riesman pour toutes les raisons évoquées plus haut. Or, ce sont évidemment ces mêmes étudiants qui ont renouvelé la discipline dans la décennie suivante sous l’étiquette de « post-modernisme », de la Writing Culture school ou autres, quand ils ont insisté sur l’importance du discours des locuteurs, des modalités de la transmission de leur savoir, de l’interaction qui les suscitait et des formes d’écriture à adopter pour en rendre compte – programme implicite des livres de Castaneda qui annonçaient l’anthropologie future.

Par leur succès commercial joint à « l’atmosphère intellectuelle » de l’époque, les livres de Castaneda proposaient un programme aux anthropologues : enregistrer les paroles des locuteurs en s’inscrivant dans ce que de Certeau appelle la tradition hétérologique, « où le discours sur l’autre est le moyen de construire un discours autorisé sur l’autre » (Certeau 2005 : 250). Il s’opposait à ceux qui pourraient être désignés comme « structuralistes » à l’époque, courant florissant de par le monde et en particulier aux États-Unis. Surtout, si les premiers livres de Castaneda refusaient le regard extérieur et les catégories imposées, et même s’ils n’étaient pas les seuls à offrir d’aussi larges perspectives, ils ouvraient également la porte sur un domaine voué à un grand avenir : le New Age. Pour rester dans le seul domaine de l’anthropologie, constatons qu’ils ont su perpétuer, contre les vents contraires, l’importance des enquêtes, de l’attention au détail des propos des interlocuteurs de l’ethnographe et à leur façon de les exprimer.

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

Généralités

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Livres de Carlos Castaneda en français

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[1J’ai moi-même enregistré les propos d’une de ses amies anthropologues qui l’a connu au séminaire de Garfinkel à Los Angeles, avant de le fréquenter dans les années 1970.

[2Voir la bibliographie.

[3Non que le mysticisme ne puisse devenir un objet d’études, l’œuvre de Certeau le démontre, mais à condition d’examiner les conduites qui amènent ce type de discours, et non la réalité de l’objet ; ou alors, nous changeons de discipline, ce que voulait peut-être faire Castaneda.

[4Sous d’autres formes, Oscar Lewis présentait une alternative au courant structuraliste mais dans le cadre idéologique de l’après-guerre, celui des luttes sociales et des révolutions coloniales.